Chapitre 50 [Shannon]:

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Les coups ébranlent presque la porte, et je me demande qui est l'enculé qui ose me déranger à une heure pareille. J'enfile un jogging et me traine jusqu'à la porte, que je déverrouille.

A travers l'entrebaillement, les yeux bleus de Jai luisent d'une lueur étrange. Je m'écarte pour la laisser passer, et je n'ai pas le temps de poser une seule question qu'elle me pousse contre le mur et s'empare de mes lèvres.

Je gémis sous la vague de plaisir que son corps communique au mien. A l'étroit dans mon boxer, je l'attire plus près de moi, cherchant quand même à comprendre pourquoi cette visite soudaine, cette fougue, cette impression de lui paraitre soudainement important.

- Hé, qu'est-ce qu'il se passe?

- Rien, chuchote-t-elle contre ma joue. Juste... Prends-moi, s'il te plait. Je suis à toi.

Il ne m'en faut pas plus, alors j'obéis, parce que je sais qu'elle finira par me parler. Etre avec elle, c'est faire les montagnes russes en apnée, ou encore franchir le col Dyatlov sans penser aux rumeurs, s'enflammer, s'ébouillanter puis se jeter dans une piscine gelée. Un mélange d'émotions et de sensations aux antipodes l'une de l'autre.

- Dis?

- Mmmh? Marmonne-t-elle.

- Tu me le dirais, hein, si jamais tu m'aimais?

Dans l'obscurité, je sens son regard sur moi. Je rougis. Je ne sais même pas pourquoi j'ai sorti ça. Le silence perdure, et je ne tiens plus éveillé. Vieillir, ça craint. De toute façon, Jai ne dira rien de plus pour le moment.

Plus tard, elle tire longuement sur son joint, pensive, les yeux rougis par notre nuit blanche. Il a neigé toute la nuit, et on a regardé les flocons tomber par la grande baie vitrée, nus.

Elle a tenu à braver le froid pour venir à Hyde Park, témoin de nos rencontres. Elle a dit à son travail qu'elle était malade. C'est pour ça que je me retrouve couché sur une couverture de laine déjà humide et que je laisse les quelques flocons fondre sur mon visage alors que je retire consciencieusement ceux qui s'accrochent à ses cils.

Jai se frotte le poignet. Elle y pense. Mais ça n'arrivera pas. Pas tant que je serais là.

- C'était il y a quatre ans, dit-elle soudainement. La maison a pris feu alors que j'étais chez mon oncle, enfin l'homme que je considère comme un oncle.

Je tourne la tête si brusquement que mes cervicales craquent. Ca y est, elle parle. Elle avait évoqué deux enfants morts, l'autre nuit.

C'est dans les institutions publiques que Jai a connue Cyan, rejetées par des parents dont elles ne savent rien. De trois mois sa cadette, Cyan a été adoptée peu avant ses deux ans. Leur destin, aussi cruel soit-il, a fait que chaque famille se soit passé le relais pour ne jamais séparer les deux fillettes.

Aujourd'hui, Cyan considère ses parents adoptifs comme les vrais, et vingt ans de vagabondage ont soudés Cyan à Jai. Et j'admire leur capacité presque surhumaine à savoir ce que pense l'autre ou encore à chanter les mêmes chansons en même temps sans même s'être concertées. Dingue.

- Je suis revenue quand le feu venait d'être éteint. Je devais reprendre le boulot le lendemain. Tout ce que j'ai vu, c'est les ambulanciers qui mettaient Sam et Simon dans des sacs. Y'avait plus rien à voir, les gamins étaient carbonisés... Je suis tombée encore plus bas et j'ai encore changé de famille. C'était pas la joie.

Mes oreilles sifflent et je me sens mal, j'ai envie de vomir. Les jumeaux avaient six ans, raconte Jai. Nés en Israël, ils avaient été confiés à l'adoption après l'accident de voiture qui a tué leurs parents. A onze mois, les bébés ont miraculeusement survécus. Jai les a tout de suite aimés. Sam et Simon, qui ont quittés leur pays natal à trois mois, n'ont jamais pu y retourner, et reposent maintenant côte à côte sous une même pierre tombale en marbre blanc dans un cimetière parisien.

Des jumeaux qui meurent en même temps. Morts dans les bras l'un de l'autre, dans la souffrance de l'immolation, avec la sensation affreuse d'avoir été abandonnés.

- Tu n'as pas envie d'aller te recueillir sur leur tombe?

- Non, je n'ai pas envie de retourner en France.

Elle a perdu ses frères. Elle avait enfin une famille, même sans liens du sang. Et comme moi, elle sait ce que c'est de perdre son cadet, sauf qu'elle en a perdu deux en même temps.

Seulement maintenant, je peux mettre des noms et une histoire sur son tatouage. Un mélange d'empreintes de mains, de soleil, de bonhommes enfantins, de petits traits et de grands ronds qui complètent les coeurs biscornus et les animaux pourvus de bâtons multicolores en guise de pattes.

Sam. Simon.

Quand j'étais gamin, un des autres gosses de ma classe a soudainement cessé de venir à l'école. Je devais avoir huit ans. J'ai finalement appris qu'il avait été battu à mort par son père.

Je déteste savoir que des gosses meurent. Qu'ici et ailleurs, des bébés et des enfants meurent de maladies, d'accidents, de malnutrition... ou sous les coups, tués comme des bêtes malpropres.

Je hais la facilité avec laquelle l'univers brise le verre, brise les enfants, brise les cités des Hommes. Brise tout.


NDA: Hello, it's me.
I was wondering if... 😂😂 Putain je hais cette musique.

C'est déjà le chapitre 50 (la taille de ma... Oh wait.) 🎉🎉 Il est temps de faire le point, même si ça vous fait chier 😂😂 (Merci de me lire 😘)

1. Est-ce que la lecture est fluide? Est-ce que ça manque de cohérence, est-ce qu'il y a des fautes?

2. On en apprend un peu plus, et Shan va partir. Comment voyez-vous la suite? Vous voulez que ça aille plus vite ou plus doucement?

3. Trop ou pas assez de sexe? Vous voulez des petits gifs, des petites images? Comme les livres pour enfants? (Je ne suis pas vraiment adepte de ce genre de choses!)

4. Désolée pour mon humour de merde. Et pour la relation entre Cyan et Jai et toutes leurs bizarreries... Mais c'est ma vraie relation avec Cyan.

5. Blow me. #Soon 😘😘

Course Contre La VieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant