Chapitre 44 [Shannon]:

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Je m'écroule presque du lit en me retournant, la gorge sèche et la bouche pâteuse. L'estomac en vrac, j'ai juste le temps d'arriver aux toilettes que je rends tout.

Merde, mais dans quel état je suis?

Je jure encore en me trainant sous la douche, et encore plus quand je me rends compte que j'ai gardé mon t-shirt et mon caleçon.

- T'as une sale gueule, fait remarquer Tomo.

- La faute à qui? Grogné-je. Putain de merde, j'ai l'impression qu'un camion m'a écrasé! Il est où mon tel?

Il me faut quinze minutes pour le trouver, gisant sans batterie au fond des draps. Il est quatorze heures, je ne me souviens pratiquement pas de la veille, à part qu'on a bu quelques bouteilles à deux.

1 appel manqué: Jai.

Il date d'hier soir, depuis plus rien. Elle voulait sûrement savoir si je venais chez elle ou non, c'est vrai que j'aurais au moins pu la prévenir.

- Quoi?

- Rien... rien. T'es pas avec Vicki?

- Non, elle a croisée par hasard une de ses copines et elles font du shopping. Je suis sûr qu'il faudra un putain de paquebot pour rentrer!

- T'abuses de parler d'elle comme ça. Elle est enceinte, pas grosse.

Il me regarde comme si j'étais devenu con pendant la nuit.

- Je parlais de ses achats...

Ah. Le malaise. Mais il n'en tient pas compte, et préfère aller faire un tour pour manger. Sans moi, je ne tiens pas à tester la résistance de mon estomac.

Shannon: Désolé j'avais plus de batterie.
Ca va?

Et quand, au bout d'une heure, je ne reçois pas de réponse, je commence à me demander ce qu'elle fait. Elle a toujours son téléphone sur elle, même dans la salle de bain ou dans son lit.

Elle n'est pas vexée de mon absence, elle ne ressent aucun droit à être jalouse. Je suis libre d'aller et venir, et ça me perturbe. Je suis censé en penser quoi?

Quand la nuit tombe, je décide de mettre ma fierté de côté et d'aller voir chez elle. Les lumières sont toutes éteintes, aucune trace de présence depuis la rue.

0710. La porte s'ouvre. Etage 4. Dès que j'ouvre la porte, les chiens se précipitent sur moi en bondissant partout.

- Doucement, les gars. C'est que moi. JAI?

Je grogne. Je n'aime pas ça. J'ai l'impression d'être un intrus. Elle pourrait ne pas être là, ou être avec quelqu'un... Elle ne veut peut-être pas me voir.

Mais elle est là, à peine visible dans l'obscurité. Roulée en boule, sous ses couvertures, tournée vers la fenêtre, si bien que je ne vois pas si elle dort ou non.

Je me débarrasse de mon manteau et de mes chaussures pour m'approcher d'elle. Assis au bord du lit, je n'ose pas faire un geste de plus.

- Jai?

Elle a les genoux au même niveau que son visage, et elle garde les yeux fermés, parcourue de tremblements. Alors c'est ça? Je la quitte une journée et je la retrouve au bord du gouffre?

Elle ne répond pas à son prénom, c'est là que je réalise qu'elle a ses écouteurs. Je hoche donc la tête, dépité, et retourne au salon dans le but de lui faire à manger, quand mon regard tombe sur mon téléphone.

Sa voix me manque. Je connais son numéro par coeur à force de le composer. Et cette fois, mon pouce appuie sur le voyant vert.

Une sonnerie. Deux. Trois. Quatre. Cinq. Puis le vide interrogateur.

- Maman?

Ma voix est tremblante, dégueulasse, comme quand j'ai dit au revoir à Jared. Je n'entends plus rien autour de moi tellement le sang bat fort dans mes oreilles. Tout ce que j'ai refoulé me submerge.

- Shannon? Shannon, chéri, c'est toi?

- Oui...

Et je me mets à pleurer comme un gros bébé. Je m'affale et glisse contre le mur, rejoins par Lupin et Boo. J'appuie fort mes doigts contre mes paupières pour essayer de me reprendre.

- Ne pleure pas, maman est là. Est-ce que tu vas bien? Tu veux que je vienne?

- Ca va... ça va.

Aucune larme de sa part mais la voix fêlée. J'admirerais toujours le courage et la force de ma mère. Se reprendre est difficile, et elle me pose mille questions, dont je suis bien incapable de lui répondre. Alors je me contente de la version censurée, et lui dit que j'ai besoin d'être seul, à l'abri des médias, même si maintenant, ils savent où me trouver.

- Je t'aime Shannon, ne l'oublie pas. Ne me mets pas de côté, je suis là. Tu as toujours ta place à la maison.

J'écarte le téléphone le temps de laisser échapper un sanglot et hoche la tête, bien qu'elle ne puisse pas me voir.

- Je reviendrai... quand je serai prêt.

Et qui sait si je le serai un jour?

Parfois, j'ai l'impression que c'est tout ce que je mérite. Je commence à savoir ce qu'on ressent, quand la douleur ne s'en va jamais.

Course Contre La VieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant