Chapitre 119 [Shannon]:

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Elle respire lourdement contre mon torse, les yeux fermés, pendant de longues secondes, alors que je me liquéfie sur place. Putain, je déteste attendre.

Et si elle disait non?

Dans ma poche, la bague semble me brûler. J'ai mis une heure à trouver une bague de fiançailles à l'image de Jai. Tomo n'a pas été d'une grande aide, mais il était là, et c'était important pour moi.

- Tu veux vraiment de moi? Chuchote-t-elle. Parce que si je dis oui, tu m'aura sur le dos jusqu'à la fin de ta vie. Je ne te lâcherai pas.

- C'est moi qui te demande de m'épouser, ne retourne pas la situation petite emmerdeuse.

Elle sourit, son ventre m'empêche de l'avoir totalement contre moi. Franchement, j'ai hâte que cette grossesse se termine. On est d'accord sur le fait de ne pas renouveller l'expérience. Peu importe qu'on ai un seul enfant et pas plusieurs.

Je hais tout ça. C'est trop long, je suis angoissé à l'idée de l'accouchement et de tout ce qui pourrait se passer, les relations sexuelles ne sont plus les mêmes, et tout le monde ne parle déjà que du bébé.

- Ok, chuchote-t-elle.

- Tu veux? Tu veux vraiment m'épouser?!

- Oui...

Je respire enfin. Je n'avais pas conscience de retenir mon souffle. Jai a des étoiles dans les yeux, j'en profite pour passer la bague à son doigt. L'anneau d'or blanc brille et l'unique rubis attire un rayon de soleil alors que je la bascule sur le lit.

- Te voilà enchainée à moi, madame Leto.

Mais elle a l'air ravie d'être enchainée, cette fois-ci. Sûrement parce que c'est la seule chaine qui ne l'étrangle pas, parce que celle-ci, elle l'a choisie.

A quatre pattes au-dessus d'elle, je me penche pour l'embrasser. Je n'ai jamais rêvé au mariage, et je ne veux pas d'un grand truc pour exposer notre union. Juste nous, une cérémonie rapide, et le reste de notre vie pour en profiter.

- ALORS, LA DAME A DIT OUIIIII? OUPS.

Je manque faire une crise cardiaque à l'arrivée brusque de Tomo, et cache le corps de Jai avec le mien, gêné d'être surpris en plein moment intime.

- TOMISLAV! Laisse-les tranquille!

La porte claque, Jai glousse doucement et m'attire aussi près d'elle que possible. Je crois que le bébé a compris la leçon, il nous laisse tranquille, et je ne touche plus toute la zone du ventre pendant l'acte.

- Merde, il fait chier quand il s'y met!

Plus tard, je redescends sous les yeux attendris de ma mère et ceux, lubriques, de mon meilleur pote. Jai dort en haut, Aksel fait la sieste sur le canapé, veillé par les chiens.

Ils attendent tous.

- Elle a dit oui, dis-je, gêné et fier.

Ils se précipitent sur moi et m'enlacent à m'en étouffer en me félicitant. Ma mère a les yeux qui brillent d'émotion. J'ai réussi. Je lui offre le paradis.

- Joli cul, d'ailleurs, dit Tomo en faisant sauter le bouchon d'une bouteille de champagne. T'es bien conservé pour un presque cinquantenaire, Shanny.

- Mon dieu, dit Vicki en roulant des yeux.

- Dis, puisque aujourd'hui est un jour particulier... On va se remémorer tous nos souvenirs. Tu te rappelles de la fois où tu t'es pissé dessus?

Je lui jette un regard noir et il hurle tellement fort de rire que Jai descend et que Aksel se met à pleurer. J'esquive son regard goguenard et fuit à la cuisine pour éviter qu'il ne continue sur la voie des souvenirs gênants.

- Qui s'est pissé dessus? Demande Jai.

- Ton futur mari, répond Tomo avec candeur.

- Ah ouais? Et tu veux que je te rappelle que tu as embrassé un camion?

- C'est soft, ça.

- Ou de la fois où on a dût appeler les pompiers parce que tu t'étais coincé la queue dans ta braguette et que tu pleurais?

- Ah, le traitre! Toi, c'est Emma qui a dût changer tes draps en pleine nuit!

Ma mère lève les mains en voyant que la situation devient gênante. Merci maman.

Jai éclate de rire, assise sur le comptoir de la cuisine, Aksel dans les bras. Je la vois déjà mère. J'ai parfois l'image d'un enfant surgissant de l'ombre. De cette voix qui l'appelle maman alors qu'elle tient notre bébé dans ses bras.

Plus tard, je trouve Jai avec deux chatons sur les genoux, sur la terrasse.

- On peut les garder?

- Ils ne sont pas à nous, Jai. Sûrement aux voisins.

- Nooon, ça fait des jours qu'ils viennent là, ils sont tous seuls. S'te plait, je veux un chat. Cyan n'en voulait pas!

Ca ne m'étonne pas de Cyan, qui a un jour déclaré que les chats étaient les pires bâtards au monde. Le chat gris saute sur mes genoux en miaulant, il louche de ses yeux bleus.

- Regarde sa gueule de con quand il miaule, il est trooop chou, ajoute-t-elle.

Les hormones ramolissent son coeur de pierre, je crois. Elle câline celui qui est resté sur ses genoux, un chat tout noir. Ils ne se ressemblent même pas.

- Je vais appeler celui-ci Pax, déclare-t-elle.

Paix, en latin. C'est là que je prends conscience de l'aura de Jai, qui a changée. Toute la colère et la douleur se sont atténuées. Son chaton miaule. Te sens-tu en paix, Jai? As-tu enfin trouvé assez de paix avec toi-même pour accepter de vivre?

Elle ne peut pas oublier hier, parce que aujourd'hui, elle a mal... mais ça va, maintenant.

- Très bien, dis-je en soulevant le chat à hauteur de mon visage. Lui s'appelera Eros.

- Espèce de pervers.

Mais Eros miaule encore. Il a l'air de bien accepter de s'appeler Erotisme. Je ricane.

Deux chiens. Deux chats. Une femme. Un bébé.

J'étais à mille lieux de m'imaginer ce qui me tomberait sur la tronche en l'espace d'un an. Tout était trop fragile, entre Jai et moi, à cette même époque, l'année dernière.

Est-ce que nos prénoms sont toujours écrits sur Times Square, à Londres?

Course Contre La VieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant