Chapitre 90 [Jai]:

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- Hey, salut! Tu dois être Jai. Enchanté, je suis Travis! Comment ça va?

- Salut, enchantée. Est-ce que Shan est là?

- Yep, il est en train de trier sa commande. Il n'en fait qu'à sa tête.

- Il n'oserait pas, dis-je avec sarcasme en roulant des yeux sous les ricanements de son assistant.

Ils sont quatre à bosser dans la rénovation du café, et Travis aide souvent, parce que Shan le garde comme assistant même s'il n'en a plus besoin. Ils vont souvent faire de la moto ensemble, et Travis gère les formalités de Black Fuel en tout genre.

Il est parti tôt chercher sa commande de grains de café, et m'a dit de le rejoindre... en une semaine, tout a changé. La peinture est presque terminée, les machines sont en train d'être installées et les tables et chaises seront livrées d'ici quelques jours.

Une atmosphère calme et chaleureuse règne déjà. La peinture est dans les tons bleus, le comptoir est en zinc et le sol est un parquet vitrifié clair.

C'est aujourd'hui qu'il rencontre les futurs employés. Je ne reste pas longtemps, juste le temps de le voir un peu. Je ne sais pas quoi faire de mes journées et je déteste tourner en rond. J'ai assez hâte de commencer à travailler ici.

- Hey. Travis m'a dit que tu étais chiant.

- Il a vraiment dit ça? Ricane-t-il.

- Hmm... Il l'a laissé sous-entendre... Assez fort pour que je l'entende.

Il rit, perdu entre ses énormes sacs de grains.

La pièce qui sera un petit bureau embaume le café. Pour le moment, il n'y a qu'une table, deux chaises et un canapé. Ce dernier est couvert de feuilles.

- Tu as déjà des vues sur quelqu'un?

- Ouais... Deux jeunes assez sympas. Ils ont déjà de l'expérience avec les machines à moudre.

- C'est qui?

Il fouille dans ses papiers, fait tomber un stylo et renverse une pile de CV en essayant de chercher les deux élus. S'il a déjà décidé, c'est que rien ne pourra le faire revenir sur son choix.

- Hestia et Ashton, ça ne fera pas de mal d'avoir une équipe jeune. Travis a dit qu'il ne voyait aucun problème pour remplacer. Je dois aller chez Wayne avant de rejoindre ma mère pour continuer à vider la maison de Jared. Tu veux venir?

Il me sort tout ça d'un coup, parce que je sais que, sinon, il oubliera de me prévenir.

Wayne est un de ses meilleurs amis, il a un enfant de cinq ans. Et pour ce qui est d'aller chez Jared... J'ai toujours refusé. Pour moi, c'est un truc familial, je ne peux pas m'incruster... Mais le sourire plein d'espoir de Shan me fait céder.

- Merci, dit-il doucement. On a bientôt fini, le mec de l'agence vient jeudi. Ah, au fait, Tomo sera là.

- Il est arrivé quand de Detroit?

- Ils sont dans leur maison secondaire, ici. On a les derniers accords à signer avant la sortie de l'album. Tu pourras peut-être... sortir un peu avec Vicki? Tomo dit qu'elle ne vit pas très bien la grossesse.

- Ouais. On ira faire les magasins tout en parlant en mal de vous, ricané-je.

Il sourit, ferme la porte du plat de la main, me colle contre celle-ci et m'embrasse. Le courant électrique passe de son corps au mien, et l'espace minime entre nous s'enflamme.

Mes pensées deviennent incohérentes. Au diable ce qu'ils disent tous. Il est à moi, et c'est moi qu'il a choisi.

- Pas ici, ni maintenant, gémis-je.

Il retire son t-shirt et accroche ses doigts à la ceinture de mon jeans. Mon corps hurle le contraire de ce que ma tête dit. Derrière cette porte, cinq hommes travaillent.

- Ici, et maintenant, grogne-t-il.

Plus tard dans la journée, je remplis des cartons et les déposent dans le SUV noir de Shan, qui les stockent dans sa cave. Il fait si chaud que mon t-shirt me colle à la peau, mais je continue encore et encore. J'aide Constance, je passe le balai et la serpillère dans les pièces vides...

Je m'occupe l'esprit en essayant de ne pas penser à Jared... A un Jared vivant qui a parcouru ces pièces. Pas à un Jared suicidaire.

- Mec, j'y crois pas... Tu sais te contenir?

Tomo et Shan sont dans le grand bureau de Jared, dans un bazar pas possible. Ils rient tellement que je me demande s'ils ont un peu avancé ou non depuis deux heures.

- Ah ouais, et tu veux que je te rappelle quand tu as baissé ton...

Accroupi derrière un carton vide, Tomo se bouche les oreilles comme un gamin, secoue ses cheveux dans tous les sens et se met à hurler plus fort que Shan, qui essaie de lui remémorer quelque chose entre ses crises de rires.

- LALALALALALALALALA, JE T'ENTENDS PAS!

- TU AS FAIT...

- ...LALALALALALA...

- ...SUR LA MUSIQUE DE PETIT OURS BRUN...

- ... JE T'ENTENDS PAS! LALALALALA...

J'éclate de rire et rejoins Constance qui termine de vider le dressing. Les cartons s'entassent. Il nous a fallu quatre heures pour en venir à bout tellement Jared avait de vêtements, et personne n'a fait de commentaires sur son style vestimentaire, pourtant catastrophique.

- Ils n'ont pas fini de faire les idiots?

Je commence à sceller les cartons au gros scotch. Dehors, deux gamins éclatent de rire. Bientôt, ici, il y aura peut-être une famille, ou une autre star.

La vie continue. N'est-ce pas, Jared?

- TU AS FAIT L'HÉLICOBITE SUR LA MUSIQUE DE PETIT OURS BRUN!

- Non, soupiré-je. Ils n'ont pas fini.

Je me réveille en sursaut, le corps endolori. Un plaid glisse par terre. Je ne me rappelle même pas m'être endormie sur le canapé à notre retour!

Il fait déjà nuit, et je retrouve Shan sur le balcon. Les deux chiens sont couchés près de lui. En regardant la voûte céleste, je me rends compte que je n'ai pas eu une seule pensée noire de la journée.

Course Contre La VieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant