Chapitre 32 [Shannon]:

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- Shan?

Les dernières brumes de mon sommeil s'évaporent, et j'essaie tant bien que mal de retenir cette image nette de Jared, qui s'évapore malgré tout en volutes.

- Shan?

- Mmmmh?

- Shan!

Je suis définitivement réveillé. Il fait nuit noire dans la chambre, et ce n'est pas mon frère qui m'appelle en rêve, mais Jai, à côté de moi. Je suis partagé entre colère et chagrin, privé d'un moment rare de joie auquel je n'étais pas prêt à mettre un terme.

- Quoi? Merde, Jai! Il est cinq heures du matin! Qu'est-ce qu'il y a?

- Je me demandais...

Je roule des yeux, exaspéré. Pourquoi Jai a-t-elle besoin de poser des questions alors que j'aimerais juste dormir? Je me tourne quand même sur le dos pour lui signifier que je suis prêt à l'écouter, et garde les yeux grands ouverts pour ne pas retomber dans le sommeil.

- Je t'écoute.

- T'as sûrement baiser une centaine de meufs, voire plus, alors comment peux-tu être sûr de ne pas avoir un gamin ou dix qui t'attendent quelque part?

Je fronce les sourcils et soupire. Elle est sérieusement encore en train d'y penser depuis le diner? Pourquoi, d'ailleurs? C'est complètement stupide. Je fais ce que je veux de ma queue, mais je n'allais certainement pas faire un enfant à une fille d'un soir. Je ne suis pas aussi con.

- Parce que je me suis toujours protégé.

- Oui, mais en es-tu sûr? Insiste-t-elle.

Elle arrive à insinuer le doute dans mon esprit. Et si? Il suffit d'un jour. D'une seule fois. Peut-être ou peut-être pas. Je n'en sais rien, et je ne veux pas envisager cette situation.

- Je pense que, si c'était le cas, la fille se serait manifestée. Tu crois pas?

- Et si ça aurait été le cas... tu aurais fait quoi?

J'en sais rien. Coucher avec des fans est une chose, et je reste plutôt discret sur ce genre de choses, mais devoir assumer un enfant non-voulu en est une autre. Ma mère nous a souvent fait la leçon sur notre responsabilité d'hommes et c'est resté, et Jared et moi aurions pu avoir des actions dans chaque fournisseur de capotes tellement on en achetait.

Tomo faisait exprès de cacher des préservatifs dans nos poches quand on sortait, ou dans les tiroirs ou nos dossiers... Et hurlait de rire quand tout tombait sous les yeux ébahis des gens. Il y en avait partout dans le tourbus, aussi, au cas où. Mais je n'ai jamais vu Tomo draguer ou répondre à des avances, pour lui, c'est Vicki et pas une autre.

En pensant à lui, j'ai un pincement de joie au coeur. J'ai hâte de le revoir.

- Pour être honnête, je ne pense pas que j'aurais assumé. Je veux dire, j'ai envie d'avoir un enfant, mais pas de cette façon. J'aurais versé de l'argent chaque mois pour les soins de l'enfant et tout, mais rien de plus. Pas de retrouvailles avec la fille, ni de coup de foudre ou toutes ces conneries.

- Ok... Merci d'avoir répondu. Bonne nuit.

- Va pourrir en enfer, sale enfoirée. T'as coupé ma nuit, maintenant, tu restes avec moi!

Elle se tourne, s'affale un peu plus sur moi, et après avoir ricané, replonge dans le silence. Ce n'est qu'une demi-heure après que je comprends qu'elle s'est rendormie, me laissant seul avec tout ça.

Un enfant, quelque part? Je suis stressé rien que d'y penser. Je ne veux pas de ça, je ne veux pas être ce géniteur absent de sa vie, je ne veux pas être le connard bourré de fric qui préfère sa carrière et tout le reste à son môme.

Voilà pourquoi je suis encore célibataire et sans enfants à mon âge.

Enfin... Célibataire... Je ne sais pas si c'est toujours le cas. Je passe ma main sur le flanc de Jai, jusqu'à l'élastique de son shorty, qui cache ce tatouage que je n'ai découvert que la semaine dernière.

Un embryon.

Et aucune explication sur ce tatouage, fait lorsqu'elle avait à peine seize ans.

Course Contre La VieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant