Chapitre 115 [Shannon]:

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- Tout ce que vous direz ne sortira pas de cette pièce, monsieur Leto. Si vous avez des doutes ou des questions, n'hésitez pas. Ne pensez pas à votre petite-amie, concentrez-vous sur vous.

J'essuie mes mains moites sur mon jeans et déglutit, nerveux. En face de moi, la psy me regarde en souriant doucement. Je suis encore muet de l'échographie, et trop gêné pour faire part de mes problèmes d'homme.

- Est-ce que tout va bien? Est-ce que cet enfant était désiré? Etes-vous heureux?

- Non, mais n'allez pas croire qu'on en veut pas. On est très heureux à l'idée d'être parents.

Elle hoche la tête et écrit quelque chose sur son petit carnet. J'espère juste que ce n'est pas une assistante sociale déguisée. Avec notre situation, ça pourrait très vite déraper.

- Je vois bien que quelque chose vous tracasse, monsieur Leto. En parler pourrait vous faire du bien, on pourrait trouver une solution ensemble.

Je soupire un grand coup et fourre mes mains dans mes poches. Tout un chaudron de colère, de gêne, de dégoût et de douleur est en train de bouillir dangereusement en moi.

- C'est avec votre compagne que ça coince?

Je me lève brusquement, la chaise crisse sur le lino et mes paumes frappent sur son bureau. La peau me chauffe sous la violence du coup, je m'aperçois que je tremble. Mes nerfs lâchent.

- Ouais, ça coince, dis-je, les dents serrées. Ca coince vachement, parce que je n'arrive plus à bander. Voilà le problème!

Pas d'érection depuis douze jours. On dirait que cette partie de mon corps s'est éteinte. Merde, quoi! Je n'avais pas envie de sentir le bébé bouger alors que je jouissais!

J'ai assimilé les mouvements du bébé au sexe, sa présence à mon orgasme. Les sueurs froides me reprennent. Jai n'ose même plus me serrer dans ses bras, je n'ose plus la toucher. Notre couple est en train de se disloquer, je le vois bien.

- Est-ce qu'il y a eu un élément déclencheur? Le sexe tient-il une grande place dans votre couple?

- Putain, évidemment que le sexe tient une grande place chez nous! Mais... bordel de merde, est-ce que vous imaginez ce que c'est de sentir votre enfant bouger pour la première fois alors que vous êtes EN PLEINE EJACULATION?!

Je me crispe. Il faut vraiment que j'arrête de hurler, les murs de cet hôpital sont aussi fins que du papier, et Jai est dans la salle à côté. Je ne lui ai rien dit de tout ça, même si elle sait très bien que ça ne marche plus.

Merde, j'ai vraiment honte.

La psy se lève et vient s'appuyer au bureau, juste devant moi. Je m'apprête à lui demander ce qu'elle fout, mais deux doigts agiles viennent défaire les premiers boutons de sa blouse, révélant un soutien-gorge en dentelle blanche.

Je déglutis et tire sur le col de mon t-shirt. Putain de merde... il fait chaud ici.

- On pourrait peut-être remédier à ça, hum, qu'est-ce que vous en dites, monsieur Leto? Chuchote-t-elle en se penchant un peu plus.

Sa main aux longs ongles peints en rouge glissent sur toute la longueur de mon torse. Je suis figé, la respiration lourde et courte. Non... non, pas ça, quand même!

Et bien si, quand ses doigts se referment sur la ceinture de mon jeans, je suis dur. Je crispe les paupières, tiraillé entre ce foutu désir qui me démange et la promesse.

Comme absent, je me lève et plaque mon bassin contre le sien, haletant. Elle doit avoir une dizaine d'années de moins que moi, son corps est bien foutu. J'appuie mon érection contre son ventre, et elle gémit, et je suis sur le point d'en faire mon affaire quand je pense à Jai.

Je recule, complètement terrifié. Merde, merde, merde! Je suis à la maternité pour la deuxième écho, et je suis en train de bander devant la psy!

Je ferme ma braguette et m'enfuis du bureau en la laissant en plan, et je tire sur mon t-shirt pour passer la tête dans le bureau d'à côté pour prévenir Jai que je m'en vais en prétextant un appel urgent.

Je lui laisse la voiture et pars en bus jusqu'à chez moi pour prendre la moto, mais même la vitesse ne m'aide pas à me vider la tête.

Puis, devant un verre de whisky, je me demande où sont les limites. Est-ce que je l'ai dépassée? Merde, et qu'est-ce que je fous ici, d'ailleurs?!

Quand je me lève, le sol tangue un peu. Je ne peux pas prendre la moto dans cet état. Je me retrouve à me les geler dehors en attendant Travis, le seul à savoir conduire un bolide comme le mien.

- T'es dans un sale état, mon pote.

Travis me tend la main pour m'aider à me relever et ma combinaison de motard crisse et grince. Il est tard dans la nuit, on est à l'autre bout de la ville.

Il doit s'arrêter deux fois pour me laisser le temps de vomir et pisser, ma façon à moi d'évacuer. J'ai pété des mois de sobriété. Ma mère et Jai doivent m'attendre, mortes d'inquiétude. L'une a peur à chaque fois que je prends la moto, l'autre sait qu'il y a un problème.

- T'es sûr que ça va aller? Demande Travis.

- Ouais, ouais. Merci mon pote. Tu veux que je t'appelle un taxi?

- Nan, ça va aller, merci. Va te coucher.

Mais à la maison, tout est éteint. Il est deux heures du matin. Je fais tomber mes clés dans le hall d'entrée et me défonce les tibias contre la table basse en retirant ma veste et mon pantalon.

Des pas descendent l'escalier, et je me retrouve face à Jai tenant une batte de baseball, seulement vêtue d'un de mes débardeur qui découvre un de ses seins.

Je respire un grand coup.

Mon regard embrumé glisse sur ses jambes nues. Je me sens serré dans mon boxer.

Course Contre La VieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant