Pʀᴇᴍɪᴇʀ Aᴍᴏᴜʀ |TaeKook| ★

57 - Aᴍʙɪᴀɴᴄᴇ ɢʟᴀᴄɪᴀʟᴇ ; ᴛᴇɴᴅʀᴇs ᴇ́ᴄʜᴀɴɢᴇs

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Après sa brève provocation alimentaire, Taehyung n'avait plus rien à faire. Il avait subi le trajet jusqu'à la patinoire : les bouchons, les tours de béton, les centres commerciaux. Rien ne l'intéressait. La musique dans la voiture se résumait à quelques ballets classiques qu'il connaissait par cœur. Il n'avait fait aucune remarque et pourtant chaque note lui rappelait des routines, des enchainements. Le dimanche matin, lorsqu'ils se rendaient tous les trois à la patinoire. La petite famille faisait le trajet en vélo, tout en rang d'oignons. Taehyung se souvient parfaitement de son père, agenouillé, les traits lumineux ; il resserrait les lacets de ses patin bleus électrique. La sensation du froid sur ses joues, de ses chevilles fragiles sur les lames.

C'est à contre-cœur qu'il descend de la voiture. Jungkook lui a envoyé un sms d'encouragement et rempli progressivement sa story de futilité – comme une photo de lui, torse nu, dans un jean noir déchiré aux genoux. Il va faire du skateboard toute la journée avec Jiho et Mina. Taehyung ne renvoie qu'un petit cœur d'une neutralité presque blessante.

Jin sort de la voiture, s'étire, un grand sourire peint sur sa figure angélique. Maria le précède, son visage fermé. Taehyung ne dit rien, il regarde le sol : un revêtement plastique glissant. Ils passent sans payer, sa mère doit avoir un pass étant donné qu'elle est entraineuse. L'esprit de Taehyung s'encombre de futilité, de souvenir, d'angoisses. Il ne relève la tête que lorsqu'il voit l'indication de la salle de repos. Il tente discrètement de faire un petit pas de côté mais, comme il le pensait, sa mère ne le loupe pas.

« Tu vas où ? »

Il se retourne, le plus calmement possible. Il n'y a personne si tôt. Autour d'eux les bancs vides, les casiers, ce fichu sol en plastique et les étagères remplies de patin. Jin se tient en retrait, son énorme de sac de sport contre son flan, son corps longiligne et sculpté avalé par son épaisse doudoune.

« Je vais dans la salle de repos. »

Taehyung ne veut pas faire de scandales. Il ne veut pas une scène, se donner en spectacle devant ce garçon auquel sa mère semble attachée. Mais jamais elle ne l'avait obligé à revenir dans une patinoire. Maria savait que le dégoût de Taehyung pour la discipline n'était pas une provocation, c'était une véritable blessure. Si son genou s'était reconstitué, la fracture de son âme d'enfant n'avait jamais été tout à fait panser.

« Tu n'as pas choisi tes patins.

- Je ne vais pas en choisir. »

Ils s'affrontent du regard.

« Ça aurait fait plaisir à Jin de ne pas patiner seul. »

Le pauvre garçon ne sait plus où se mettre. Ses joues s'empourprent subitement et il ressert sans mains sur la hanse de son sac. Si la remarque était vraie, que Jin s'ennuyait sûrement à tourner tout seul en rond sur la glace, il était bien embarrassé que Maria en fasse un argument. Taehyung reconnaît bien là la femme qu'il aime amèrement. Une femme pour qui rien n'est plus important que sa passion et pour qui toute manipulation est bonne à prendre – involontaire ou non de sa part.