À l'aube de ce monde

Chapitre 41

Si Iris fut très visiblement soulagée de me voir revenir, elle ne posa toutefois aucune question. Je l'en remerciai intérieurement. Je m'excusai d'avoir disparu ainsi. Elle changea bien vite de sujet et nous passâmes le repas à discuter de choses anodines. Passer du temps avec elle me fit penser à Clarus et je me rappelais que j'avais totalement oublié de transmettre son message à Gladiolus. Et, bien sûr, quand j'avais besoin de lui, il n'était pas dans les parages.

Dès que je l'avais vu j'avais adressé un sourire à Prompto. Je voyais bien qu'il était gêné, mais je voulais qu'il comprenne que ma colère n'était que passagère. Comme les tempêtes, tout finissait par passer avec plus ou moins de temps.

Nous étions tous à table, Dustin et Monica à un bout, Talcott collé à Noctis, Gladiolus encore une fois sortit de je ne savais où, en train de manger du gâteau à l'orange, quand le téléphone de Noctis sonna. Il fit la moue avant de décrocher. Il écouta son interlocuteur quelques secondes avant de poser le téléphone sur la table et d'activer le haut-parleur.

— Clarus m'a passé un rapide coup de fil, annonça la voix reconnaissable de Cor. Il voulait que je vous prévienne que tout allait bien pour lui, qu'il n'avait pas eu de problème. Il paraît que quelqu'un lui a demandé de donner des nouvelles.

Je fis un vague geste de la main pour me dénoncer.

— J'ai un autre message à transmettre, pour la « petite ». Elle est là ?

C'était comme ça que Clarus m'appelait parfois. Dans la bouche du général, ça sonnait presque comme quelque chose de péjoratif.

— Je suis là, répondis-je.

— Il veut que tu saches qu'il s'est occupé d'Alban. Voilà. Au déplaisir, les jeunes.

Et il raccrocha. Je n'arriverais décidément jamais à cerner cet homme. Néanmoins, j'étais heureuse de savoir que Clarus n'avait pas eu d'ennuis. Et soulagée qu'il ait pu offrir une sépulture à Alban. Il devait avoir une famille et j'espérais que celle-ci savait dorénavant qu'il ne reviendrait pas et qu'elle aurait un endroit où se recueillir.

— C'est qui Alban ? demanda Noctis en rangeant son téléphone.

— L'un de mes précepteurs, dis-je rapidement. Il est décédé durant l'attaque du palais.

Cette réponse dut suffire à tout le monde car personne ne posa d'autres questions.

— C'est quoi ça ? interrogeai-je Prompto en désignant son bras.

Il passa une main sur le bandage que je n'avais même pas eu la décence de remarquer jusque-là.

— Souvenir d'un hobgobelin de Steyliff, expliqua-t-il avec un demi-sourire.

J'eus une idée, peut-être pas une bonne certes, mais ça se tentait.

Je mastiquais mon dernier morceau de gâteau en essuyant mes mains. J'en tendis une devant moi, vers Prompto qui me regarda sans comprendre.

— Donne-moi ta main, dis-je la bouche à moitié pleine. S'il te plaît. On va essayer quelque chose.

— ça ne se fait pas de parler la bouche pleine, maugréa Gladiolus.

— Et ça ne se fait pas d'essayer de fracasser les gens avec qui on passe son temps et c'est pourtant ce que tu tentes de faire presque tous les jours, répliquai-je.

— Et tu dis rien, Ignis ?

— J'avoue que là, elle marque un point, déclara celui-ci calmement.