À l'aube de ce monde

Chapitre 24

Tout ce que je vis de la première partie du voyage fut les douches de la station à laquelle Ignis s'arrêta. Il n'y avait que deux cabines, alors nous y allions à tour de rôle sans trop traîner. Sentir l'eau couler sur moi, évacuer la saleté et la sueur, délier mes muscles me fit tellement de bien que j'aurais pu m'endormir debout sous le jet. Je m'étais rhabillée en vitesse et j'avais tressé mes cheveux avant de rejoindre la voiture et de me réinstaller à l'arrière. Je parlais un peu avec Prompto puis, quand tout le monde fut revenu et qu'Ignis redémarra, je me laissai rapidement gagner par le sommeil.

**

Lorsque j'émergeai, ce n'était plus Gladiolus à ma droite mais Ignis. Ma tête était posée sur son bras, sorte d'oreiller improvisé. Noctis avait lui aussi glissé dans son sommeil, prenant une position incongrue : affalé, la tête sur mon épaule, un bras sur mes genoux et l'autre à moitié en l'air sans que je comprenne comment il pouvait tenir ainsi. Je me redressai un peu, bâilla, passa le dos de ma main sur ma bouche et bougea doucement le bras de Noctis pour le repousser contre lui. Il ne broncha pas, continuant de dormir du sommeil du juste. Ignis, lui, était parfaitement réveillé. J'étais un peu gênée de m'être laissée aller comme ça contre lui.

- Désolée, je crois que je t'ai un peu bavé dessus, marmonnai-je.

Il répondit juste par un sourire.

- ça se réveille enfin derrière ?

Gladiolus conduisait et je le vis jeter un œil dans le rétroviseur. Prompto se retourna comme il put, les cheveux un peu en bataille.

- L'écoute pas, je suis réveillé depuis dix minutes. Noct dort toujours, ajouta-t-il.

- En même temps, une bombe ne serait pas suffisante pour le réveiller, soupira Ignis.

En effet, il dormait profondément, la respiration calme et lente. Qu'il dorme donc. Si les jours qui suivaient étaient aussi éprouvants que ceux qui venaient de s'écouler, il faudrait profiter de chaque occasion qui se présentait pour se reposer.

Noctis remua un peu, marmonnant dans son sommeil. Son bras revint se poser avec lourdeur sur mes genoux. Je m'apprêtai à le bouger à nouveau avant de me retenir. Mes jambes me démangeaient et je me sentais entravée dans mes mouvements. Mais il ne faisait que dormir. Sa tête remonta un peu et s'enfouit dans ma tresse qui reposait sur mon épaule. C'était presque un peu gênant.

- Je crois qu'il bave sur tes cheveux, fit Prompto avec pragmatisme.

- J'ai bien bavé sur Ignis, la boucle est bouclée.

Il rit doucement. Une discussion s'engagea, ou nous ne parlions de rien de bien sérieux. Gladiolus répondait de façon monosyllabique au début avant de se décider à vraiment prendre part aux échanges.

- Il y a des choses que tu aimerais voir ? me demanda Prompto au bout d'un moment.

- Je ne sais pas vraiment, tout est déjà nouveau pour moi. La mer, peut-être. J'aimerais bien me promener sur le sable et marcher dans l'eau.

- Alors je suis sûr que tu adoreras la baie de Galdina !

- C'est un joli coin. La mer y est d'un bleu incroyable, limpide par endroit. C'est unique, commenta Ignis.

- Tu ne sortais vraiment pas, avant ?

Je ne doutais pas que Gladiolus avait toujours du mal à croire que j'avais vécu quinze ans cachée dans un recoin de l'enceinte du palais et que, pour compléter le tableau, son père n'eût jamais fait mention de ma présence. Même si, parfois, il essayait d'être sympa, il le faisait probablement pour garder une certaine harmonie dans le groupe.