Chapitre 97

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An 764, huit ans et deux semaines après Zegnautus

Hammerhead


Je n'avais pas vu Gladiolus depuis deux semaines.

Il ne répondait ni à mes appels ni à messages. Je ne savais que grâce à Prompto qu'il allait bien. Il fut d'ailleurs surpris que je lui demande des nouvelles et je lui avais avoué à demi-mot que ça n'allait pas vraiment entre nous. Pas du tout, même.

À trop me taire, à tout garder pour moi, à ne pas vouloir déranger les autres, Prompto n'était au courant de rien et je lui appris tout d'un coup. Il avait commencé à se morigéner de n'avoir rien remarqué. Je l'avais empêché de s'excuser ; il n'y était pour rien dans tout cela, et il n'avait rien vu parce que je n'avais pas voulu que ça soit le cas. Tout comme Gladiolus qui n'avait visiblement pas parlé à Prompto de notre relation qui s'étiolait.

Je dormais mal, j'étais nerveuse, je tournais en rond comme un animal en cage. J'avais sans cesse l'impression que quelque chose comme le ciel allait me tomber sur le coin de la tête.

C'était comme attendre une sentence divine : on savait que ça allait arriver, mais on ignorait quand. Et attendre était presque pire que tout.


**


Je n'attendis pas trop longtemps, cela dit.

J'étais en train de distribuer des affichettes préparées par Harvey concernant la femelle bandersnatch à l'armurier. Nous en avions accroché quelques-unes à plusieurs endroits clés d'Hammerhead afin de prévenir les chasseurs qui n'avaient pas assisté à la réunion deux semaines plus tôt de ne pas s'aventurer dans cette partie de Leide. Je devais ensuite retrouver Ignis et Prompto chez ce dernier pour déjeuner.

— Si vous pouviez en distribuer à vos prochains arrêts dans le Leide et à l'est de Duscae, ce serait top, dis-je.

L'armurier accepta sans problème et saisit le tas de feuillets que je lui tendais.

C'est là que je le vis, Séréna refermant les grilles derrière lui.

Gladiolus.

Mon estomac se tordit et quelque chose se figea dans ma gorge.

Il jeta un coup d'œil au parking. Je sus qu'il me vit à sa façon de tourner la tête et de jeter son sac sur l'épaule. Il entra en vitesse dans le mobil-home.

— Merci, lançai-je à l'armurier, la langue soudainement bien lourde.

Je courus presque et pris une minute devant la porte pour inspirer et ne pas l'ouvrir à la volée. J'entrai calmement, faisant défiler dans ma tête une vingtaine de phrases différentes.

Aucune ne franchit mes lèvres.

Il était dans la chambre, la tête dans l'armoire. En train de rassembler ses affaires qu'il jetait sans trop de précautions dans son sac. Il ne fit pas attention à moi. Seul le bref éclat de ses yeux à travers ses cheveux détachés m'assura qu'il savait que je me tenais là, dans l'encadrement de la porte. Je dus me pousser pour qu'il puisse accéder à la salle de bain récupérer ce qu'il voulait. Il ne lui fallut guère plus de quelques minutes.

— Tu es à l'infirmerie ou au restaurant en général, à cette heure-là, grommela Gladiolus en se dirigeant vers le salon.

Ça sonnait étrangement comme un reproche.

À l'aube de ce mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant