II✔️

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La désagréable impression de glisser dans un cauchemar, se ponctue lorsque je réalise où j'ai atterri...


Ma main rampe sur le sol de feuilles noircies par la nuit, puisant dans mes forces retranchées. Plongé dans cette nuit oppressante, je lève les yeux pour détailler le feuillage de cette forêt que les rayons de la lune filtrent faiblement.


Dans mon inquiétante observation, mes yeux croisent deux billes argentées scintillant dans l'ombre. Je ne peux contenir un mouvement de recul. Prise d'effroi, je rampe dos au sol jusqu'à rencontrer un arbre sur lequel je trouve appui pour me lever. Mes mains, écorchées par la chute, me brûlent lorsqu'elles effleurent l'écorce rigide.


— Nous serons mieux ici.


— Pourquoi fais-tu cela ? dis-je d'une voix rocailleuse pour tenter de gagner du temps.


Une douleur lancinante tenaille effroyablement ma jambe.


Je passe une main sur le lieu de ma plainte, quand je découvre un liquide chaud s'écouler entre mes doigts. Je grimace d'une forte douleur accentuée par la frayeur. Je ne suis pas une spécialiste, mais d'après ma maigre expérience médicale que m'a transmise ma mère, cette plaie est suffisamment profonde pour être prise au sérieux. J'ai dû m'ouvrir la jambe dans ma chute.


L'option de prendre la fuite en tapant un sprint, se raye inéluctablement de la liste. C'est impossible...


La cruauté de mon sort me donne la nausée, amplifiant cette sensation par l'horreur qui me taille la jambe.


— Il le faut.


— Estrella n'aurait jamais voulu cela, dis-je en me maintenant en équilibre sur le tronc d'arbre, la douleur cisaillant ma jambe.


— Je ne te permets pas de prononcer son nom ! Tu ne la connaissais pas !


— C'est vrai. Mais d'après ce qu'on m'a décrit d'elle, elle n'avait rien d'une meurtrière. Elle n'aurait jamais aimé ce que tu es devenu.


— Tais-toi !


— Me tuer ne la ramènera pas.


Il fait deux pas menaçants dans ma direction réduisant la distance de sécurité.


— J'ai juré de faire souffrir tous ceux qui avait attenté à sa vie. Le seul moyen de faire souffrir Klein avant qu'il ne meure, est de te tuer toi la première !


— Tu fais une grosse erreur. Klein ne souffrira pas ! Il n'y a rien entre nous, à vrai dire, on se déteste ! Tu as mal interprété la situation au lycée. Après ça, Klein s'est senti responsable et a voulu me protéger.


— C'est ce qu'il t'a dit ? (son ton me fait frissonner) Ça ne me surprend pas de lui.


Je fronce les sourcils, sceptique.


— Je ne comprends pas.


Il hausse les épaules d'un air amusé.


— Je ne sais pas par quel moyen il a réussi à te cacher la vérité, si ce n'est qu'il a un don pour ça, je dois le reconnaître.


— Quoi ? Comment ça ?


— Il t'a menti.


Je ne respire plus. Mon cœur se glace enveloppé d'un sentiment de trahison.


— Il tient à toi plus qu'il ne le laisse paraître.


Aussitôt, j'ai l'impression qu'une flèche transperce mon cœur. La glace se brise alors, et mon cœur avec.


Comment peut-il affirmer une chose pareille. Depuis le début Klein m'affirme le contraire. Il est allé jusqu'à m'avoir demandé de sortir de sa vie une fois le danger éloigné. D'un autre côté j'avais préféré fermer les yeux sur certains signes...


— D'après le peu que j'ai pu voir de ce qu'il a fait pour toi, tu dois probablement être la personne à qui il s'est le plus attaché depuis que je le connais. C'est ironique quand on y pense. Le sentiment le plus puissant qui puisse exister est celui qui va vous détruire. Un amour empoisonné. Qui plus est, un Ailé avec une Humaine, c'est du jamais-vu.


La gorge nouée, je le fixe qui progresse dans ma direction. Ses yeux brillants de fureur ravivent incontestablement ma peur. Mon estomac se noue, paralysé par mon impuissance.


— Désormais, on va en finir, une bonne fois pour toutes.


Je halète le voyant sortir un poignard dissimulé sous sa veste, pointu d'un côté et enveloppé de cuir de l'autre. L'éclat de la lame tranchante sous le reflet de la lune, rend la scène un peu plus réelle.


Ramené à mon triste sort, je ne peux refréner des sueurs froides me parcourant l'échine. J'oscille entre culpabilité, regret et profonde tristesse pour tous ceux que j'abandonne. Mon moral se fendille davantage, lorsque je songe à mes parents qui ne parviendront pas à se remettre de ma mort.


C'est alors que je sens sous mon pied, ce qui s'assimile le plus à une branche. Une puissante adrénaline se déverse dans chacune de mes cellules, entrevoyant une lueur d'espoir. Je me baisse tant bien que mal pour la ramasser, me procurant une certaine protection. Je ne mourais pas sans me battre.


Il progresse dangereusement, le regard empreint d'une rage profonde. Le cœur battant à tout rompre sous les effets conjugués de la souffrance, de l'émotion et de l'adrénaline, mon instinct de survie prend possession de mon corps. Le mécanisme de mon cerveau s'enclenche automatiquement.


Je resserre ma poigne autour de la branche, puis dans un élan de dernier espoir élance mon bras sur Ezra.


D'un mouvement flou, il place la paume de sa main dans ma trajectoire avec dextérité, pour m'arrêter. À travers cette simple branche, je ressens sa force surhumaine la traverser pour m'envahir.


Je la scrute horrifiée, avant qu'elle ne se brise sous la contraction. Manquant cruellement de ressource, je lâche mon morceau et balance aussitôt mon crochet du droit en ultime recours. Mon poing est dévié avec habileté de son chemin, juste avant qu'une lame aiguisée ne me cisaille le bras. La douleur m'arrache un cri d'effroi.

🦋C É L E S T E 🦋Où les histoires vivent. Découvrez maintenant