🦋C É L E S T E 🦋

II ✔️

Je fais un bond sur la gauche, avant de reconnaître cette voix.

— Nathan ? demandé-je portant une main sur mon cœur affolé.

Son regard miroitant émeraude ne quitte pas le regroupement au loin.

— Viens avec moi.

Il passe une main délicatement sur mon dos, m'invitant à le suivre.

— J'ai reçu un message, qu'est-ce qu'il se passe ?

— Tu vas vite le savoir, mais pour ta sécurité je te demanderais de ne pas t'éloigner du groupe.

— C'est grave ?

— Pour l'instant on l'ignore... À vrai dire, c'est à toi qu'il voulait parler.

Les deux familles se sont regroupées formant comme une barrière contre quelque chose. Ils semblent sur le qui-vive.

— Comment ça il ? Il y a quelqu'un ? Un ailé ?

Je suis Nathan qui me fraie un passage à travers eux.

— Ouais...

Klein se trouve juste devant. Il ne bouge pas. Ses ailes sont déployées avec puissance tel un rempart pour dissuader quiconque de s'approcher.

Il tient dans sa main une longue épée à double tranchant. L'inclinaison de la lame reflète en une teinte orangée les derniers rayons du soleil.

— De qui s'agit-il ?

J'arrive au niveau de Klein, escortée par Nathan. J'ai aussitôt un mouvement recul. Mon dos effleure le croisement entre l'aile de Klein et celle de Nathan.

Je n'arrive pas à y croire.

— Bonjour Blake.

Je fixe cet individu, effrayée.

— Du moins « bonsoir ».

Ma voix meurt dans ma gorge et mon courage avec.

Je me retrouve une nouvelle fois face à Ezra.

***

— Maintenant qu'elle est ici je vais te reposer une dernière fois la question et ne t'avise pas de tergiverser. Car contrairement à d'autres, il n'y a aucune limite qui retient ma patience. Alors : Qu'est-ce que tu veux ? aboie Klein sur la défensive.

Sheila est appuyée contre un arbre en retrait. Sa présence me rassure quelque peu par l'influence qu'elle exerce sur lui.

— Vas-y, dit leur.

Une expression contrite glisse sur le visage d'Ezra. Il baisse les yeux.

— Je ne sais pas si tu pourras me pardonner un jour, mais je tenais à ce que tu saches que je regrette sincèrement ce que je t'ai fait endurer.

Par ce soudain bouleversement, mon regard s'accroche intensément au sien et j'y décèle une pure sincérité. Il a perdu celle qu'il aimait plus que tout. Rongé par le chagrin, il a probablement cru qu'il s'agissait de la meilleure solution. Je songe alors aux paroles du Darkthink qui disait que le passage de la lumière aux ténèbres nécessitait un chemin. Peut-être qu'Ezra n'a jamais emprunté ce chemin, mais était seulement aveuglé par la vengeance que lui infligeait son désarroi. Ce dont j'ignorais à l'évidence, c'est que la transformation amplifiait les désirs obscurs. Ezra n'a pas été épargné...

— Tu es juste venue ici pour présenter tes excuses ?! Après tout ce temps, tu regrettes juste maintenant !

— Klein tu oublie la connexion, intervient Sheila. Une fois liés, les protégés ont un effet de stabilisateur émotionnel sur leurs protecteurs. Il est sincère.

Klein émet un grognement repoussant cette idée.

— Et ce n'est pas le seul but de ma présence, poursuit-il.

Ezra nous considère tour à tour, un profond regret s'imprimant sur son visage.

— Comme vous devez le savoir, mon pouvoir me donne de large capacités sensorielles, plus puissantes que les vôtres. Cependant... j'ai un second don pour lequel je n'ai eu recours que rarement. Je pensais qu'il était anodin et qu'il ne me servirait plus jamais... mais je me trompais. Il s'est éveillé il y a quelques jours en captant une anomalie (il laisse le silence percer entre nous). Et cette anomalie, c'était toi, Blake.

Mes yeux s'ouvrent en grands, telles des soucoupes.

— Comment ça ? demandé-je surprise.

— Mon deuxième pouvoir est de pouvoir lire l'ADN.

Les battements effrénés de mon cœur ne cessent de croître. Ma respiration se fait haletante. Tous mes sens sont en alerte. J'ai peur. Peur d'entendre ce qui va suivre. Simplement, peur... de savoir. Je tends néanmoins l'oreille. Une part de moi ne peut refréner le besoin de cette curiosité qui s'est installé au fil des jours.

Et c'est là...

— Blake. Tu as du sang d'Humain, mais également d'Ailé.

... que tout déraille.

Tout mon monde s'écroule à cette seconde, précise.

Je ferme les yeux pour tenter de refluer les ultimes vestiges de mon état de choc.

Tout semble si sombre et pourtant tout paraît si clair. Au fond de moi je le savais. Beaucoup trop d'indices devaient me mettre la puce à l'oreille, mais j'avais refusé d'y croire. De me l'avouer. Car je savais que plus rien ne serait pareil.

— Tu es une hybride.