Chapitre 15

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Tsuchida referme sa valise d'un coup sec. Elle doit encore faire tellement de choses avant que les concours d'été ne commencent. Elle n'a pas le temps d'y penser. Pour le moment, elle est encore dans ceux de l'hiver, dans le concours Adama, qu'ils ont commencé deux semaines plus tôt. Ce concours qui est d'un niveau trop au dessus de ce à quoi elle s'attendait pour être honnête. Et assise sur son lit, elle hésite. Peut-elle réellement demander son propre niveau de maîtrise aux élèves qui composent son club ? Ce ne serait pas... trop ?

Son téléphone sonne. Aomine est en bas. Elle prend son bagage, son manteau, et descend. Elle prévient son père qu'elle part, et il lui souhaite un bon week-end, la regardant du coin de l'œil. Il ne saurait dire combien de fois il est surpris, mais à chaque fois qu'elle sort quelque part, elle semble plus jolie, plus assurée, aussi.

La voiture envoyée par Akashi garée devant la maison, l'adolescent qui l'a invitée à l'anniversaire l'attend, adossé à l'habitacle. Il lui fait un grand sourire, et elle note qu'il a fait l'effort de mettre une chemise, alors que la réception n'est que le soir. Elle trouve l'attention envers son ami adorable.

Pour Aomine, il est plus qu'évident que la Génération Miracle n'est pas qu'une ancienne équipe. Pas de la manière dont il en parle. C'est une amitié qui durera longtemps, et qui leur permet de garder les pieds sur terre, de penser aux autres, et de se faire secouer quand ils en ont besoin. Tsuchida rêverait d'une amitié comme ça. Elle met sa petite valise noire dans le coffre, et monte dans la voiture avec lui. Ils en on pour quelques heures de trajet, mais le capitaine les héberge deux nuits durant. Ils auront donc le temps de se reposer.

Sa deuxième année de lycée sera passée beaucoup plus vite qu'elle ne l'aurait cru. Et même si elle a une place toute réservée pour l'année suivante dans l'école de ses rêves, elle se demande bien ce qu'elle va pouvoir faire l'année suivante.

- Il faut que je progresse encore. Il faut que mon niveau soit nettement supérieur à celui que j'ai eu pour l'inscription quand j'arriverais.

Aomine la regarde réfléchir en souriant doucement. Ces derniers temps, elle saute d'une idée à l'autre plus vite qu'il n'enchaine les matchs pour la Winter Cup. D'ailleurs, le prochain match est contre Seirin. Il a hâte.

La main fraiche de Tsuchida se glisse dans la sienne, sur le siège passager du milieu, et il sourit de plus belle. Même lorsqu'elle est absorbée dans ses pensées, sa petite musicienne ne cesse de lui accorder au moins assez d'attention pour se rendre compte de ses changements d'humeur. Ça lui fait plaisir.

Quand il s'était inquiété l'autre jour, ils avaient eu le temps de discuter du sujet. Elle lui avait expliqué qu'elle n'avait pas du tout l'habitude de communiquer avec les autres pour régler ses problèmes, et avais promis de faire un effort pour lui en parler. Il ne comprend pas très bien comment on peut être renfermé sur soi à ce point tout en ayant l'air un minimum sociable, mais encore une fois, qu'elle lui en parle et qu'elle lui promette de faire mieux lui a fait plaisir. Le reste n'est peut-être qu'une question de temps.

Le trajet se passe plus vite qu'ils ne l'auraient cru. Ils discutent, chahutent, jouent aux cartes laissées pour eux dans la portière, et lorsqu'ils arrivent, la journée n'est pas trop avancée. Mais Akashi courre déjà partout.

Il n'a pas le temps de les saluer qu'il doit aussitôt gérer un problème de commande, puis de livraison... Tsuchida le regarde faire avec pitié, et gêné de ne pouvoir rien faire, Aomine pense à lui dire de faire une pause dès qu'il le pourra. L'adolescent aux cheveux rouges les remercie d'un sourire tendu, et on les accompagne dans une pièce où sont déjà les autres.

- Wouaw, tu es super jolie en robe ! sourit Momoï en la serrant dans ses bras.

- Tu as fait le trajet toute seule ? s'étonne la jeune fille en se détachant d'elle doucement.

- Oui, j'ai pensé qu'on serait un peu à l'étroit, tous les trois, répond-elle avec un clin d'œil. Mais vous êtes déjà habillés pour ce soir ? s'étonne-t-elle ensuite, en les regardant avec un peu plus d'attention.

Ce soir, ce n'est pas l'anniversaire en grande pompe, mais le petit, avec les amis très proches, et seulement les amis. Même le patriarche Akashi ne sera pas là ce soir.

Tsuchida secoue la tête.

- Non, du tout. Pourquoi ?

- Je n'avais pas vu Aominechi en chemise depuis un bout ! sourit Kise, lui aussi en chemise.

- 'fallait mieux être bien habillé, pour venir ici, répond-il d'un haussement d'épaules.

- Je comprends. C'est le manoir Akashi, après tout.

L'intervention sobre de Midorima leur fait hocher la tête en silence, et finalement, la porte s'ouvre avec fracas.

- Excuses-moi, Tsuchida, tu as déjà aidé un petit orchestre à répéter ? demande Akashi, les cheveux ébouriffés par la course.

- Tout dépend de ce que je dois faire exactement...

- Mon chef d'orchestre des dans les bouchons, il aura au moins trois heures de retard, s'il peut prendre le prochain vol, si tu peux aider, je peux t'embaucher ?

Elle hoche prudemment la tête et il soupire de soulagement.

- Alors suis-moi.

Elle essuie ses mains moites sur les plis de sa robe et le suit à grandes enjambées. Après tout, elle a déjà fait ce genre de choses, avec l'orchestre qui a joué le morceau pour Iwabuchi, ça ne doit pas être différent. Ou du moins, c'est ce qu'elle se dit avant d'entendre la cacophonie sortir de la salle de répétition.

- Ils jouent de quel instrument... ?

Sa question n'a pas le temps de trouver sa réponse qu'elle peut voir les instruments. Elle ouvre de grands yeux émerveillés.

- Du koto, souffle-t-elle ravie.

Elle sourit sans s'en rendre compte. Elle n'en n'a jamais joué, et n'y connait pas grand-chose. Elle ne sait même pas comment se joue cet instrument à cordes traditionnel, mais elle a cette irrépressible besoin d'en toucher un.

- Ils sont magnifiques.

- Je vous présente Tsuchida. C'est une musicienne de talent qui a l'habitude de travailler avec des groupes de musique. Elle fera tout ce qu'elle peut pour vous aider, j'espère que ce sera suffisant.

Elle s'incline doucement, et est soulagée de constater que personne ne la regarde d'un œil mauvais. L'adolescente ne peut pourtant pas s'empêcher de dire :

- Je suis désolée, je ne sais pas du tout comment on joue du koto, ni comment se lisent les partitions, mais j'espère pouvoir tout de même être utile.

Les regards amicaux vacillent, et elle s'agenouille devant celle qui semble diriger le groupe. Le koto est un instrument long et plat, posé à même le sol, sur lequel des cordes sont surélevées, et réglées par des petites cales, qui peuvent changer de place au fil du morceau pour changer d'accord. S'installer devant la personne la plus expérimenté lui semble être la meilleure idée pour apprendre, et elle n'a pas besoin d'en savoir plus sur l'instrument pour savoir de qui il s'agit.

- Pourriez-vous me montrer quelle est votre voix dans cette partition ? demande-t-elle à la femme en face d'elle.

Les sourcils haussés, elle s'exécute, et soudain, Tsuchida découvre un nouveau pan de la musique.

Les larmes en gouttes de pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant