Chapitre 80

68 6 0
                                    

Aomine la regarde tourner dans tous les sens dans l'appartement. Ils ne sont pas rentrés depuis trois jours qu'elle s'est empressée de terminer son devoir, qu'elle doit présenter en fin de semaine. Et à présent, ce sont ses bagages, qu'elle prépare.

- Tu es sûr que je peux l'emmener ? demande-t-elle encore une fois.

Il tient fermement la couverture sur l'instrument noir, le temps qu'elle mette de l'adhésif par-dessus.

- Je te l'ai acheté. Il est à toi. Et il te sera certainement plus utile chez toi qu'ici.

Elle a remarqué que le piano faisait à présent partie intégrante de l'endroit. Un peu comme elle. Et partir lui lance une douleur à la poitrine qu'elle s'efforce d'ignorer. Elle n'a pas le temps pour ça. Il y a encore trop de choses à emballer, et la route sera longue, puisqu'elle va partir en train, et attendre le piano chez elle toute l'après-midi.

- Merci encore, Dai.

Il se redresse, un peu surpris, et détourne les yeux, gêné d'avoir été vu en train de fixer les parties encore nues de l'instrument. Elle termine d'attacher le tout, et se relève, les mains sur les cuisses.

- Eh bien, ça n'aura pas été une mince affaire, mais on a terminé.

Ce n'est pas la dernière chose qui est finalement prête à partir. Mais elle ne pouvait plus faire tous les coins de l'appartement d'Aomine en passant devant. C'était... contradictoire, de ne pas s'arrêter pour lui, et de se forcer à penser à autre chose. Maintenant, elle va pouvoir se concentrer sur ce qu'elle a à faire.

Elle s'approche néanmoins de lui, et dans un réflexe qu'il pensait avoir perdu pendant la convalescence de Tsuchida, il lui ouvre le bras, pour la laisser se lover contre lui. Ce n'est pas comme toutes ces fois où elle s'est posée sur lui douloureusement, par manque de contact, cette fois, elle colle son corps sur le sien, et enroule ses bras autour de lui. L'étudiant comprend alors que c'est ça qui lui avait manqué.

Il resserre sa prise, et elle soupire dans son cou. Il frissonne, et attrape son col pour le déplacer, embrassant soudainement son épaule. Elle soupire encore une fois, de soulagement, et d'envie, et il poursuit, baiser après baiser, sur parcelle après parcelle, jusqu'à ce qu'il ne fasse trop chaud pour être habillés de toute façon, et que le morceau de tissu bleu marine qu'elle portait se retrouve par terre.

Tsuchida s'accroche à lui pour l'embrasser, et il poursuit sa redécouverte de son corps, qu'il n'a pas osé toucher depuis si longtemps. Elle tire elle-même sur ses vêtements pour lui faire enlever, et ils peuvent enfin sentir la peau l'un de l'autre en s'appuyant torse contre poitrine, les mains dans les cheveux, dans sur les hanches, les omoplates, les trapèzes, les clavicules, le ventre, les reins...

S'il y avait encore un canapé, ils se seraient laissés tomber dessus, mais à la place, il n'y plus qu'un vide, et cette vielle couverture en trop qui aurait dû servir à protéger le piano du transport. Elle les protège eux, à la place, amortissant le choc assez brutal de leur allongement, précipité, fiévreux.

La profondeur de leur échange débloque une idée dans la tête du basketteur qu'il n'avait pas eue avant. Ou plutôt, qu'il reconnait un instant plus tard avoir occulté. Lorsqu'il est arrivé chez elle, ce jour là, et qu'il l'a vue lui ouvrir la porte avec cet œil au beurre noir, et ce visage enflé, il s'était dit qu'il n'avait pas été là pour elle. Et il s'était efforcé d'enfouir sa colère noire, pour prendre soin d'elle, parce qu'il avait ce sentiment qu'elle l'aurait fait repartir, s'il avait voulut s'en mêler.

Se faire chasser de chez elle lui aurait été insupportable, et il grogne de frustration. Il a pourtant été si inquiet et contrarié qu'il aurait retourné toute l'école pour trouver la coupable, s'il avait pu. Il la regarde une seconde, se demandant si elle a la moindre idée du contrôle qu'elle est capable d'exercer sur lui, et ne résiste pas à l'envie de l'embrasser, encore et encore.

- Dai... Daiki.

Il se redresse, surpris.

Le ton qu'elle a employé lui fait remarquer qu'elle l'a appelé plusieurs fois, sûrement déjà. Mais qu'il n'avait pas réalisé. La peau de son cou lui avait fait oublié qu'il était entrain de penser à quelque chose, en même temps qu'il était en train de passer du temps avec elle. Il lorgne d'ailleurs ce cou en songeant que c'est ridicule, avant de comprendre pourquoi elle l'a interpelé.

- Désolé, j'ai pas capté...

La trace rouge vif qu'il a laissé sur sa peau a dû lui faire mal, mais elle attrape sa nuque pour le tirer à elle, et l'embrasser de plus belle. Son geste n'était pas pour arrêter leur activité, mais pour le faire changer d'objectif, parce que sa peau commence à la tirer. Ce n'est que lorsqu'elle manque de lui mordre la lèvre qu'il comprend qu'elle aussi a un peu de mal à s'y remettre, en dépit de toute l'envie qu'elle a de faire l'amour avec lui.

Il en rit, et la serre contre lui, l'étreignant de façon à les interrompre une seconde.

Elle se laisse faire de bonne grâce, et plus lentement, ils reprennent là où ils en étaient.

- Je crois que c'est ce que je préfère faire avec toi, soupire-t-il en finissant de se déshabiller. Te serrer dans mes bras.

Elle pouffe.

- Seulement ça ? Tu n'en demandes pas beaucoup.

Il réplique, railleur :

- Mais c'est ce qu'on fait le plus : une partie de jambes en l'air est suivie d'un câlin, nos retrouvailles commencent par ça, et nos moments de tendresse s'illustrent par ça. Quand on se dispute, on se réconcilie comme ça. Quand on s'encourage, on se serre la main, ou le bras, la taille. J'aime te serrer contre moi.

Elle le dévisage, amusée, et d'humeur soudainement plus légère.

- Oui, je vois ce que tu veux dire. Je crois que j'aime ça aussi. Sauf que ce que je préfère faire avec toi, c'est te voir sourire.

Il approche sa main de sa bouche et dépose un baiser dans le creux de sa paume, songeur.

- Mon sourire te plait à ce point ?

- Arrête, tu sais que tu es beau, pas la peine de faire cette tête là.

Il rit.

- Je ne pensais pas que tu étais aussi superficielle.

- Je ne le suis pas, réplique-t-elle. Tu ne souris pas aux autres de cette façon. Juste à moi. C'est ce que j'aime. Que tu me réserve tes sourires les plus sincères. Les plus beaux, comme les plus tristes, ou les plus gênés.

Alors qu'ils s'étaient assis, il la tire vers lui pour la faire s'allonger, et roule sur elle, provocateur :

- Mais ce n'est pas ces sourires là, que tu aimes le plus, avoue.

Elle pince les lèvres, outrée.

- Je ne le dirais pas.

- Si, dis-le.

- Nan.

- Allez. Tu préfère celui que je fais quand...

Elle l'enferme dans ses jambes pour le faire plier vers elle, et déséquilibré, il tombe vers l'avant.

- A choisir encore, je préfère que tu te taises, et que tu le fasses.

D'abord figé, il sourit.

- Ouais, c'est celui-là que je préfère. Ce sourire de vainqueur qui n'est pas tout à fait sûr d'avoir gagné. Embrasse-moi encore.

- Oui, m'dame.


Les larmes en gouttes de pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant