Plus que les Étoiles

55 : L'encre de tes yeux

Lucien n'avait pas dormi depuis presque quarante-huit heures.

Ce n'était pas à cause de la télévision, mais parce que son cerveau était en ébullition la plus totale.

Il commençait vraiment à sentir que la cigarette lui manquait, ça devait environ faire deux semaines qu'il était ici.

Lucien se sentait complètement nul et stupide de ne pas avoir pensé à compter ses cycles de sommeil. Mais il se doutait que ça n'aurait pas changé grand-chose puisqu'il n'était même pas sûr d'avoir dormi déjà plus de cinq heures à la suite. Il aurait forcément fini par être perdu à un moment donné.

La fatigue, la faim et le manque de cigarette le rendait complètement dingue. Sa propre odeur devenait insupportable à certains moments.

Sans compter qu'avant de voir Noé à la télévision, Lucien était terriblement inquiet à l'idée qu'il lui soit arrivé quelque chose.

Même s'il avait enfin pu entendre la date du jour à la télévision grâce à un présentateur, il avait fini par oublier quand est-ce qu'il avait été enfermé à cause de toutes ses pensées.

Le blond était constamment sur ses gardes, il se doutait bien que son patron allait bien finir par revenir, et il savait très bien qu'il n'allait pas s'en tirer si facilement.

Lucien connaissait les méthodes de son patron. Avec lui, il serait probablement confronté à un dilemme impossible qui impliquerait Noé d'une manière ou d'une autre, pour sa propre survie. Ou alors, le patron allait le torturer puis le tuer pour qu'il décède comme un chien errant, seul.

C'était très probable que ça se passe ainsi. En effet, le dilemme était avantageux pour tout le monde, du point de vue du patron évidemment. De cette manière, Lucien serait vivant et puni, sans compter que ça éviterait au patron de devoir trouver une autre personne que Lucien pour le remplacer, car le blond était très doué.

Lucien avait établi des relations importantes avec des bons clients, il était intransigeant et savait bien recruter ses hommes. Grâce à lui, plusieurs de ses hommes avaient pu monter dans la hiérarchie de leur organisation.

Lucien et ses camarades qui occupaient la même position que lui faisaient ce qu'il voulait avec leur équipe. Libre à eux de les virer, les maltraiter ou de les recommander à une personne qui pourra tirer profit des qualités d'une personne.

En attendant, même en ayant conscience de ses capacités, ça n'aidait pas Lucien à s'en sortir. Il en était même venu à se dire qu'il était remplaçable.

C'était un sentiment qui l'avait quitté depuis des années, depuis qu'il avait été recueilli, il ne pensait pas pouvoir le ressentir de nouveau.

Il savait très bien que personne ne tenait à lui, qu'il n'était pas libre et qu'il jouait un rôle pour le compte du patron, mais au moins, il était utile. Lucien s'était toujours raccroché au fait qu'il servait à quelque chose dans ce monde pour survivre.

Et jusqu'à peu, ça lui allait.

Or, on dirait bien qu'ils s'en sortaient tous très bien sans lui désormais. Cette fois-ci, il était complètement seul et isolé.

À force d'être enfermé, il arrivait même à penser que Noé l'avait oublié, ou qu'il ne préparait pas vraiment quelque chose pour le sortir d'ici.

Lucien avait bien reçu son message à la télévision l'autre jour, toutefois, il avait fini par se demander s'il n'allait pas le vendre à la police pour se débarrasser de lui...

Peu-importe finalement, se disait Lucien. Parce qu'il avait choisi Noé, il l'avait choisi lui, au détriment de la vie assez confortable qu'on lui avait offerte. Celle qui lui convenait il y a un moment, celle à laquelle il avait fini par s'accommoder.