Mon soldat [Terminée]

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Il n'avait prévenu que sa mère qu'il allait rentrer, mais pipelette comme elle est, elle a dû le dire à toute la famille.

- Allez, viens là frangin ! s'exclame son grand frère Khalid en s'appuyant sur ses béquilles pour le rejoindre, et lui ébouriffer les cheveux. Tu m'as manqué petit frère !

- Tu m'as aussi manqué Khalid.

Khalid, qui a vingt trois ans, était un militaire comme son petit frère. C'est lui qui l'a encouragé à rejoindre l'armée. Si Noham a réussi à s'en sortir indemne, ça n'a malheureusement pas été le cas pour Khalid, qui a perdu l'usage de ses jambes lors d'une mission à l'étranger.

Charifa était tellement bouleversée que ses fils ont dût quitter l'armée de terre pour de bon. De toute manière, Khalid était devenu invalide, et n'avait plus goût à être un soldat. Noham au contraire n'a jamais réussi à se résoudre à changer de travail.

Il vivait pour combattre, pour défendre. Vu qu'il ne voulait pas effrayer sa mère, il pensait qu'être garde du corps serait un bon compromis, mais il comprend aujourd'hui que c'était une belle erreur d'y croire. Tout ce que son ancien travail à Avinnet lui a apporté, ce sont des faux espoirs, et un monceau de problèmes.

- Il paraît que tu t'es fait renvoyer ?

Noham fait volteface et découvre Ilyes, son grand frère de vingt-sept ans. L'ainé est le seul fils des El Fassi à avoir pris un chemin plus stable dans le monde professionnel. Depuis deux ans maintenant, il est ingénieur. Et il s'est marié il y a quelques mois, si bien qu'il a sa propre maison. Il ressemble comme deux gouttes d'eau à leur mère, mais a les mêmes yeux ronds que leur père Mohamed.

- Maman n'a pas sa langue dans sa poche on dirait, ricane Noham. Oui, je me suis fait licencier. Le patron m'as dit qu'il n'avait plus besoin de moi.

- Voilà qui bizarre pour un contrat à durée indéterminé, commente Ilyes en appuyant sur le pont de ses lunettes. T'as pas essayé d'insister pour qu'il te garde ?

- Non pas la peine, ce travail commençait à m'ennuyer. Je suis content de rentrer à la maison.

Il ne ment pas sur sa dernière phrase, seulement sur la première. À l'entendre, Noham est heureux de s'être fait virer. Alors qu'en réalité, c'est plutôt le contraire. Certes il n'était pas le meilleur garde du corps, mais au moins, il était avec Alicia.

Ça fait seulement une journée qu'il est parti qu'elle lui manque déjà.

Oublie-la.

- Ça tu l'as dit ! s'exclame Khalid en souriant. T'es bien mieux à la maison que dans la baraque de cette gosse de riche.

- Oui c'est clair, ajoute Ilyes en croisant ses bras. Et puis je suis sûr que Noham trouvera bientôt un nouveau travail, à Barault.

Noham est sur le point de répondre, mais un grincement l'interrompt. Il s'agit de leur père qui descend des escaliers. Il pose un pied sur le parquet du petit salon, et aussitôt qu'il lève la tête en direction de son fils, ses yeux s'écarquillent.

- Fiston, s'exclame-t-il en allant enlacer Noham. Tu es rentré !

- Salut papa, répond-il en acceptant son étreinte.

Mohamed est un homme de haute stature, aux épaules larges et puissantes. Si sa silhouette est assez intimidante, ses yeux, en revanche, reflètent l'océan sans fin d'amour et de bienveillance qu'il a à donner à sa famille.

- Tu n'es pas en mission ? s'étonne Noham. C'est rare que tu sois à la maison.

- Je voulais être présent pour le retour de mon fils, s'exclame joyeusement son père en lui ébouriffant les cheveux.

Engagé dans l'armée de terre depuis près d'une vingtaine d'années maintenant, il a réussi à devenir caporal-chef. C'est lui qui a inspiré Khalid et Noham à rejoindre les rangs de l'armée. Mohamed a toujours été un modèle pour le benjamin de la famille, qui a toujours admiré son courage et sa dévotion pour le bien du pays. Même si la plupart du temps, il était toujours absent ...

- Pourquoi tout le monde se comporte comme si j'étais parti faire la guerre ?

- Partir à l'autre bout du pays, c'est quand même quelque chose, rigole son père en posant ses mains sur ses épaules. Surtout que tu es très jeune.

- Mais j'ai dix-neuf ans papa ...

- Dix-neuf ans et toutes ses dents, commente Ilyes en souriant.

Noham pousse un soupir en subissant les taquineries de ses frères. Lorsque sa mère revient dans le salon, elle parvient à les écarter de lui.

- Laissez-le tranquille les garçons, il revient d'un long voyage. Arrêtez de l'embêter.

- Oh, le petit garçon à sa maman ! se moque Khalid.

- Tu entends ce qu'ils sont en train de me dire ? s'indigne Noham.

- Ignore-les un peu Noham. Venez, il est l'heure de diner.