CHEVEU DANS LA SOUPE.

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      Pour la première fois de sa vie, elle se hasardait à communiquer tous ses numéros, même privés, à un homme qui hier encore constituait pour elle l'ennemi numéro 1.

      Étonnée par son attitude, elle se concentrait sur ses chiffres qu'elle couchait sur un papier de très bonne qualité et dénotant un très bon goût.
Elle entendit alors une voix s'arrêter à leur niveau et  heller Alexander.

      Uniquement.

    - Bonsoir, Alexander. Comment vas-tu?

   - Bonsoir, mademoiselle Lola.
  
   - Je suis avec mon frère. Il rentre de Paris. Nous allons dîner avec des amis. Si tu veux te joindre à nous....

   - Non, merci. Nous avons déjà dîné. Nous allons bientôt partir, répondit Alexander tout en insistant sur le "nous" car pendant leur bref échange, à aucun moment, Lola n'avait cherché à inclure Alexia. Son ignorance délibérée était d'une insolence rare.

    Mais, comme il commençait à mieux connaître Alexia, il comprit que la jeune fille avait fait exprès de garder les yeux baissés sur la carte dans le but de signifier à l'impudente qu'elle ne méritait pas un regard de sa part.

    - Alors, peut-être, pourrait-on se voir demain...

    A cet instant, Lola fut interrompue par son frère qui arrivait accompagné d'un couple. N'ayant pas encore remarqué avec qui parlait sa soeur, il se tourna vers le serveur :

    - Montrez notre table à mes amis, s'il vous plaît. J'arrive tout de suite.

    Puis, arrivé à la hauteur de sa soeur qui l'empêchait de voir ses interlocuteurs, il lui dit :

    - Lola, que se passe-t-il?

    Quand il eut découvert les deux personnes, il s'écria:

   - Mademoiselle Alexia! Quelle surprise! Je suis si heureux de vous retrouver. Enfin!

    Devant l'arrivée en fanfare de l'inconnu, Alexia daigna, enfin, lever les yeux et se trouva devant un jeune homme âgé de la trentaine, sinon un peu plus, de haute taille, brun, avec des cheveux noirs et un beau visage avec une bouche généreuse. Le visage ne lui disait rien car elle avait une bonne mémoire et n'oubliait jamais un visage rencontré auparavant.

    - Pardon, monsieur. Mais, j'ai du mal à donner un nom à votre visage.

    - C'est normal! Vous ne m'avez jamais rencontré, mais vous m'avez sauvé la vie! Oui  vraiment, sauvé la vie! Ça s'est passé l'année dernière, en Italie, à Rome. Vous avez averti mes hommes du sabotage de ma voiture. Sans vous, à l'heure qu'il est, je serais bel et bien mort et enterré. J'ai essayé de vous retrouver; mais vous étiez déjà partie. Je vous voyais souvent à l'hôtel et je savais que vous étiez Responsable du Service  Contrôle. Malheureusement, l'occasion ne s'est jamais présentée pour que je fasse votre connaissance. Je tiens à vous exprimer toute ma gratitude, mademoiselle Alexia.

     Et joignant le geste à la parole, il lui tendit la main et lorsque Alexia lui tendit la sienne, il la lui baisa respectueusement ; puis en se relevant, il lui dit:

    - Permettez-moi de me présenter: Enzo Armani, homme d'affaires.

    - Enchantée, monsieur et ravie d'avoir pu vous être utile.
   
    - J'espère, mademoiselle, que j'aurai l'opportunité de vous remercier de façon plus tangible, très bientôt !

    Et se tournant vers Alexander :

    - Bonsoir, Alexander. Content de vous rencontrer. Comment allez-vous?

    - Bonsoir, Enzo. Heureux de vous revoir, moi aussi. Ça fait un bail! répondit Alexander en échangeant une poignée de mains avec le dénommé Enzo.

    Se tournant vers Alexia de nouveau, le nouvel arrivant, lui tendit sa carte :

    - Mademoiselle, voici ma carte. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, à n'importe quelle heure, du jour ou de la nuit, n'hésitez pas à m'appeler.

    Après avoir pris la carte, Alexia répliqua:

    - Je ne le pense point; mais, merci pour votre sollicitude. Bon appétit, monsieur et bonne soirée. Il est temps pour moi de m'éclipser. La journée a été longue.

   - Au plaisir de vous revoir. A bientôt, Alexander.

    Ayant salué les deux jeunes gens, Enzo entraîna sa soeur, pratiquement de force, car elle s'enracinait. Avant qu'ils n'aient eu le temps de vraiment s'éloigner, Lola, furieuse contre l'intérêt manifeste de son frère à l'égard d'Alexia, lui asséna :

    - T'avais vraiment besoin de te montrer aussi accro?  Tu crois que ses cheveux et ses yeux sont des vrais?

    - Lola! Quand apprendras-tu à parler correctement ? Et je ne te permets pas de dire un seul mot de travers au sujet de mademoiselle Alexia. Si tu continues...

    Le reste des propos d'Enzo se perdit à cause de la distance.

    Lorsque Alexia fit mine de se lever, Alexander se hâta de l'aider. Avant cela, il avait pris la précaution de placer sa carte contenant maintenant les numéros d'Alexia dans son portefeuilles. Bien en sécurité. Une fois tous les deux debout, monsieur Caldwell vint les escorter jusqu'à la sortie. Aussitôt l'un des gardes d'Alexia amena la Ferrari,puis se mit en retrait pour attendre que la demoiselle veuille bien prendre place, derrière le volant.

   - Belle voiture! fit remarquer Alexander. Fan des voitures de sport?

   - Oui. Beaucoup même si je ne conduis pas toujours. Quand je travaille, j'ai un chauffeur et je me déplace beaucoup plus en hélicoptère. Sur ce, je vous dis au revoir, monsieur Goodmayer.

   - Je vous en prie, appelez-moi Alexander.

   - D'accord. Alors, au revoir Alexander et bon séjour à Santa Barbara.
   Et sur ces voeux, elle démarra suivie par le 4×4, laissant derrière elle Alexander qui attendait que Paul et le chauffeur viennent avec la voiture; un Alexander consterné, et même dépité, car s'étant attendu à la même politesse de la part d'Alexia.

    Il avait cru, un moment, que les barrières, entre eux deux, avaient été abolies. Ne venaient-ils pas de passer un moment très convivial, magique même ? Mais, avec elle, c'était toujours le chaud et le froid. La douche écossaise ! A chaque fois, il fallait revenir à la case-départ! Etait-ce à cause d'Enzo? Non! C'était ridicule! Alexia ne le connaissait guère et avait adopté une attitude - il fallait le reconnaître - polie à son égard, mais froide et distante. Avec lui, Alexander, elle s'était montrée beaucoup plus amicale, plus ouverte au dialogue.

    D' ailleurs, elle avait concédé de lui donner tous ses numéros de téléphone. Alors, de quoi se plaignait-il?

    Soudain, le coeur très léger, il commença à siffloter chose qui ne lui était jamais arrivée. Il voyait Paul, dans le rétroviseur, qui le regardait, intrigué, avec des yeux prêts à lui sortir des orbites. Il n'en avait cure!

    Il se sentait tellement heureux! Il ne savait pas ce qu'il attendait de sa relation avec Alexia. Cependant, il était sûr d'une chose: il ne voulait pas la voir sortir de sa vie. Il désirait qu'elle en fasse partie intégrante.

    UNE PREMIÈRE!

POUR L'AMOUR D'ELLE. (TERMINÉE). Où les histoires vivent. Découvrez maintenant