Alexander avait été sous le choc à l'annonce du malaise de son père. Pour lui, ce dernier était une force de la nature. En fait, il ne l'avait jamais vu se plaindre, garder le lit ou aller voir un médecin. Il avait toujours eu une santé de fer. Il est vrai qu'il se plaignait de la vie, de ses vicissitudes, de son ingratitude à lui rendre en argent ses efforts continuels...; mais, jamais il ne s'était plaint d'un mal physique. Malgré son handicap mental, actuel, provoqué par la maladie de "l'oubli", son état demeurait presque le même. Mais, le voir étendu, presque mort, avec une multitude de tubes et de machines auxquels il était raccordé le remuait. Profondément.
Jamais il n'avait pu pardonner aux siens et pourtant, jamais il n'avait pu se résoudre à leur tourner le dos.
Complètement et définitivement.
Il avait du mal à pardonner à son père son rejet et à sa mère son mutisme. Pour lui, une mère devait, avant tout, protéger ses enfants, la chair de sa chair. Or, la sienne avait préféré renier son fils et choisir son bon à rien de mari. Sans lui et son aide, ils se seraient retrouvés à la rue ou dans un auspice pour vieux.
Vindicatif et intolérant, William Goodmayer avait poussé ses enfants à le détester et à le fuir.
Devant le corps inerte de son père, Alexander se demandait ce qu'il ressentirait si jamais il venait à décéder.
Le pleurerait-il ?
Eprouverait-il de la peine?
Ressentirait-il ce vide qu'il avait éprouvé devant le cadavre d'Alexia, inanimé, privé de toute trace de vie ?
Etait-il normal de se sentir plus proche d'une parfaite étrangère plutôt que de son père?
Quand le médecin ressortit, Alexander comprit à sa mine que les nouvelles allaient le déprimer encore davantage.
- Comment va-t-il, docteur? l'interrogea-t-il.
- Aucune amélioration n'est perceptible. Son coeur a repris sa fonction, mais il est toujours dans le coma.
- Cela risque-t-il de se prolonger?
- Nous espérons que d'ici quelques heures, il pourra reprendre conscience.
- Sinon?
- Restons positifs, monsieur Goodmayer. Vous devriez aller vous reposer. Vous reviendrez demain matin. Vous devriez aussi prévenir votre famille. On a toujours besoin du soutien des siens dans de pareils moments. Si quelque incident survenait, une infirmière vous préviendrait. Veuillez seulement laisser votre numéro de téléphone à l'accueil.
- D'accord, docteur. Merci pour tout. Au revoir.
Le lendemain matin, à 9 heures, William Goodmayer n'avait toujours pas repris connaissance. Pourtant, sur le plan physique, aucune séquelle n'était détectée suite à son arrêt.
Les médecins discutèrent alors de l'option d'un refus cérébral de se réveiller, de revenir à la vie de crainte de retrouver ce que l'on craint le plus. Ils pensaient que le patient refusait de se rattacher à la vie et ainsi son cerveau commandait à son corps de garder son inertie.
Le chef en cardiologie, un ami du directeur de la clinique à Santa Barbara, fut contacté par le directeur en question et par monsieur Loan Rasmussen, en personne, et prié de ne lésiner devant aucun moyen pour aider les Goodmayer. C'est pourquoi lorsque ce matin-là, Alexander revint à la clinique, le cardiologue demanda à le voir, dans son bureau. S'excusant d'abord de devoir se montrer indiscret, sinon direct, il voulait savoir si William avait des tracas, des différends, avec les membres de sa famille. Puis, devant la réponse affirmative de son interlocuteur, il lui conseilla, enfin, de tenter de passer outre ces différends car il était fort probable que le père avait besoin du pardon filial pour trouver la force de se pardonner et d'accepter de retourner à la vie.
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POUR L'AMOUR D'ELLE. (TERMINÉE).
RomanceUne jeune fille de la haute société qui mène une double vie après avoir échappé à une mort certaine. Belle, compétente dans son travail, elle avance dans la vie en faisant fi des soucis tant physiques que professionnels. Focalisée, d'abord sur sa su...