Chapitre 37 - Lucile

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Le 08 août 2022, Montpellier

     Le haut de ma robe est trempé, gorgé d'un soda qui colle légèrement. Je me relève en croisant mes bras devant moi pour éviter que tout le monde puisse voir à travers le tissu, râle après mon frère et me dépêche de rejoindre les toilettes.
     Merde, qu'est-ce que je vais faire ? Prenant une serviette dans le distributeur, je frotte autant que possible la tâche d'humidité qui dévoile tout mon buste, y compris mon soutien-gorge.
     Je ne peux pas rester ici jusqu'à ce que ça finisse par sécher seul, mais rejoindre notre groupe dans cet état...

     La porte qui s'ouvre dans mon dos me fait sursauter, et je me retourne vivement pour me retrouver... face à Tadhg. Qui se rince bien l'œil, un sourcil arqué, un sourire aux coins des lèvres. Je m'empresse de remettre mes bras pour cacher la misère, et m'écrie :
     — Non mais t'es sérieux ? T'es dans les toilettes des filles, là !
     Il cligne plusieurs fois des yeux, comme pour revenir à l'instant présent, et me tend un gilet.
     — J'avais ça dans mon sac, c'est propre. Enfile-le, parce qu'il est hors de question que tu sortes comme ça, prévient-il d'un ton sérieux.
     — Ça va, c'est juste un peu transparent... marmonné-je en lui prenant le vêtement des mains, avant de l'enfiler rapidement.
     — Tu n'as absolument aucune idée de l'effet que ça peut avoir sur les hommes, Lucile.
     Il affirme cela d'une voix tranchante, son accent plus marqué que d'habitude, et c'est incroyablement sexy. Parce que j'ai décidé de rentrer dans ce petit jeu, finalement, je fais un pas vers lui et constate seulement maintenant qu'il contracte la mâchoire, les poings serrés le long de son corps.
     — Sur les hommes, ou sur toi ? susurré-je, le ton séduisant que je viens d'employer me surprenant moi-même.
     Sa pomme d'Adam monte et descend sous la fine peau de sa gorge, ses iris brûlent d'une lueur de désir lorsqu'il les baisse sur moi, sa voix n'est qu'un souffle lorsqu'il gronde :
     — Arrête ça, parce que je te jure que je me retiens de te sauter dessus, là.
     — Tu voulais qu'on joue, non ? T'as pas précisé les règles, Tadhg, laisse-moi dicter les miennes : il ne se passera rien tant qu'on n'aura pas discuté réellement, tous les deux. Si je dois un jour te confier mon cœur, il faut d'abord que tu saches à quel point il a été brisé, avoué-je.
     Un voile de surprise traverse son regard, pourtant il semble se détendre un peu.
     — Vendredi prochain, toi et moi. T'as raison, on a beaucoup de choses à se dire, et je refuse de te forcer à faire quelque chose que tu ne voudrais pas, ou pour lequel tu n'es pas encore prête.
     Un échange de sourires, et je perçois toute sa sincérité dans ces mots. J'ai accepté de rentrer dans son jeu, mais ça ne veut pas dire pour autant que j'accepte de lui faire une place dans mon cœur. D'abord, il va falloir qu'il me démontre encore et encore qu'il en vaut la peine, qu'il n'est pas comme Damien, qu'il ne me forcera jamais à coucher avec lui, ou à faire quoi que ce soit.

**

     Nous avons fini par rejoindre le reste de ma famille, qui nous attendait pour continuer le jeu. Grâce à Tadhg, et au strike que j'ai réussi à faire, notre trio a gagné, et après être allé manger dans un fast-food non loin, nous nous sommes tous séparés pour rentrer.
     Il est vingt-et-une heures lorsque je mets enfin Sakura au lit, qui s'endort en à peine cinq minutes, au milieu d'une dizaine de peluches. Je caresse ses cheveux, dépose un dernier bisou sur son front et ferme doucement la porte de sa chambre avant de rejoindre la salle de bains. Je prends une douche rapide, lance une machine pour laver le gilet que Tadhg m'a prêté, son odeur ayant déjà imprégné mes narines.
     En revenant dans le salon, je consulte mon téléphone et découvre trois messages non lus, tous venant de lui.

>Tadhg, reçu à 21h12 : J'ai passé une très bonne soirée, merci beaucoup pour l'invitation (ou devrais-je dire Merci Sakura, plutôt ?).

>Tadhg, reçu à 21h15 : Tu peux garder le gilet, je n'en ai pas besoin. Avoue, c'est le rêve de toutes les femmes, de se voir offrir une fringue portée par un homme terriblement sexy et séduisant.

>Tadhg, reçu à 21h19 : Et n'oublies pas de demander à tes parents de garder Sakura pour la soirée, vendredi prochain, le 19 (oui, j'étais sérieux : je veux vraiment apprendre à te connaître, toi, en tant que femme, parce que je t'assure que je ne comptes pas reproduire les mêmes erreurs que ton ex. J'ai déjà hâte de tout savoir sur toi, joli cœur).

     Je glousse, me laisse tomber en arrière contre le clic-clac qui me sert de lit, mon téléphone posé sur mon ventre. Je n'ai pas été draguée par un homme depuis mes dix-sept ans, et je dois dire que ça fait plus que du bien, de se sentir vraiment désirée. Ça fait plus de trois ans que Tadhg est entré dans notre vie, je dois avouer qu'une part de moi espérait secrètement qu'il devienne mon allié, mais ça va au-delà de mes espérances, désormais : il pourrait devenir bien plus que cela. Suis-je prête à tout ça ?
     Oui. Mille fois oui.

>Moi, envoyé à 21h30 : Déjà accro alors qu'on vient à peine de commencer la phase « drague » ? J'ai le droit de dire que je marque un autre point, ou ton ego en prendrait un coup ?

>Tadhg, reçu à 21h32 : Je t'accorde le point, mais je compte quand même remporter la victoire. Et pour répondre à ta question : il me semble que c'est toi, qui a commencé ce manège entre nous, non ? D'ailleurs, je ne te croyais pas si entreprenante, petite cachottière... Ta jumelle maléfique aurait-elle pris la place de la timide Lucile que tu as été durant trois ans ?

>Moi, envoyé à 21h34 : Excuse-moi, lequel d'entre nous a envoyé un message à l'autre pour lui annoncer que la guerre avait commencé, déjà ? Ne me fais pas regretter tout ça, Tadhg, c'est tout ce que je te demande. Sinon, c'est la Lucile prête à tuer tout le monde que tu auras en face de toi.

>Tadhg, reçu à 21h37 : Tu ne regretteras pas, joli cœur, c'est promis.

Et les mistrals gagnants...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant