Chapitre 54 - Tadhg

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Le 11 septembre 2022, Montpellier

     Son souffle s'échouant sur ma mâchoire me réveille au petit matin. Il n'est pas six heures, mais selon Lucile, Sakura se lève généralement entre sept heures et demi et huit heures, le dimanche. Faites des gosses...
     J'embrasse son front et caresse doucement son dos, que le débardeur qu'elle porte dévoile en grande partie. Elle s'est tellement tournée et retournée cette nuit que j'aurais même penser avoir un aperçu de ses seins...
     — Tu sais que t'es encore plus jolie au réveil ? la salué-je lorsqu'elle ouvre les yeux.
     En guise de réponse, elle entremêle ses jambes aux miennes et me monte presque sur le torse, sa main posée sur mon abdomen.
     — Tu devras aussi apprendre qu'il me faut vingt minutes pour émerger, désolée...
     Elle grogne ces mots tout en tournant la tête vers la gauche, prenant maintenant mes pectoraux en guise d'oreiller.
     Je me bouffe à moitié ses cheveux, dont la pointe chatouille mon épiderme, mais bon sang, je pourrais rester ici pour l'éternité... Ou pas.
     L'érection qui grandit contre la cuisse de Lucile lui fait ouvrir les yeux, et elle me regarde mi-amusée, mi-horrifiée.
     — Non mais sérieusement, c'est ça ta façon de t'assurer que je me réveille pour de bon ?! s'exclame-elle tout en gardant sa voix assez basse.
     Je cache mon rire en l'embrassant, laisse mes mains glisser juste au-dessus de la ceinture de son short.
     — Je viens de me réveiller, joli cœur. C'est normal.
     — Normal ? Est-ce que je me réveille avec la culotte toute mouillée, moi ? Mmh ?
     Son petit froncement de sourcils et son ton taquin finissent de m'avoir, et je pouffe involontairement. Elle me pince le ventre pour me faire taire, dépose un petit baiser sur ma peau et je l'entends inspirer longuement, puis je murmure :
     — Je sais pas... Est-ce que c'est le cas ?
     — Tadhg ! T'es vraiment un... Obsédé.
     — T'as commencé, mo ghrá. Et avant que tu cherches une excuse, continué-je en la voyant ouvrir la bouche pour protester, saches que oui, les hommes se réveillent parfois avec un bâton entre les cuisses.
     Je la vois pincer la bouche un instant, alors que son sourire grandit sur son visage, puis elle éclate de rire, si fort qu'elle a dû réveiller Sakura. Je l'emprisonne contre moi pour tenter d'affaiblir le son puis finis par l'embrasser histoire qu'elle arrête pour de bon.
     — On a encore... Trente minutes maximum avant que je partes. Tu veux réduire notre temps ? l'accusé-je en la laissant se dégager légèrement de mon étreinte.
     — Tu rigoles ? Je veux rester dans ce lit toute la journée pour recharger encore plus mes batteries, objecte-t-elle. Mais le « bâton entre les cuisses », c'était beaucoup trop.
     Comme pour appuyer ses précédents propos, elle s'étale de tout son long sur moi, visiblement plus si dérangée que ça par la bosse qui déforme mon boxer.
     — T'as raison, j'aurais plutôt dû dire « le tronc d'arbre »... Sorry, sweetheart.
     Elle maugrée des mots incompréhensibles, pose ses deux mains l'une sur l'autre sur ma cage thoracique, puis son menton. Ainsi, j'ai tout le loisir de voir l'éclat de joie dans ses iris.
     — T'es en forme, dès le matin, dis-donc ! T'as de la chance que je sois tombée amoureuse de toi avant de découvrir ton côté gros lourdingue...
     Tombée amoureuse de toi. C'est tout ce qu'il me fallait pour commencer réellement la journée du bon pied.
     — Et toi, t'as de la chance que je sois tombé amoureux de toi avant de découvrir que tu ne tenais pas en place en dormant... Sérieux, joli cœur, j'ai cru que t'allais finir par m'en coller une dans ton sommeil.
     Elle proteste, jusqu'à ce que je lui chatouille les côtes et qu'elle se tourne pour se retrouver sur le dos, à côté de moi. Je n'abandonne pas pour autant et continue à la torturer un peu, juste pour le plaisir de l'entendre rire, douce mélodie venant percer le calme de la pièce.
     Lorsque je me décide enfin à la laisser reprendre son souffle, dix minutes sont déjà passées. Je tire sur le bas de son débardeur pour cacher son ventre, au risque de la presser pour faire des choses pour lesquelles elle n'est pas encore prête.
     — Je vais y aller, annoncé-je peu après en m'asseyant dans le lit.
     Elle fait la moue et me vole un nouveau baiser, ses bras passant autour de mon cou.
     — On devrait peut-être le dire à Sakura, finalement. Histoire que je puisse profiter d'un vrai réveil avec toi, avec petit-déjeuner au lit et tout le tralala.
     — Si tu veux lui dire maintenant, ça me va, tu sais. Après tout, elle n'attend que ça...
     Lucile semble réfléchir quelques instants, avant de baisser le regard et de poser son front contre ma joue :
     — Je crois qu'on devrait attendre les résultats du procès, avant... paraît-elle hésiter.
     — Mo ghrá... Arrête de croire que ça me dérange que tu veuilles garder ça pour nous, s'il-te-plaît.
     Je bloque sa mâchoire et hausse les sourcils pour qu'elle me réponde, elle se contente d'hocher la tête avant d'avouer :
     — Je t'aime vraiment, Tadhg. Plus que j'ai jamais aimé un homme. Et ça me fait peur, mais en même temps c'est toi, et t'es parfait, t'as toujours été là pour Sakura et moi, t'es patient, t'es à l'écoute... Sauf que je suis terrifiée à l'idée que tu puisses me laisser tomber, un jour... Et pourtant ça ne fait que deux semaines ! Est-ce que tu pourras supporter ma dépendance affective, mes craintes, et tout ce qui fait que je suis loin d'être la copine idéale ? Ne me mens pas, parce que je t'ai confié mon cœur, je t'ai dit des trucs que je n'avais jamais dits à personne, et je sais que t'as promis de toujours être là même si ça ne marche pas entre nous, mais...
     — Lucile, je t'aime, la coupé-je. Je t'aime toi, absolument chaque facette, et j'aimerai aussi celle que tu me feras découvrir plus tard, parce qu'elles font partie de qui tu es, et que j'aime qui tu es.
     Je caresse sa joue du pouce, prends son visage en coupe entre mes mains et l'embrasse, ne pouvant déjà plus me passer de ses lèvres pleines, de son souffle auquel se mélange le mien.
     — Taim i'ngra leat, mon ange, aujourd'hui, demain, dans un mois, dans un an. Je peux te répéter ça dans toutes les langues que je connais si ça te permet de l'imprimer dans ta jolie tête.
     — Moi aussi je t'aime, déclare-t-elle une nouvelle fois.
     Je finis par me lever à contrecœur et enfile les mêmes vêtements que je portais hier, laissant Lucile me raccompagner à la porte.
     — On se voit demain, mo ghrá. Et si ce soir tu as besoin d'une petite photo... plaisanté-je pour tenter de la voir sourire une dernière fois avant de partir.
     Ce qu'elle fait, avant de me pousser dehors en riant :
     — File d'ici, andouille !

Et les mistrals gagnants...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant