Le 07 septembre 2022, Montpellier
>Moi, envoyé à 19h35 : Je croyais que JE devais demander pour une photo ? Dis-donc, toi, t'es un peu trop impatient il me semble ! Il est passé où, le gars qui me disait de demander seulement si j'en avais besoin ?
>Tadhg, reçu à 19h37 : Après la journée de merde que tu as passée, t'as le droit à une photo offerte si tu l'acceptes, Lucile. Offre à durée limitée : tu as jusqu'à 19h45 pour la saisir, passé cette horaire je serai déjà bien au chaud sous un plaid.
Je retiens mon rire en lisant son message, toute la tristesse ressentie aujourd'hui s'évaporant dans une nuage de bonheur à la place.
Nous avons parlé de sexualité il y a à peine plus de vingt-quatre heures : suis-je déjà prête à laisser tomber les barrières et tenter le paradis ? Peut-être...
Peut-être que ça me ferait du bien, de tout lâcher et de me laisser consumer par les plaisirs charnels en solitaire. Peut-être qu'après une telle journée, j'ai besoin de relâcher la pression et de tenter de trouver mon point sensible...
Je tape ma réponse rapidement avant de l'envoyer, me triturant les lèvres avec les dents.— On peut savoir ce qu'il t'arrive, ce soir ?
Je m'empresse de verrouiller mon portable et relève les yeux aussi sec, me retrouvant devant les regards suspicieux de Grégory et Mathilde.
— Moi ? Rien, mens-je un peu trop rapidement.
Échange de coup d'œil entre les deux, puis Mathilde, tel un ninja, récupère mon téléphone sans même que je puisse commencer à esquisser un geste. Grégory, lui, se relève et vient bloquer mes bras avec les siens, tandis que ma sœur déverrouille mon téléphone et laisse échapper un grand cri dans l'appartement. Sakura, assise dans le canapé avec un livre, sursaute avant d'aller dans sa chambre, trop habituée à la folie de sa tante.
— JE LE SAVAIS, BORDEL DE CHIOTTE !Elle pivote l'écran allumé vers Grégory, qui se met à me percer les tympans, sa tête trop près de la mienne.
— Non mais j'y crois pas, espèce de vilaine sœur ! Tu te tapes le kiné sans nous le dire ?!
J'ouvre de grands yeux lorsque, enfin, mon téléphone se retrouve devant mes yeux. Il a été rapide, le bougre !
Son torse. Nu. Parsemé de gouttes d'eau, tandis que l'on devine le pommeau de douche derrière lui. Des tablettes de chocolat à faire oublier qu'on est au régime. Une peau légèrement bronzée, un grain de beauté sur son pectoral gauche. Le haut de sa mâchoire, où l'on devine le sourire qu'il a sur les lèvres. Putain, qu'il est beau.
— Greg, ils s'envoient des putains de photos à poil ! précise-t-elle plus bas.
— Merde, il est bandant en plus !
Horrifiée par ce que vient de dire mon petit frère, je tente de lui faire lâcher prise sur mes bras et essaie d'attraper mon téléphone, mais Mathilde se retourne d'un bloc.
— Vous avez eu un rencard ? Attends, c'est pour ça que c'est maman et papa qui ont amené Sakura à l'hôpital, quand elle s'est cassé le bras ?
J'ouvre la bouche pour répondre, mais elle continue :
— « Joli cœur », « ce manège entre nous »... « déjà accro »... Non mais je rêve, ça dure depuis combien de temps vous deux ?!
Cette fois, les deux se rassoient en face de moi, me dévisagent une seconde, puis deux, puis dix, tandis que je cherche par où commencer.
— Alors déjà, finis-je par me lancer, il n'est pas bandant, Greg, et t'as déjà un mec. Ensuite, il n'est pas à poil sur la photo. Et enfin, j'ai aucun compte à vous rendre !
Yeux plissés, petite tape sur mon téléphone toujours en sa possession, Grégory décide lui aussi de se lancer dans leur nouveau jeu favori, j'ai nommé l'humiliation de notre sœur :
— OK, pas bandant. Mais t'aurais un sacré problème si ça te fait pas mouiller ta petite culotte, Lulu.
— J'ai jamais réussi à lui faire avouer, tiens. Alors, Lulu, ma Lucile, le kiné a enfin réussi à te faire salir tes sous-vêtements, avec son accent et ses putains d'abdos en béton ? surenchérit Mathilde.
— Mais arrêtez, merde ! m'emporté-je. Sérieux, vous êtes lourds, bordel !
J'ai très, très chaud. Je n'ai jamais eu aussi honte de toute ma vie...
— Lucile... On te taquine, chérie. On veut juste pouvoir se réjouir pour toi, tu mérites vraiment d'être heureuse avec quelqu'un...
Je me calme un peu, laisse tomber ma tête contre la table et prends une grande inspiration.
— Se réjouir pour toi, pendant que le docteur Gallagher te fait jou...
— NE TERMINE SURTOUT PAS CETTE PHRASE, GREGORY ! ordonné-je en pointant un doigt vers lui. Vous voulez tout savoir ? OK. Alors... OK. Bon. Heu...
Ils éclatent de rire tandis que je m'avachis sur la chaise, mon téléphone vibrant sur la table. Deux abrutis sautent quasiment dessus, nouveau petit cri de ma sœur, sourire moqueur de mon frère, portable qui glisse vers moi.>Tadhg, reçu à 19h48 : Alors, parfait ? Ça va t'aider, tu crois ? Bonne soirée, joli cœur, fais de beaux rêves...
— Tu veux peut-être qu'on dégage d'ici, histoire de te laisser faire de beaux rêves ? se moque ma sœur.
— Vous comptez me laisser en placer une ?
Cette fois, enfin, j'ai toute leur attention et je prends mon temps pour remettre un peu d'ordre dans mon cerveau avant de me lancer pour de bon :
— Il a entendu notre conversation le quatorze juillet, c'était un peu bizarre le lendemain, il est parti en congés, il est revenu début août, on a commencé à se rapprocher un peu, mais ça c'était déjà le cas en juin, quand il nous a accompagné au cinéma et que Sakura a fait son malaise, il a passé deux heures avec moi pour me rassurer, bref, du coup on s'est dit « tiens, ça serait bien de commencer à jouer comme des gamins, le premier qui réussi à faire craquer l'autre a gagné ? » et j'avais marqué un point à mon anniversaire, sauf qu'il a dit qu'il voulait me sauter dessus quand il est venu me prêter son gilet, et ensuite paf ! il me propose un rencard, donc j'accepte parce que bon, pourquoi pas ? je pleure dans la voiture, puis encore au restaurant, parce qu'il a pointé du doigt pas mal de trucs justes, il me rassure, on danse, on manque de s'embrasser, maman m'appelle et il me dépose aux urgences, puis je me dis qu'il mérite beaucoup mieux donc je lui envoie un message, terminé. Le lendemain, je m'en veux, je veux lui demander pardon, mais qui débarque après quatre putains d'années d'absence ? Damien. Il me menace, il demande la garde exclusive de Sakura, il envoie une vidéo de nous en train de... Non, pas de nous : de lui, en train de me violer. Je pleure, je commence les cartons, et Tadhg se pointe il y a un peu plus d'une semaine, je lui raconte tout, il me rassure, on s'embrasse, je lui avoue que j'ai jamais réussi à prendre du plaisir, il me propose de m'aider, en tant que petit-ami : pas question qu'on fasse un truc tous les deux tant que j'ai pas réussi à jouir toute seule. Sakura tape une crise aujourd'hui, il l'aide à se calmer, je rentre, et voilà. Des questions ?
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Et les mistrals gagnants...
RomanceLucile, vingt-quatre ans, élève seule Sakura, sa fille de quatre ans. Son "joli cerisier", comme elle aime tant l'appeler. Fort, robuste, qui peut traverser toutes les tempêtes. Seulement, parfois, les tempêtes sont trop puissantes pour un si jeune...