DÉCEMBRE 2015

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Un coup, deux, trois et le silence, un silence grave et inquiétant. Est-ce que ce silence signifiait que la personne qui se trouvait derrière la porte me laissait tomber, comme tout le monde ? Étais-je de nouveau seul ? Ça bourdonnait dans mes oreilles, ça me faisait mal à la tête, c'était pas normal. À vrai dire, rien de tout ça n'était normal. Le bruit persistait, c'était trop bruyant, assourdissant. Les coups contre la porte reprirent, j'avais l'impression que les murs tremblaient. Un certain temps s'était écoulé depuis les premiers coups, de longues minutes. Quelque chose tomba sur moi, je grimaça légèrement et secoua lascivement la tête pour m'en débarrasser. Il faisait noir dans la pièce, dans ma tête aussi, je ne voyais rien et les coups continuaient de frapper. Il fallait que ça cesse, tout de suite, les coups et le bruit sourd. Ma tête menaçait d'exploser mais je ne savais pas quoi faire pour tout arrêter, c'était trop tard, bien trop tard. Faire machine arrière était désormais impossible, tant pis.
Les coups cessèrent d'un seul coup mais le silence ne refit pas son apparition, non, à la place il y eut un énorme claquement, un bruit assez étrange. Il fut suivie de pleins de cris, de bourdonnements. C'était loin mais ça s'approchait, je l'entendais arriver, c'était tout près.
Et d'un seul coup, un coup derrière la porte de la salle de bain, elle s'ouvre. Plus rien.

- Rosa...

C'est lui, il est là.

- Elle est là ! Venez ! Dans la salle de bain !

Tout va très vite, c'est le même processus que la dernière fois pour mon accident. Ils me demandent si je les entends, si je peux bouger ou parler mais je ne réponds pas. Je veux le faire mais je n'y arrive pas, alors je laisse tomber. Mon corps se soulève, j'ouvre les yeux, puis se repose. Tout est trouble, je ne vois rien ou alors vraiment très mal. C'était donc ça qui m'était tombé sur le visage, une des boites de pilules. Ça cri partout, j'ai du mal à respirer. Il est là, une main sur la bouche et une larme à l'œil. Il est beau, il porte le t-shirt que je lui ai offert pour son anniversaire. Il se fait bloquer à l'entrée de la salle de bain quand il tente de m'approcher pourtant il me manque. Son regard capte le miens mais il enfouit rapidement son visage dans ses mains pour cacher ses pleurs. Mon corps tremble, j'ai vraiment beaucoup de mal à respirer.

- Comment elle s'appelle ?

Je m'appelle Rosa, mais je n'ai pas répondu quand il me l'a demandé alors il s'est tourné vers lui.

- Elle s'appelle... elle s'appelle Rosalie, il tente de dire clairement
Rosalie Delaine.

C'est beau, c'est beau dans sa bouche, il ne m'appelait jamais par mon prénom tout entier avant, avant tout ça.

- Le bébé, c'est le sien ?

- Non... sa voix tremble
C'est... c'est sa nièce.

- Il faudrait prévenir les parents de l'enfant alors. Est-ce que vous avez des moyens de contacter sa famille ou ses amis ?

Il hoche la tête et capte mon regard une nouvelle fois, je souris. Il entrouvre la bouche mais sort de la salle de bain aussitôt. Je suis seule, avec les personnes qui m'entourent mais horriblement et terriblement seule. Il revient, il porte Tara dans ses bras et l'a berce doucement en embrassant le somment de son crâne pour qu'elle cesse ses pleurs, ça marche. C'était elle le bruit sourd, elle pleurait, elle hurlait car personne ne s'occupait d'elle, mais depuis combien de temps était-elle seule dans son berceau ? Mon cœur se serre, elle est belle elle aussi.

- On va l'emmener à l'hôpital, elle a sûrement avalée les trois boites de comprimés. C'est très grave monsieur, vraiment très grave.

Il pleure de nouveau mais il reste beau, je l'ai toujours trouvé très beau.
Je suis soulevée, je suffoque quand on me fait descendre les escaliers sur cette civière. On me demande de me calmer mais je n'en fais rien, j'ai mal partout, je souffre. On m'installe dans un camion, quelqu'un m'embrasse le front mais je continue de suffoquer. Les portes se referment, j'ai encore mal et quelque chose me pique le ventre. Puis tout devient subitement très noir, je ne vois plus rien et je n'entend plus rien non plus. Je n'ai plus mal, je ne sens plus rien, je pars tout doucement.

One More Kiss // NekfeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant