One More Kiss // Nekfeu

JANVIER 2016

La pluie s'était remise à tomber et il faisait désespérément froid, un temps bien hivernal comme personne ne l'aime. Mon cœur me faisait mal, il ne cessait de tambouriner contre ma cage thoracique comme s'il avait envie d'en sortir définitivement. Les cris ainsi que les klaxons dûment à la nouvelle année qui venait de retentir se faisaient encore entendre. Des gens riaient et dansaient sur les devantures des bars et des restaurants, se prenaient dans les bras et s'embrassaient. Prise d'une atroce mélancolie, je resserra mon gilet sur mon corps et je ferma lentement les yeux en appuyant ma tête contre la vitre arrière de la voiture de Lisa.

- On aurait pas dû y aller, s'exclama cette dernière entapant violemment sur son volant
C'était une mauvaise idée, je le savais putain !

- Calme toi Lisa, chuchota Océane
Rosa s'est endormie, ne l'a réveille pas.

Les sanglots coincés dans le fond de sa gorge ne manquèrent pas de froisser mon cœur une nouvelle fois, c'était atroce cette petite voix prête à laisser place à d'énormes pleurs. Je faisais semblant de dormir, je n'avais en aucun cas envie que ma sœur et ma meilleure amie s'inquiète à propos de mon état.

- Tu as vu comment Mohammed m'a jugé ? reprit ma grande sœur
Je n'ai jamais vu autant de dégoût à mon égard que dans son regard ce soir, c'était horrible et puis j'ai bien vu que les autres pensaient la même chose que lui.

- Mais non Lisa...

- Bien-sûr que si Océ ! Ils ne comprennent pas mon choix mais ils ne sont pas à ma place, qu'est-ce qu'ils auraient fait si ça avait été leur petite sœur qui avait tentée de se suicider et qui refusait de dire un mot depuis ? Ils font les grands hommes, ceux qui jugent et qui pensent plus haut que tout le monde mais ils ne savent rien. Même maman est d'accord avec moi, j'en ai rien à foutre de ce que eux pensent, j'ai pas besoin d'eux et puis tout est de leur faute de toute façon. Ils n'ont rien à dire.

Mon cœur se brisait un peu plus à chacun de ses mots, j'avais l'impression qu'elle me poignardait à chaque fois qu'elle ouvrait la bouche. Elle semblait si horripilée, sur les nerfs, à fleur de peau et elle avait de bonnes raisons de l'être. Je laissa alors sa colère me bercer car aussi étrange que cela puisse être, son ton dur et sa voix cassée par les cris qu'elle avait poussé un peu plus tôt m'apaisaient légèrement. Mon nez retroussé ainsi que les traits de mon visage se détendirent lorsque mes pensées divaguèrent vers la célébration du nouvel an qui avait pris un tournant auquel personne ne s'attendait.

**

J'avais déjà embrassé plus de la moitié des gars et j'étais dans les bras d'Océane lorsqu'ont entendit frapper à la porte. Cinq coups, forts, secs et puissants. Personne ne savait de qui pouvait provenir ces coups à part moi. Ils ne me virent pas me rassoir, trembler et perdre l'intégralité de mon sourire, trop occupés à observer Alpha avancer vers sa porte d'entrée. Le bruit de la serrure fut le seul que nous entendions avant un profond silence, un silence hors du commun. Celui qui glace le sang, qui te fait peur et qui est là pour pourrir tout ce qui l'entoure sans rien éviter sur son passage.

- Je te jure que si tu me laisse pas entrer je te pète la gueule Alpha... aller t'es mon frère, fais pas le batard... je te filerais tout ce que tu veux, mes pompes et même mon calbard mais laisse moi entrer s'il te plaît...

Sa lamentable voix provoqua le frissonnement de mon épiderme tout entier, j'avais tant rêvé d'elle ces dernières semaines que l'entendre si suppliante et sûrement bercée par l'alcool me faisait beaucoup de mal. La porte d'entrée claqua et des pas horriblement lents approchèrent du salon.

- On fait la fête sans moi maintenant ?

Je ferma fermement les paupières pour me convaincre que si je ne le voyais pas, rien de tout ça ne pouvait être réel. Il n'était pas là, il n'était pas retombé dans l'alcool, je n'avais pas perdu notre enfant, je n'avais pas eu d'accident, lui et moi ne nous étions jamais disputés au bord de cette route.