One More Kiss // Nekfeu

DÉCEMBRE 2015

Il pleut, ça fait trois jours qu'il pleut sans cesse. Parfois ça tonne, il y a des éclairs et les murs tremblent mais le plus souvent c'est une simple pluie, agaçante et banale. Ma chambre est chauffée, un peu trop même mais j'y suis presque bien, presque. J'ai eu le droit à tous les conforts, la télé, le fort chauffage, un nombre d'oreillers illimité, le chouchoutage des infirmières... Ça m'agace, tout m'agace, tout ce confort et ces personnes qui vont et viennent toute la sainte journée dans ma chambre. Je voudrais simplement être seule, toute seule dans mon lit d'hôpital. J'ai envie de leur hurler dessus pour qu'ils me laissent tranquille mais ça fait trois jours que je ne parle pas, pas un mot. Je me suis enfouie dans un profond mutisme pour me protéger et protéger les autres. Plus personne ne s'aventurerait à venir me rendre visite si j'avais le malheur d'ouvrir la bouche pour hurler ne serait-ce que le quart de ce que je ressentais. Ça frappe à la porte mais je ne réponds pas alors elle s'ouvre, sans mon autorisation.

- Coucou mon amour...

C'est encore Lisa, ça fait déjà trois fois que je la vois aujourd'hui et il n'est que quatorze heure.

- Regarde qui est-ce que j'ai ramené avec moi... reprit-elle en avançant dans ma chambre

Je daigne tourner la tête vers elle pour observer ce qu'elle m'avait apporté et n'esquissa même pas un léger rictus lorsque je vis qu'elle était accompagnée de Milou et Adèle.

- Comment tu vas ma puce ? me demanda Milou

Sans aucune réponse de ma part, elle embrassa le sommet de mon front et fut imitée par Adèle. Je retourna alors à ma principale occupation depuis ces trois derniers jours, admirer la pluie tomber. Les filles ne parlent pas, elles se sont contentées de s'asseoir et de laisser quelques soupirs s'échapper d'entre leurs lippes. Ce silence m'apaise mais j'aimerais tellement être seule pour encore plus le savourer, je ne veux pas le partager.

- Tara est chez maman, commença Lisa
Je voulais l'emmener avec nous mais les médecins m'ont dit que ce n'était pas forcément une bonne idée...

Je haussa lascivement les épaules sans détacher mon regard de la fenêtre. Ma nièce me manque, c'est l'une des rares personnes qui me manque dans cette chambre totalement stérile.

- Rosa ?

Je reconnus la voix de Milou alors je tourna doucement ma tête vers elle pour lui montrer que j'écoutais.

- On est là pour te voir mais on voulait te parler de quelque chose, reprit-elle
Alors en fait, je sais pas trop... enfin... tu vois...

- Droit au but Milou, souffla Adèle presque agacée par la gêne d'Émilie
Les gars veulent te voir Rosa, ils sont prêts à tout pour te voir. J'ai l'impression de voir des lions en cages, ils ne tiennent plus en place.

Le fin sourire que j'esquissa leur firent froncer les sourcils et je dû me retenir pour ne pas totalement éclater d'un rire froid, voir glacial.

- Tu... Tu est d'accord ? me demanda Émilie
On est le 31, ça serait l'occasion pour fêter cette nouvelle année et repartir sur des nouvelles bases.

Sans réfléchir, je hocha lentement la tête et grimaça légèrement lorsque je ressentis la pression qu'infligeait la main de Lisa sur la mienne. Je voulais lui demander de partir loin, loin de moi, loin de tous mes problèmes. J'avais envie qu'elle profite de son mari, de sa fille et de sa nouvelle vie de famille. J'étais un poids pour elle même si elle affirmait le contraire, je le savais très bien et je m'en voulais terriblement.

- Les médecins sont d'accords pour te faire sortir vers dix-huit heure, ça te vas ?

Un deuxième hochement de tête de ma part et de nouveaux sourires étirèrent leurs lèvres. Elles avaient l'air d'aimer me voir aussi calme et conciliante, je l'étais depuis trois longs jours, sans répit.