Texte n°464

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Jocela posa son dernier cabas au sol en soupirant. Elle retira rapidement ses bottines à talons et accrocha son vieux trench-coat au porte-manteau avant de se laisser choir dans le canapé.

Son premier jour dans son nouvel appartement avait été épuisant. Entre le gérant en retard, les déménageurs plus empotés qu'un chien en haut d'un arbre et les personnes âgées en train de faire leurs courses un samedi après-midi...

Alors qu'elle regardait les valises et les cabas qui jonchaient le parquet, la jeune femme se sentit seule. Durant toutes les vacances, elle avait été excitée à l'idée d'être enfin indépendante. Elle s'était trouvée un travail juste après avoir fini ses études, avait déniché un appartement libre au prix abordable non loin de l'école maternelle et primaire et, comble du bonheur, la ville abritait une patinoire ouverte tard dans la soirée! C'était tout ce dont elle pouvait rêver.

Joe soupira. Elle devait absolument arrêter de penser qu'elle était épuisée, et ranger son bazar si elle voulait réussir à aller patiner avant la tombée de la nuit.

Elle se leva et se rendit dans la cuisine, s'attelant à y ranger rapidement le contenu de ses deux cabas, avant d'aller fourrer ses vêtements, chaussures et accessoires dans le placard de la chambre, et ses affaires de toilettes dans la salle de bain aux tons clairs.

La jeune femme bourra ses valises dans un coin puis enfila rapidement ses chaussures et son manteau, saisissant ses clés au passage. Elle fourra rapidement ses patins dans son sac, qu'elle balança sur son épaule avant de sortir en trombe de son nouveau foyer.

Joe ferma la porte en bois tout en souriant derrière son foulard, et descendit les escaliers en courant. Elle se mit à fredonner un air qu'elle adorait tandis qu'elle marchait vers la patinoire de la ville, le sourire aux lèvres. C'était son moment préféré de la journée. Dans sa ville natale, elle avait l'habitude d'aller patiner chaque soir, à moins qu'elle soit hors de chez elle ou qu'elle ait autre chose d'important de prévu. Généralement, les patinoires étaient vides vers dix-neuf heures, elle pouvait se détendre tranquillement. Et puis, elle pouvait admirer les étoiles en rentrant... Parfois, elle se dépêchait d'aller se nicher sous sa couette par peur de ce qui pouvait traîner dans les rues dans le noir. C'était le seul hic, mais le fait d'avoir la patinoire à elle seule compensait largement...

Arrivée au lieu tant désiré, Joe s'arrêta devant une vieille femme assise dans un bâtiment affichant le mot «accueil». La secrétaire somnolait, sûrement épuisée par une dure journée de samedi. La jeune femme hésita un petit moment avant de lâcher d'un ton faible un «bonjour» qui ne fit pas ciller l'aïeule. Elle se répéta alors un peu plus fort.

«Pardon, pardon, je suis désolée, s'excusa rapidement la vieille femme avec un sourire contrit. C'est qu'il est tard, d'habitude personne ne vient à cette heure...

-Je comprends, répondit Joe en lui rendant son sourire. La patinoire est encore ouverte?

-Oui oui, nous sommes juste fermés le dimanche et le mardi. Vous avez vos propres patins?»

La jeune femme acquiesça en entrouvrant son sac pour que la vieille femme puisse constater ses dires.

«Je vous fais une carte pour clients réguliers ou...?

-Je viendrai sûrement tous les soirs, annonça la patineuse – ça la gênait pourtant de savoir qu'elle dérangerait cette pauvre femme qui ne devrait plus avoir à travailler. Si vous voulez, je pourrai venir plus tôt...

-Ne vous dérangez pas pour moi, mademoiselle. Votre nom?

-Jocela Del. Ça ne m'embête pas du tout...

La cave - niveau -3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant