Cinq heures du matin. Port Said. Le soleil se lève sur la Méditerranée.. Le soleil rouge est énorme. La chaleur dessine des écharpes de brouillard orange, jaunes et blanches qui strient la boule de feu.
La température est déjà très élevée et mon t-shirt me colle à la peau.
Je descends du bateau qui m'a amené sur ce continent où la terre si sèche s'envole comme de la poussière, au moindre coup de vent. Je prends place dans le bus qui va me conduire à Al-Qāhira, « La Victorieuse ». La plus grande ville d'Egypte. Seize millions d'habitants.
L'autocar, dont la clim ronronne doucement sans vraiment rafraîchir, est un vieux bus, sans doute réformé pour un pays Européen, mais acceptable pour le continent Africain. Il cahote sur les routes mal entretenues, accompagné de part et d'autre des jeeps remplies gardes armés.
Je laisse mon regard flotter sur ces paysages arides et je me demande pourquoi j'ai suivi les conseils de cette diseuse de bonne aventure. Je me souviens comment elle m'avait pris la main et m'avait annoncé l'amour. Le grand amour. Celui avec un grand A. Je ne sais pas si j'ai cru réellement à ses prédictions, mais une force inconnue m'a poussé à faire ce voyage.
Le Caire. Déjà trente cinq degrés, et il n'est pas huit heures. La lumière irradie.
Le bus longe un instant le Nil, puis traverse le fleuve nourricier pour rejoindre la rive ouest, passe sous une autoroute qui semble à l'abandon, et vient se stopper sur les parkings réservés aux autocars des touristes. Les pyramides, face à nous, nous narguent depuis leur grand âge. Des gardes armés protègent les touristes. Depuis le massacre dans la vallée des Rois, à Louxor, tous les sites archéologiques sont sous surveillance.
Je descends du bus, la chaleur me brûle la trachée. Sous ce soleil qui pèse comme une chape de plomb, la lumière est éblouissante. Je lève les yeux sur le sommet des monuments. Brouillé par la poussière et la pollution, le ciel semble les avaler. Ici, le soleil est encore plus présent que n'importe où ailleurs. Peut-être un clin d'œil à Râ (1).
Des vendeurs se précipitent vers les floppées de touristes que déversent des chapelets d'autocars. J'achète un imamah (2) pour me protéger du soleil et de la poussière et je m'en entoure la tête sans attendre. Je reproduis les gestes ancestraux pour que ce morceau de tissu me protège. Je n'avais, jusqu'à aujourd'hui, jamais mis les pieds dans ce pays, et pourtant, mes mouvements sont précis comme si je les avais exécutés durant des années.
Devant moi, deux monstres se dressent à plus de cent trente mètres de haut.
Elles me narguent.
Je laisse sur ma droite la barque solaire et je contourne Khéops. Je souris à voir les touristes plier sous le poids de leurs appareils photos vissés à leur estomac et m'éclipse. Echappant à la surveillance des gardes, je m'aventure seul derrière la pyramide. Sur la façade ouest, déserte, j'escalade la première rangée de blocs de pierres en me demandant comment, il y a quatre mille cinq cents ans, des hommes aux mains nues ont-ils réussi à empiler ces cubes de granit de plusieurs tonnes ?
Me voilà sur l'une des sept merveilles du monde. La première mais aussi la dernière à rester debout.
Malgré cette chaleur étouffante, je grimpe aussi vite que je peux. Je suis en nage. Je ne sais pas d'où vient cette force incroyable qui me fait poursuivre l'ascension malgré la difficulté. Les blocs de pierre font plus d'un mètre de haut et je ne suis pas le meilleur des grimpeurs.
Finalement, au bout de plusieurs heures d'escalade de ces gradins antiques, j'atteinds enfin le niveau recherché. Je baisse les yeux et en dessous de moi, les touristes sont gros comme des fourmis. Je suis à plus de quinze mètres du sol... J'ai le vertige. Je me plaque contre les blocs pour ne pas m'écrouler et longe la pyramide jusqu'à l'angle nord Est. J'y suis. J'ai trouvé ce que je cherchais.
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La cave - niveau -3
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