Texte n°451

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1.

C'est complètement stupide, je me maudit encore d'avoir accepté. Pourquoi avais-je besoin de demander de l'aide à la bande à Kevin ? Imbécile. Tu n'as besoin de personne pour parler à Julia ! En plus, ils ne vont certainement pas tenir leur promesse.

Et maintenant, je me retrouve avec une lampe frontale faiblissante collée sur le front, à contempler des crânes et des tibias sagement alignés. Pour toute la nuit ! Re-imbécile. Ça sent le moisi et il fait froid, je ne peux pas sortir car il faut être à plusieurs pour rouvrir la porte. Enfin, je suppose que c'aurait pu être pire : j'ai entendu dire qu'ils ont fait manger une fricassée d'insectes à Tim. Mais tout de même ... Bref. Je vais passer la nuit dans les catacombes.

Après quelques temps, mes sandwiches ont commencé à me faire de l'œil, je me suis donc empressé de les engloutir. Les macchabées me regardaient d'un air torve, ils devaient en vouloir.

A minuit, j'ai fait un selfie avec ma montre, comme prévu, mais je n'ai pas pu le poster sur le net faute de réseau. Pourvu que Kevin ne s'en formalise pas, et qu'il ne commence pas à croire que je n'applique pas ses consignes ... d'autant que j'ai besoin d'eux demain pour m'échapper avant le début des visites.

Je commence à m'ennuyer ferme, mes jambes tressaillent. En théorie, je devrais rester à proximité, en compagnie de mes charmants voisins. Quoique en fin de compte, ils ne sont pas assez loquaces pour moi : c'est parti pour un tour !

La tache lumineuse de ma lampe défile lentement sur les murs humides, tandis que des statues sacrés apparaissent et disparaissent dans les ténèbres, fantomatiques.

Je n'étais venu qu'une seule fois ici, étant petit. L'atmosphère m'avait fortement déplu, et le guide marmonnait des choses incompréhensibles. Alors tout seul, entouré d'une nuit souterraine et lourde, il me semble presque entendre le murmure des mânes qui y rôdent. Autant dire que je n'en mène pas large. En fait, je suis carrément mort de trouille!

Encore un carrefour ... je dois retourner à l'entrée. Donc, demi-tour, tourner à gauche puis à droite, passer devant l'alcôve au suaire, et arriver devant la jonction en Y. Sauf que ma mémoire se brouille. Je me vois sortir du couloir de droite, et pourtant je suis persuadé d'être venu de la gauche. Mais dans l'autre sens du trajet, cela inverse les positions ?! Autant s'aventurer dans l'un et dans l'autre pour essayer de retrouver mes souvenirs.

C'est décidé. J'entre dans l'un, et ma lampe clignote un bref instant. Je me fige, le cœur tremblant, et m'avance encore. Soudain, je reconnais l'un des saints à l'embouchure d'une nouvelle ramification. Quel soulagement ! j'en rirais presque. Et maintenant, plus de blagues, je rentre.

A présent, mon pas s'accélère de lui-même, le faisceau de la frontale raccourcit de plus en plus rapidement, et une autre sorte de terreur commence à me ronger les entrailles. La lumière vacille un instant, je trébuche, elle se rallume ... s'éteint.

Un hurlement étranglé par l'effroi s'échappe de ma gorge. Je suis mort ! Personne ne me retrouvera avant que je ne meure de faim ou de soif ! Et les rats ! Ils sont comme un tapis grouillant dans certains coins, je n'aurais aucune chance ... Je crois que je suis en train de faire une crise d'angoisse ?! ma respiration est hachée, un étau me broie les côtes ... Mes jambes ne me portent plus, je m'affale contre un mur avant de sentir des dents dénudées et des orbites vides sous mes doigts. Je crie à nouveau.

Non, ce n'est pas possible, cette damnée lampe va se rallumer... Je la secoue encore et encore, avant de jurer et de la jeter impulsivement dans le noir. Je pourrais me maudire !

Et progressivement, il me semble percevoir un froufrou discret. Je me fige à nouveau, au bord de l'apoplexie. Le bruit s'arrête. Je me détend légèrement. Il reprend. Non non non ... Ça recommence. Et tous mes muscles se crispent, je retiens ma respiration. Encore. Plus près. Ça se rapproche.

La cave - niveau -3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant