Texte n°563

25 0 0
                                    

Prologue :

« Je te déteste ! »

Trois mots. Trois mots suffisaient pour briser une vie, pour convaincre une enfant qu'elle ne valait rien. Qu'elle n'était rien.

Cette phrase, à force de l'entendre et de la prononcer, la petite fille avait fini par l'enregistrer. Toujours prononcée d'une voix froide et haineuse, elle sortait de toutes les bouches.

Elle avait dix ans, les cheveux ondulés, noir de jais. Ils faisaient ressortir la couleur de sa peau et l'éclat de ses yeux. Seulement l'éclat de ses yeux s'était éteint depuis bien longtemps.

D'apparence l'enfant semblait heureuse. Mais en réalité, elle souriait pour tromper sa mère, la maîtresse, ses copains et se convaincre elle-même qu'elle était heureuse tout en sachant que jamais ses yeux ne souriraient, car blessée au cœur et à l'âme de blessures irréparables.

Quiconque lisait dans les cœurs aurait pu voir qu'elle était en colère, triste, trahie et désespérée.

Mais comme tous ceux de sa race, elle avait appris à maîtriser ses émotions, ses sentiments et à conserver son visage neutre en toutes circonstances.

Ses yeux dorés lui permettaient de voir tellement de choses invisibles à l'œil humain. De son œil gauche, elle voyait la durée de vie des gens et leur date de mort, de l'autre œil, elle lisait la douleur et l'âme des gens. Et à cause de sa nature de Déesse, elle avait vu beaucoup trop de choses traumatisantes pour son âme d'enfant.

Toutes ces visions étaient beaucoup trop complexes pour son esprit de fillette. Tous ces gens, toutes ces scènes, toutes ces dates. Tout se mélangeait dans sa tête, elle confondait ses pensées et ceux des autres, ces sentiments et ceux des autres.

Elle ne voulait plus rien voir, elle voulait oublier. Oublier tout ce qu'elle avait vu, oublier ce monde corrompu où elle était née, oublier sa mère, oublier son père, oublier jusqu'à son existence.

Elle se haïssait depuis toujours. Elle haïssait ses yeux qui voyaient tout, elle détestait ce visage impassible, ce cœur de glace et cette bouche qui souriait faussement.

Malheureusement, elle ne connaissait pas le seul sortilège capable de la tuer, le sortilège Ultime, le seul sortilège capable de tuer définitivement un dieu.

Mais à dix ans que pouvait-on faire ? Rien.

Elle était enfermée, enfermée dans cette vie, enfermée dans son corps et dans son esprit.

Sa mère était une manipulatrice.

Une manipulatrice qui se servait des gens comme de pantins, elle n'avait pas de cœur. Elle était née avec un cœur incapable d'aimer mais qu'aurait-elle fait pour prouver au monde entier qu'il avait tort, pour montrer au monde entier que même une déesse pouvait aimer. Elle était prête à tout pour ressortir du lot.

Tout, quitte à tomber dans son propre piège.

Sa mère l'avait enfermée dans la maison, refusant qu'elle sorte de peur que son père ne l'enlève. Car sa mère était lâche, lâche comme personne. L'enfant qu'elle avait mis au monde n'était qu'une excuse pour se protéger de son mari. Elle était si peureuse et si lâche et disait souvent « C'est pour te protéger mon enfant. Si tu sors, ton père pourrait te faire du mal ».

Son père était aussi humain que sa mère ne l'était pas. Son père n'était pas fou, il n'était pas malade ni même atteint psychologiquement. Il était juste humain. Un simple humain avec tous les défauts imaginables qu'on leur connaît.

Il était arrogant, orgueilleux, cupide, obsédé par l'argent et le pouvoir, jaloux et sans pitié. Il était sûr de lui, tellement certain de lui qu'il n'avait pas vu le monstre qu'il avait épousé. Il avait emprunté le mauvais chemin sans même s'en rendre compte parce qu'il n'avait pas vu la bouche du loup qui s'ouvrait pour le laisser passer. Trop aveuglé par sa cupidité, il n'avait pas vu le piège se refermer sur lui.

La cave - niveau -3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant