Texte n°525

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"Ne jamais dire qu'un match est perdu d'avance"

Il fallait dire que Caleb était dans l'équipe depuis deux bons mois et c'était à peine si ses pieds avaient foulé de terrain. On lui avait dit qu'il était là en tant que remplaçant d'un membre indispensable de l'équipe, celui-ci s'étant brisé le poignet. De cette phrase, le jeune homme s'était attendu à davantage d'action qu'au club d'échec de son meilleur ami. Malheureusement, il semblait qu'il ne soit qu'un membre figuratif bon qu'a remonté le moral de tous ces parents et élèves croyant la saison de baseball perdue d'avance sans leur lanceur vedette. Autrement dit, Caleb ne servait pas à grand-chose.

Du bout de son banc, le jeune homme observait le massacre se dérouler devant lui sans rien pouvoir y faire. Il devait avouer que l'équipe affrontée par la sienne était plutôt douée, mais le fait que son coéquipier ne fasse qu'envoyer à répétition le même lancer n'aidait en rien. Les Wolves de Peabody menaient déjà à dix contre un en quatrième manche et la situation n'allait pas en s'améliorant. Chaque fois que le joueur 43 s'avançait sur le terrain, peu importe la manière dont il frappait la balle, il provoquait toujours un coup de circuit. De ce match, il avait déjà un grand chelem à son actif, ce qui faisait jubiler Caleb qui était toujours cloîtré sur le banc. Il se savait capable de déjouer ce gars, mais personne ne lui en laissait la chance.

Pourtant, lorsque l'irrépressible joueur portant fièrement le numéro 43 s'avança sur le terrain pour une sixième manche, le coach siffla à Caleb de prendre la place du lanceur déjà présent. Caleb alla s'installer sur son petit monticule et échauffa quelque peu son bras. Le jeune homme jeta un coup d'œil en direction de Paddy, son meilleur ami qui était au poste de receveur. C'était ensemble qu'ils s'étaient toujours pratiqués et Caleb ne pouvait s'empêcher de croire que cela pouvait de temps à autre lui procurer un léger avantage. Le jeune homme ne considérait pas cela comme de la triche, mais il savait pouvoir compter sur Paddy pour toujours être en sa faveur. Tout le monde aimait beaucoup trop l'Asiatique pour seulement vouloir le contester. Sans vouloir être égoïste, Caleb se disait sans cesse qu'il avait réellement de la chance de l'avoir pour meilleur ami.

Caleb soupira puis s'étira une dernière fois avant de lancer cette balle. C'était sa chance, son adversaire ne l'avait jamais vu au jeu, il était donc impossible pour lui d'avoir pu cerner son type de lancer. Cela lui conférait un énorme avantage sur son prédécesseur. Il s'échauffa quelques secondes avant de regarder les doigts de Paddy, ce dernier lui indiquant quelle lancée serait le plus appropriée afin de retirer le redoutable joueur. Une balle courbe, légèrement lente, fit l'affaire. Depuis le début du match, l'autre lanceur ne faisait qu'envoyer des balles rapides puisque, visiblement, il n'avait pas envie de se servir de sa redoutable balle courbe. À trop vouloir modifier son type de jeu, on finit par tout foirer. C'est bien beau la différence, mais parfois il faut se contenter de ce que l'on sait faire.

Caleb envoya ensuite une balle légèrement plus rapide, causant deux prises en sa faveur. À la prochaine, il renvoyait son adversaire sur le banc. Malheureusement, sa prochaine balle avait dévié un peu trop étirer vers la droite, lui emmenant sa première balle du match. Il grogna intérieurement. Le plus grand défaut du jeune homme était qu'il n'avait que trois modes à son actif: bien trop heureux, bien trop triste ou excessivement en colère. Les entre-deux étaient difficilement atteignables et en ce moment, Caleb s'apprêtait à pencher vers la colère. Il détestait rater les choses qu'il savait qu'il aurait pu réussir. Son incapacité à gérer ses émotions lui valait souvent des visites chez la direction de son école. Le grand blond jeta un coup d'œil à Paddy qui lui fit signe de se détendre.

Caleb repris son calme, se rappelant que le baseball était un jeu, un jeu où, dès que l'on se met une pression trop forte, on peut facilement perdre son calme. Si le jeune homme voulait être lanceur dans les ligues majeur plus tard, il avait tout intérêt à apprendre à canaliser ses émotions. Il sortit alors son arme secrète, son fameux lancer à plus de 80 milles à l'heure, de quoi déconcerter tout joueurs de ce nom. Avec son corps élancé mais maigrelet, personne ne le croirait capable de tels lancers. Lorsqu'il avait vu l'expression sur les visages de ces terminales qui recrutaient un nouveau lanceur il y a quelques mois, cela lui avait garanti qu'il avait, quelque part, un brin d'exceptionnel.

La cave - niveau -3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant