Le Chant du Couchant XXV

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-Vous avez souhaité me rencontrer, Kesjarinna? Demanda Koulov, sans relever les yeux de la montagne de papiers qu'il était en train d'observer. 

Il était difficile d'imaginer ce nain bourru et visiblement rompu aux arts de la guerre et du champ de bataille s'affairer ainsi dans un bureau à étudier autant de chiffres, lettres et autres rapports, ses lunettes sans branches vissées du son gros nez. Mais sa concentration ne pouvait camouffler entièrement les effluves d'appréhension vis à vis de la discussion qui allait avoir lieux. Kiine s'avança dans le bureau, l'allure impériale et le regard glacial, comme à l'accoutumée. Au milieu de cette pièce finement ouvragée, au décor tellement surchargé qu'il semblait ne pas y avoir le moindre espace encore disponible sur les murs pour ajouter quoi que ce soit, elle semblait terriblement hors propos, avec sa rude tenue nordique, brodée de symboles simples et du corbeau noir qu'elle avait choisi comme symbole. Des bibelots dorés brillaient sous la lumière des lanternes à reflux derrière leur vitrine dans les armoires ornant les murs de la pièce, incrustés de joyaux et ciselés à la perfection, ajoutant encore plus à la lourdeur de la décoration.

-Je suis venue me tenir informée de l'avancée de la préparation de notre expédition. Lança-t-elle. Voilà plusieurs semaines que vous semblez ne plus avoir besoin de ma présence à Lenkaro, et je commence clairement à me demander si la confiance que j'ai placée en vous était justifiée. 

-Les préparatifs sont en cours, Kesjarinna, je vous l'assure. Je ne mettrais jamais en danger l'honneur du clan Kalamine en faisant une promesse que je ne tiendrai pas. 

-Les préparatifs sont en cours... répéta la Dragonicide. Je vois. Où ça? Qui nous accompagnera? A partir de quand? Quels sont les objectifs précis? Quand rencontrerons-nous nos guide pour discuter des modalités de notre voyage? 

-Je ne compte pas vous embêter de toutes ces considérations administratives, Kesj...

-Vous ne m'en embêtez point. A vrai dire, j'en ai plus qu'assez d'être laissée dans le noir. J'exige donc d'être mise dans la confidence de ces préparatifs supposés. A moins, bien évidemment... que vous n'ayez quelque chose à cacher au sujet de cette expedition, Koulov?

-Non, bien sûr que non. Répondit le nain avec une assurance qu'il n'avait pas forcément, mais, jusque là, la discussion avait pris une tournure moins désagréable qu'il ne l'avait anticipé. Je dirai à mes hommes de vous tenir dans la confidence des avancées, dans ce cas. 

-J'attends plus que simplement être tenue au courant, Koulov. Je prends les rênes. Comme dit un dicton de chez moi, on ne chasse jamais mieux que par soi même. 

-Bien évidemment. Assura le clanique avec son habituel air renfrogné, qu'il essaya tout de même de tordre en un sourire conciliant, alors que Kiine faisait demi tour vers la sortie du bureau. 

Le nain s'apprêta à soupirer, rassuré, lorsque, sur le pas de la porte, la femme la plus puissante du continent s'arrêta pour se retourner.

-Par ailleurs... deux de mes compagnes de voyage ne sont pas rentrées, hier soir. Vous ne sauriez pas ce qui leur est arrivé, à tout hasard?

Koulov frissonna, avant de prendre une expression soucieuse. 

-Non, malheureusement. Vous ne pensez tout de même pas qu'il leur soit arrivé quelque chose? La Palais Royal est le lieu le plus sûr du Royaume. 

-Je le pense, au contraire. Et je crains que ce lieu ne soit sûr que pour ceux qui y détiennent le pouvoir. Sachez que je vais mettre tout en oeuvre pour les retrouver, et que, en tant qu'hôte, j'ose espérer que vous en ferez autant. 

-Bien évidemment! S'il leur est arrivé quoi que ce soit dans l'enceinte du palais royal, alors c'est une menace à prendre très au sérieux. 

Un demi sourire apparut sur le visage de la Kesjarinna. 

La Légende de KiineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant