La Légende de Kiine

Le Destin du Kesjare XXI

Le choc fut violent pour Kiine. C'était beaucoup de choses à prendre d'un seul coup. La première chose qui lui vint à l'esprit fut Balta II, qu'elle avait entraperçut quelques fois... il avait environ douze ans de plus qu'Elpa, et était considéré comme un très bel homme malgré son style et ses traits très miniens, hérités de sa mère, Chrysae, fille du roi de Belles-Mine. Un visage et un héritage, celui de l'Empire, qui avaient attisé les convoitises: on le disait au lit d'une nouvelle femme tous les deux mois. Pourtant, pas un seul héritier n'était ressorti de ces nombreuses coucheries, et il était difficile de croire que toutes ses conquêtes aient choisi de boire des elixirs contraceptifs... Balta était tout de même réputé pour son intelligence autant que sa beauté, bien qu'il excelle plus dzns l'art de la diplomatie que dans celui de la guerre, là où son père maîtrisait les deux à la perfection; c'était la raison admise pour laquelle il ne menait pas lui même ses troupes, ayant laissé ce rôle à une homme plus expérimenté et fidèle, son oncle, Orgnar... qui avait ainsi acquis une renommée guerrière éclipsant de loin l'actuel Kesjare. Et maintenant que ce dernier était mort...

-Père va devenir Kesjare... souffla Kiine, livide.

-Ce n'est pas certain. Tenta de nuancer Honolas. C'est une première dans l'histoire Nordique, après tout, et peut être l'Empire va-t-il s'effondrer après le décès de son fondateur comme celui d'Odin, il y a deux siècles. Et Orgnar pourrait refuser cette position. Qu'en pensez vous, Dragonicide? Vous devez probablement savoir...

-Je ne sais rien de cet homme. Rétorqua froidement Kiine. Je veux simplement que cette guerre imbécile finisse au plus vite, et qu'on ne m'implique pas dans ces intrigues politiques. Ni moi, ni ma compagne.

-C'est un point de vue compréhensible, mais... voyons les choses en face, Dragonicide. Vous serez l'une des filles du Kesjare, et la Dragonicide, qui plus est, une véritable héroïne Nordique... il est certain que ces faits seront utilisés pour affermir le pouvoir, que vous le vouliez ou non. Quant à votre compagne... elle porte déjà sur ses épaules le destin de ses pairs. La Taiga d'Hel n'a toujours pas été intégrée à l'Empire... il est possible - non, probable - que votre liaison revête soudain d'un poids politique indéniable.

Kiine ne voulait pas en entendre plus. Elle refusait d'être celle qui replongerait Yuriana, malgré elle, dans les tractations et intrigues que la guerrière d'Hel cherchait pourtant à fuir plus que tout. Oui... après tout, ce père n'avait rien d'un père. Elle ne lui devait rien. Elle ne voulait plus retourner en Taiga d'Odin. Jamais. Elle voulait fuir... fuir très loin, avec Yuriana, là où elles seraient toutes deux inaccessible de l'Empire autant que des cheffes d'Hel. Un endroit où, tous les jours, elles pourraient se réveiller, serrées l'une contre l'autre au milieu de leur draps, en entendant le clapotis de la mer en contrebas.

-Peu m'importe l'Empire. Répondit simplement la jeune femme. Je ne lui dois rien, et il me doit tout. Qu'il tâche de ne pas oublier qui combattait les Dragons pendant qu'il était en train de s'écrouler...

***

-Que diable es-tu en train de faire, Péritès? Demanda Yuriana en s'approchant des rochers, contre lesquels l'eau venait se jeter avec régularité. À qui parles-tu?

Le jeune homme sursauta, et faillit tomber de son perchoir.

-Oh, Yuriana, te voilà donc! Se reprit immédiatement l'homme, en bon politicien. Je t'attendais.

-Tu m'attendais en limite de domaine, là où même les serviteurs ne viennent pas, debout sur un rocher en train de parler à un inconnu, et tu avais l'espoir que je te trouves alors que tu ne savais même pas que je te cherchais?

Péritès sembla réfléchir très rapidement à une réponse adéquate à donner tandis que Yuriana continuait d'approcher, ses courbes ondulant sous la lumière de la lune.