Le Destin du Kesjare XXII

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Yuriana se réveilla aux aurores, comme à son habitude. Sa main caressa avec douceur le corps endormi de Kiine, serré contre elle dans les draps blancs. La brise marine du petit matin faisait onduler les rideaux transparents devant la grande fenêtre ouverte donnant sur la mer où les deux femmes logeaient, et les rayons du soleil s'élevant au dessus des flots, à l'est, venait frapper la pièce de ses rayons. Yuriana fourra son visage au creux de la poitrine de son amante, qu'elle embrassa avec force et vigueur, tout en évitant avec soin l'immonde cicatrice courant entre les deux belles collines de ses seins. Kiine ne réagit pas. Elle dormait profondément, exténuée depuis sa sortie de l'hôpital quelques jours plus tôt. Se réhabituer à une vie active était plus compliqué que ce à quoi elle avait pu s'attendre. Ses muscles étaient endoloris après avoir été si peu sollicités durant sa rémission. Elle pouvait maintenant remarcher, mais se fatiguait très vite, ce qui avait tendance à énerver la Dragonicide; son caractère têtu la poussait donc à se surmener, ne supportant pas la faiblesse de son propre corps, et elle s'effondrait donc dans ses draps chaque soir d'un sommeil sans rêve. L'avantage, c'est qu'elle ne s'était plus réveillée en plein cauchemar depuis sa sortie d'hôpital. L'inconvénient, c'est qu'elle dormait tout le temps. Et cela, Yuriana avait du mal à le supporter; elle avait dû s'occuper d'elle pendant sa convalescence, veiller à son sommeil, à ses besoins, sans jamais pouvoir coucher avec elle. Et maintenant qu'elles n'étaient plus que toutes les deux, cette marmotte passait son temps à dormir!

Yuriana se retira de la poitrine de son amante, non sans un dernier mordillement vexé. Elle se résigna: Kiine ne se réveillerait pas. Dépitée, la Guerrière d'Hel se leva donc et alla rapidement enfiler sa tunique, pour sortir faire sa remise en forme usuelle. Son parcours était désormais fixe, car elle avait trouvé le meilleur parcours, alliant beauté du panorama et performance sportive. Courir mettait son corps en joie, et elle avait déjà hâte de retrouver ses amis à la palestre des thermes de la colline Advinus, lieux où ils avaient rendez vous ce jour là car plus proche du centre politique de la cité que la presqu'île de Sappho. Yuriana appréciait beaucoup les thermes, lieux adoré des Pontois où l'on retrouvait tous les niveaux de la société réunis en un seul lieu pour se relaxer, se laver ou faire du sport. Il faisait déjà chaud lorsqu'elle sortit dans la rue, courant à son rythme soutenu. Comme à son habitude, elle longea les trois ports donnant sur la mer, remonta l'une des deux collines en petite foulée, et s'arrêta un long moment au sommet pour admirer le panorama et se désaltérer à la petite fontaine qui y déversait son eau. Elle hésita à faire un détour proche de la rive de la Neva, là où, quelques semaines auparavant, avait eu lieu le combat entre Kiine et Freya. La découverte de la crypte avait attiré, à ce qu'elle avait entendu, des hordes d'érudits en provenance de toute part, avides de cette étrange structure d'origine inconnue, et dont beaucoup semblaient ignorer l'existence même. Yuriana imagina cependant les érudits lui poser leurs questions condescendantes, ou bien soupirer à sa seule présence, et grimaça. Non, décidément, elle allait plutôt se rendre immédiatement à la palestre.

Yuriana fut tirée de ses questionnements intérieurs par une perturbation dans le mantra. Elle se tendit immédiatement. Elle sentit la présence de plusieurs personnes dans son dos, alors qu'elle faisait face à la fontaine encastrée dans une roche de la colline, alimentée par l'aqueduc. Elle sentit leur hostilité. Leur peur, également. Elle savait qu'ils étaient là pour elle.

Lorsque le premier poignard s'abattit, elle s'était retournée et abattait son poing sur le bras de son assaillant, qui en lâcha son arme. La guerrière se jeta immédiatement dessus et se releva. Face à elle, bien qu'habillés de tuniques et armés de poignards et de glaives courts, se trouvaient bien un groupe de Nordiques. Leur cheveux étaient coupés à la mode Pontoise, mais leurs traits rudes et leur regards sombre, tout autant que leur cheveux clairs et raides, vendaient la mèche. Yuriana sut qu'elle n'avait pas affaire à une simple vengeance anti Nordique.

La Légende de KiineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant