Chapitre 50

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— Tu seras sage avec les garçons ?

Nous étions près de ma voiture, pour nos adieux avant la nouvelle année. Je n'étais pas serein. Je n'avais pas envie de la quitter, pas après le mail de la veille, pas après sa crise d'angoisse. Pas avec le trio de garçons. Elle poussa un soupir excédé et roula des yeux.

— Pour qui me prends-tu ? râla-t-elle, peu amène.

— Pour une fille bien trop mignonne pour eux.

Elle leva les yeux au ciel, agacée, mais ses joues rougirent légèrement.

— Jaloux.

J'esquissai un sourire et elle se dressa sur la pointe des pieds, enroula son bras derrière ma nuque et mon cœur s'affola quand elle m'attira à ses lèvres.

— Pas de bêtises avec Morvan, chuchota-t-elle, sa bouche contre la mienne.

Sans répondre, je l'embrassai à nouveau et aussitôt, ma langue chercha la sienne. J'étais déjà en manque d'elle, de sa chaleur, de sa peau, de ses gémissements. Son corps se colla aussitôt au mien, répondant à mon appel silencieux et elle sembla frémir. Ma main agrippa ses cheveux dans un geste passionné et quand nous nous séparâmes, je dus faire appel à mon sang froid pour ne pas l'emmener avec moi, lui faire l'amour dans la voiture, puis chez moi, plusieurs fois. J'avais tant envie d'elle !

— Tu sais que je n'ai d'yeux que pour toi, ne pus-je m'empêcher de glisser d'une voix volontairement suave.

— Celle-là non plus, tu ne l'as pas trouvée tout seul.

Ses pommettes rouges me rendaient fou, mais je soufflai lentement avant de lui sourire à nouveau et de l'enlacer tendrement. Un dernier baiser, plus chaste, sur ses lèvres et je fis un pas en arrière, cachant mon désarroi à la laisser repartir.

— À très vite, Blanche-Neige.

— À bientôt, Charmant.

*****

En consultant mon téléphone, je vis qu'Eva n'avait pas encore vu mon message, l'informant de mon départ. Il était tôt, elle devait encore être dans le labo, à cette heure-ci. Je soupirai en m'adossant à mon siège. Nous étions la veille de la Saint-Sylvestre, et j'allai arriver à Paris dans quelques minutes. Ça me rendait nerveux. Même si mes échanges avec Pierrick semblaient apaisés, par écrans et téléphones interposés, il n'y avait aucune assurance que ça soit la même chose une fois en vrai. Quelle serait ma réaction quand je le reverrai ? Est-ce que je verrai cette femme, dans ses traits ? Parviendrai-je à faire abstraction, et profiter de mon meilleur ami pleinement ? Voilà longtemps que sa voix n'avait pas raisonné dans ma tête, à me rappeler la vacuité de mon existence. J'allai bien. Je ne voulais pas replonger là-dedans.

En gare, je ne cherchais pas Pierrick. Averti de mon arrivée, il avait prévenu ne pas pouvoir se rendre disponible pour me retrouver et avait proposé un diner ensemble. Il m'avait indiqué quel métro prendre pour rejoindre mon hôtel, non loin de son appartement, et même s'il avait fortement insisté pour que je loge chez lui, j'avais poliment décliné. Je n'étais pas encore prêt à ça. Je savais aussi que revoir mon ami allait faire ressortir toute la honte que j'avais ressentie après l'avoir violemment rejeté, après mon divorce. J'avais été odieux, à le blâmer de la situation, tout en sachant qu'il ne méritait en rien mes reproches. Après l'accident, il avait tenté de revenir, mais mes barricades étaient si hautes qu'il n'était pas parvenu à m'approcher.

J'affrontai le métro, puis la marche jusqu'à l'hôtel, où je récupérai une chambre aux dimensions correctes, pour la capitale, et je me laissai aller sur le lit, épuisé. Ces prochains jours allaient être intenses, et à mon retour, j'allai avoir du boulot pour rattraper le retard pris sur mes cours. Je grommelai et, sans m'en rendre compte, je m'assoupis tout habillé.

Evangeline [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant