Chapitre 17

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Le lundi, j'envoyai un message à Eva avant de reprendre les cours. Le sourire aux lèvres, je ne pus m'empêcher de repenser à la douceur de sa peau, à son odeur, la chaleur de son corps. J'avais déjà tant envie de la revoir !

✉ Luc — [Bonjour ma belle ! Courage pour cette semaine :) Désolé pour ce week-end, j'avais oublié mon téléphone à la maison. Penser à toi me fait vraiment perdre la tête...♥]

J'étais dans un état étrange, ce matin. À moitié euphorique grâce à Eva, à moitié paniqué, je tâchai de ne pas trop penser au concours pour lequel j'avais lancé mon inscription. Je n'avais pas encore de retour, pour savoir si j'étais retenu ou pas, alors je n'étais pas serein. Je n'en parlais pas à Philippe non plus, de peur de devoir lui annoncer que je ne participerai finalement pas. Je savais pourtant que j'avais toutes mes chances. Le concours Européen du sucre était une discipline technique dans laquelle peu de participants aimaient se lancer, par appréhension, donc il y avait souvent une petite poignée de candidats. Et, je devais l'admettre, mon nom aurait un poids.

La plupart des membres du jury étaient de vieilles connaissances. Faire partie de l'Ordre Culinaire International, même à titre honorifique, m'ouvrait largement les voies. Je n'avais pas honte de ça, je savais que le milieu était ainsi et, heureusement pour moi, je pouvais en tirer profit. J'eus soudain une pensée pour Pierrick. Est-ce qu'il me contacterait, s'il me savait participer au concours ? Si je gagnais ? Pour la première fois depuis deux ans, je l'espérais presque.

En allant déjeuner avec Philippe, je consultai mes messages et je vis qu'Eva m'avait répondu. Je dissimulai mon téléphone à moitié, inquiet à l'idée qu'il puisse le lire et je me sentis comme un adolescent pris en faute, cachant ses méfaits à ses parents. Je pouffai intérieurement et je lus le message, un sourire étirant mes lèvres.

✉ Eva — [Bonjour :) À croire que c'est moi qui ai le cerveau pour deux ! Dire que je ne me suis pas languis d'un petit mot tout le week-end serait un mensonge... je deviens accro aux petits cœurs :p]

Je secouai la tête, touché par sa candeur. Encore une fois, la formulation de son message m'interpella, sans que je parvienne à mettre le doigt sur ce qui me chiffonnait. J'entrai dans le self à la suite de Philippe, sans prêter grande attention à ce qu'il me disait. Il ne sembla pas s'en formaliser et nous nous installâmes avec d'autres collègues, tandis que je répondis à Eva :

✉ Luc — [T'enflamme pas, jeune fille, je suis peut-être pas aussi malin que toi, mais j'ai du niveau ;) Et petite astuce, si tu veux recevoir des messages, n'hésite pas à en envoyer de ton côté, je répondrais toujours ♥]

Pendant le repas, je me concentrais sur mes collègues et leurs conversations. Nous échangeâmes évidemment sur Alexandre et j'eus toutes les peines du monde à me souvenir que son décès ne datait que de la semaine d'avant. Tant de choses s'étaient passées, pour moi, que j'avais le sentiment qu'une éternité s'était écoulée depuis le moment où j'avais ramené Eva chez moi.

Je confiai que mes apprentis n'en avaient pas reparlé, et laissai les autres donner leurs ressentis, parler de leurs états d'âme. C'était bien trop solennel pour moi, et j'eus envie de quitter la table, mais je pris sur moi, dépité. Parfois, les codes sociaux de la bienséance m'échappaient. Même si je ne participais plus à la conversation, je fis en sorte de ne pas paraître trop occupé avec mon smartphone, qui vibra à nouveau dans ma poche, ou Philippe devinerait aussitôt et j'aurais sûrement droit à de nouvelles remontrances. Il ne me parla pas une fois d'Eva et ça m'allait, mais je savais qu'il aborderait à nouveau le sujet tôt ou tard.

On remonta en salle des profs après le repas pour un dernier café et les cours reprirent. Sur le chemin, je consultai le message d'Eva et à nouveau, mon cœur fondit de tendresse.

Evangeline [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant