Chapitre 55

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Me réveiller auprès d'Eva était un réel délice auquel je prenais goût trop rapidement. Pouvoir me blottir contre elle avant de me lever, sentir son odeur, baiser sa peau dès que j'ouvrais les yeux, cela promettait une belle journée. Nous prenions même le temps d'échanger pendant le petit déjeuner, même si elle n'était pas très diserte le matin, j'aimais l'observer se perdre dans ses pensées, le regard dans le vague, le cerveau en cours de chargement. Elle était une beauté naturelle et pure, je me sentais très chanceux. Après nous être préparés, nous attendîmes Chloé dehors, main dans la main, et quand nous nous séparâmes pour la matinée, je ne pus m'empêcher d'espérer qu'elle se passe rapidement.

J'eus un peu de temps pour repenser au binôme qu'elle formait avec Antoine. Cette semaine était décisive pour le jeune homme, et même si Eva s'en sortait très bien toute seule, j'étais également conscient de ce que représentait le handicap d'avoir le jeune homme dans les jambes. Il manquait cruellement d'autonomie et je voyais bien que, de son côté, elle manquait de patience. L'agacement l'amenait à perdre sa concentration et rendait ses gestes moins précis. Je devais les aider à trouver un équilibre, dans leur intérêt à tous les deux.

Eva arriva la première au labo, après manger, et en l'entendant toquer doucement contre la porte, je me tournai vers elle, un sourire ravi aux lèvres. Elle rougit aussitôt et mon cœur se gonfla. Qu'il était bon de la voir être toujours aussi troublée en ma présence ! Elle se dirigea vers le plan de travail face au mien et quand je vis qu'elle esquivait mon regard, je m'interrogeai.

— À quoi tu penses ? fis-je, intrigué.

Je me levai et me dirigeai près d'elle, désirant la toucher, juste un instant, pendant que nous étions encore seuls.

— Devine, marmonna-t-elle.

Ce n'était pas difficile, mais si elle perdait trop les pédales, alors qu'une grosse session l'attendait... Ne pouvant m'en empêcher, je frôlai sa joue de ma main. C'était infime, mais ce simple contact électrisa la pulpe de mes doigts.

— Je suis flatté ma belle, mais il faut vraiment que tu gardes la tête froide.

Des pas commençaient à résonner dans le couloir et je me redonnai contenance en reculant légèrement et attrapant ma toque.

— Ça vaut pour les réactions que je peux provoquer, ou Antoine, continuai-je avec sérieux. Tâche de faire abstraction de tes sentiments, bons ou mauvais.

Les garçons arrivèrent et me saluèrent d'un ton claironnant. Je leur adressai un signe de tête, mon attention toujours focalisée sur Eva. Il fallait qu'elle comprenne que cette semaine allait être déterminante pour leur binôme. Je fondai beaucoup d'espoir en sa capacité à gérer une équipe, un jour. Tout comme je l'avais fait. Comme elle ne semblait pas prendre en mesure ce que j'étais en train de lui demander, j'expliquai :

— Tu as tendance à vite te disperser quand tu es agacée.

Antoine arriva à cet instant près d'elle, avançant à pas prudents quand il vit mon air solennel.

— C'est pour ça qu'il faut qu'Antoine soit plus autonome, fis-je en me tournant en direction de l'intéressé. Essaie de ne plus lui mâcher le travail. Dans l'idéal, travaillez sur un ordonnancement ensemble, vous serez plus performants.

Le jeune homme hocha la tête avec vigueur et j'inspectai son chignon serré qui dépassait légèrement de sa toque.

— Oui, chef, merci ! lâcha-t-il avec ferveur.

Eva, en revanche, hocha lentement la tête, une moue boudeuse sur le visage. Vexée, elle refusa de croiser mon regard et je me mordis les lèvres avant de me rapprocher et de pencher légèrement, baissant un peu le ton.

Evangeline [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant