Chapitre 27

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Je savais que j'avais un peu de temps avant de récupérer la jeune femme sur le chemin, alors je ne me pressais pas. Je me changeai, enfilai ma veste et quittai les vestiaires avant de tomber sur Philippe dans les couloirs. Nous discutâmes quelques minutes avant de nous diriger vers nos voitures, mon estomac se nouant au fur et à mesure que j'approchai de celle-ci. Installé au volant, je lorgnai vers les apprentis réunis dans la cour, avant le dîner. Je ne pus m'empêcher de chercher William des yeux. Mes mains se crispèrent quand je l'aperçus avec ses amis BTM, et j'accélérai pour m'éloigner, la tête bourdonnante.

La route sur laquelle j'avais retrouvé Eva, lors de cette nuit où tout avait basculé, n'était pas très fréquentée, en hiver. Un peu sinueuse, déneigée en dernier parce que les chasse-neiges priorisaient la route principale, elle était un peu angoissante, pour ceux qui n'étaient pas à l'aise. Alors, j'étais plutôt serein sur la discrétion du coin. Je me garai sur le bas-côté, mordant un peu la neige et attendis mon apprentie, le cœur cognant un peu plus fort.

Je ne pouvais mettre de côté ce que j'avais vu dans le couloir. William qui se penchait sur Eva, ses lèvres si proches des siennes... Si j'avais attendu un peu plus longtemps, est-ce qu'elle se serait défendue ? Non, elle avait été tellement figée par la terreur, elle en aurait été incapable. Elle avait développé cet instinct de survie là, après ses agressions. Subir en silence, pour ne pas empirer les choses. Je me mordis la langue. Fort. Et le gout du sang dans ma bouche me fit frissonner. Je ne pouvais pas la blâmer d'avoir été terrorisée. Je ne pouvais pas lui reprocher de ne pas s'être défendue. Pourtant, une rancœur naissait, là, dans mon estomac.

La portière s'ouvrit soudain et je secouai la tête, remettant de l'ordre dans mes pensées. Eva s'installa sur le siège et aussitôt, l'odeur de fleur de cerisier m'envahit, m'arrachant un soupir. Elle était là, désormais, avec moi. Là où je pourrais la protéger.

— Ma belle dame, votre carrosse est avancé ! m'amusai-je en redémarrant.

Elle pouffa doucement, les joues rosies par le froid.

— Merci bien, mon prince !

Après s'être attachée, elle rabattit sa capuche, faisant tomber quelques flocons sur le siège et une nouvelle vague de son parfum m'atteignit, faisant décoller des papillons dans mon ventre.

— Sais-tu que tu as un surnom de ce genre dans mon téléphone ? dit-elle dans un éclat de rire.

Intrigué, amusé, j'oubliai William, ma jalousie. Nous étions à nouveau dans notre bulle, j'étais enfin rassuré.

— Ah ? Puis-je le connaître ?

Les joues roses, elle se tourna vers moi, un large sourire aux lèvres.

— Je t'ai surnommé « Charmant ».

— Je trouve que ça me va bien, fis-je, mon cœur ratant un battement. Mais ça prouve que tu regardes trop la télé !

Elle fronça les sourcils, perplexe et je m'étonnai.

— Ne me dis pas que tu ne connais pas Once Upon A Time ?

— Il était une fois ?

Elle avait traduit le titre spontanément et je pouffai, reportant mon attention sur la route.

— Oui, mais non ! expliquai-je. Une série US, pas tellement mon style, même si l'idée d'adapter des contes Disney en série est plutôt sympa.

— Non, jamais vu, répondit-elle, pensive. Mais maintenant que tu m'en parles, ça me dit vaguement quelque chose.

Evangeline [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant