Chapitre 90

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La soirée se prolongea tard, mais l'humeur de mon amoureuse s'était grandement améliorée. J'avais proposé à ses amies de dîner avec nous pour cette raison, lui donner du baume au cœur avant l'épreuve du psy, mais je ne m'étais pas attendu à autant d'efficacité ! J'étais heureux et serein. Eva était toujours sur la réserve, même si elle était certaine de vouloir suivre son BTM à Paris, c'était évident que ça l'angoissait. Que les filles y emménagent également était une bénédiction. Même si la région parisienne était si vaste qu'on ne pourrait sans doute pas se voir toutes les semaines, mais c'était déjà ça.

Après leur départ, nous avions débarrassé la table et nous étions couchés sans trainer. Épuisé, je m'étais endormi en un instant, ne me réveillant vaguement que tard dans la nuit, quand je sentis Eva se rallonger près de moi après une escapade, je devinai. Je l'enlaçai aussitôt et replongeai avec un soupir.

Je me réveillai plus tôt qu'elle, le dimanche matin, et je laissai dormir ma Blanche-Neige, conscient qu'elle en avait besoin. J'étais nerveux quant au rendez-vous du lendemain. Je craignais l'état dans lequel elle en ressortirait. Elle avait tant progressé, avait remonté une pente si raide, je refusai qu'on la fasse dégringoler. Pourtant, c'était bien ce qui lui était proposé. Je serrai le poing sur ma première tasse de café. J'étais celui qui l'avait persuadé à porter plainte. Je l'avais placé en première ligne de ce marathon judiciaire. Je ne le regrettai pas, mais la culpabilité me bouffait. Elle me faisait parfois l'effet d'une frêle embarcation au milieu de l'océan, affrontant vents et marées, tempêtes et orages, armée d'une simple bouée de sauvetage à moitié crevée. Souvent, je m'identifiai à cette pauvre bouée.

Tard dans la matinée, lorsque la jeune femme me rejoignit à la cuisine, elle avait les traits tirés, et je me forçai à gommer les miens. Après un petit déjeuner copieux qui fit aussi office de déjeuner, nous continuâmes à éplucher les annonces d'appartements, à sa demande. Cette fois-ci, nous prîmes en compte les différentes lignes de métro qui permettaient de rejoindre Noisy le plus facilement possible. Nous passâmes un bon moment, hors du temps, oubliant le rendez-vous du lendemain, oubliant jusqu'à l'heure.

Puis, Eva dut rentrer. Hadès avait demandé à ce qu'elle prenne le chemin du retour, afin qu'ils préparent l'entrevue ensemble, et nous ne pûmes que plier à cette exigence. En accompagnant la jeune femme jusqu'à sa voiture, la tension était revenue.

— Tout va bien se passer, la rassurai-je à nouveau.

Elle ne semblait pas y croire, même si je fis de mon mieux pour dissimuler mes propres hésitations. Mes encouragements me sonnaient tellement creux, face à ce qu'elle allait affronter seule. Elle esquissa un sourire reconnaissant malgré tout et m'embrassa une nouvelle fois.

— Je sais que je t'avais demandé de venir avant l'heure du rendez-vous, mais est-ce que tu veux bien venir une heure après le début ?

— Pourquoi ça ? demandai-je, intrigué.

Elle semblait gênée de me demander cette faveur et elle se mordit la lèvre avant de répondre, esquivant mon regard.

— Je ne veux pas que ça se passe mal avec mon père.

Devais-je tout lui dire maintenant ? Hadès aurait ma peau si je le faisais sans son accord. Ça me frustrait tant ! Je serrai le poing et hochai la tête.

— Promis, fis-je avec douceur.

Un nouveau câlin, plus long, et un dernier baiser et elle était partie. Je dégainai aussitôt mon téléphone, cherchant le bon contact et tapai un message, tout en rejoignant ma maison.

✉ Luc — [Je serai là peu après 14h, demain. À la demande d'Eva.]

La réponse ne tarda pas.

Evangeline [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant