Au cours des jours suivants, je m'étais attendu à être submergé de messages, me demandant des renseignements sur la vie d'Eva, son emploi du temps, nos conversations. Mais, rien ! C'était inquiétant. J'avais le sentiment d'être au bord d'une falaise, dos à Jean-Philippe, attendant qu'il me pousse ou pas. Je n'aimais pas ça, pas plus que de garder le secret, mais si jamais je caftais à Eva, il le saurait. Et il avait le pouvoir de faire de ma vie un enfer.
J'eus le temps de réfléchir à l'attitude de ce père autoritaire et même si j'étais très amer contre lui, j'éprouvais un peu de sympathie. Après les agressions d'Eva, il devait avoir le besoin de la surprotéger. Enquêter sur elle, s'assurer que tout allait bien, par mon biais, c'était tordu, mais ça devait sans doute le rassurer. Tout comme de m'avoir à sa merci. Alors oui, je n'aimais pas cette situation, mais je devais l'accepter, jusqu'à ce qu'il me respecte un peu plus.
Pendant le week-end, sous la pression de Pierrick, je m'inscrivis sur Instabook. Il me conseilla une photo de profil et la première chose que je postai fut une photo de la coupe d'Europe du sucre, posée à côté de ma pièce. Puis, Pierrick m'avait félicité sur le post, le reprit et le diffusait partout, vantant mes mérites et mes notifications n'avaient fait que s'envoler, comme mon nombre d'abonnés. J'engueulai mon meilleur ami, pour ça, mais il se contenta de rire, me disant de profiter de cet instant de grâce.
Eva m'envoya une capture d'écran du post de Pierrick, me demandant si elle devait commencer à m'appeler Monsieur le champion d'Europe. Nous nous appelâmes la veille du départ pour Paris, après une longue conversation par SMS. Je terminais ma valise quand mon téléphone afficha son appel entrant et je décrochai avec un sourire.
— J'en connais une qui va dormir dans le train, demain ! ricanai-je aussitôt.
— Je sais ! s'exclama-t-elle d'une voix impatiente. Mais je n'arrive toujours pas à y croire ! Tu n'es pas excité, toi ?
— De voir Pierrick ? Non. De passer un peu de temps avec toi, y'a des chances !
— Comment allons-nous nous y prendre ? se lamenta-t-elle. Il sera difficile de faire faux bond à tout le monde pour aller s'embrasser dans un coin.
— Je pensais plutôt à se retrouver la nuit.
Ce qui était bien plus raisonnable, et sans doute plus discret. En nous y prenant bien, on devrait pouvoir passer les nuits ensemble, sans trop de problèmes.
— Il faudra que je note ton numéro de chambre alors, fit-elle, un sourire dans la voix.
— En théorie, j'ai demandé des chambres un peu plus grandes, pour Justin et moi, et nous serons donc sur un étage différent du vôtre. Pour ce qui est de la discrétion, ça ne dépendra que de toi.
On courrait plus de risque si je faisais moi-même le déplacement, les apprentis seraient tous sur le même palier. Pour ma chambre, il suffisait juste d'esquiver Justin. J'entendis Eva soupirer.
— Je sais être discrète, quand il le faut ! Je te rappelle que personne ne s'est rendu compte de rien à l'école jusqu'à présent.
— À part Andy, tu veux dire ? ironisai-je.
Ça avait semblé un poil accusateur et je me giflai mentalement.
— À part un fouineur un peu observateur, certes. Tu admettras que ton attitude surprotectrice n'a pas tellement aidé.
— Je ne vois pas de quoi tu parles, me rebiffai-je, en plein déni.
Elle ricana, peu convaincue.
— Rendez-vous à 13h à la gare, donc ?
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Evangeline [En cours]
Romance[Ne pleure pas mon ange, version Luc Baillet] L'univers de Luc Baillet s'est effondré. Juste en un instant, sa vie a volé en éclat. Il doit reconsidérer sa situation, ses projets, son avenir. Il tente de tout reconstruire, sans conviction, incertain...