Chapitre 84

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Je vibrai littéralement de bonheur. Mon cœur abîmé n'avait jamais été aussi brûlant, comme un cataplasme, ces simples mots m'enveloppèrent d'une douceur telle que je me perdis un instant. J'oubliais instantanément mes peines, mes souffrances du passé. Eva était mon évidence. Elle se rapprocha sensiblement et ma main se posa sur sa nuque. Je frissonnai au contact de sa peau fraîche et un feu d'artifice sembla exploser dans mon crâne quand mes lèvres retrouvèrent enfin les siennes. Je la goutai avec douceur, comme si j'avais peur qu'elle n'éclate entre mes doigts, mes mains caressant ses joues, sa nuque. Son souffle chaud se mêla au mien et mes sens vrillèrent.

Elle m'avait tant manqué, j'avais envie de la dévorer toute entière. Une lame de désir traversa mon corps et mon souffle accéléra sensiblement. Elle perçut les signes et prit les devants en s'installant à califourchon sur moi. Je la plaquai contre moi, affamé, tandis que sa bouche s'ouvrit en une invitation charnelle. Quand je frôlai sa langue, elle gémit et mon désir, féroce, me fit trembler. Elle ondula sur moi, me rendant fou, puis soudain, la douleur me tétanisa.

Je me figeai en retenant un grondement, fermant les yeux, tentant de reprendre mon souffle. Eva descendit de mes cuisses et posa sa main sur la mienne.

— Je suis désolée. Est-ce que ça va ?

La vague de douleur passa, mais restait latente, me coupant la respiration. J'ouvris les yeux et en voyant son air si repentant, j'eus un sourire rassurant.

— Hmm, on va éviter de trop se coller, si tu veux bien, hein ? fis-je en récupérant ma tasse.

Sa moue boudeuse m'arracha un rire et je m'interrompis presque aussitôt, les cotes douloureuses. Je bus une gorgée de thé, tandis qu'elle m'imitait, les joues roses.

— Comment s'est passé ton entretien, alors ? redemandai-je.

Cette école, son intégration, c'était la condition pour qu'elle vienne à Paris avec moi. J'avais besoin de savoir.

— C'est sûr, ça aurait été plus simple si tu t'étais joint à moi, fit-elle avec sérieux.

L'attaque me prit de court et je baissai les yeux, mais elle m'embrassa rapidement, désarçonnant mon sentiment de culpabilité.

— Je plaisante, ricana-t-elle. Ça s'est très bien passé. Le dossier que tu as fait sur moi a eu l'air de faire son impression, merci beaucoup pour ça. Mais Pascali disait qu'ils auraient largement pu s'abstenir de venir jusqu'ici et que ma place était de toute façon assurée.

Je hochai la tête.

— Oui, c'est ce qu'avait eu l'air de dire Pierrick également, répondis-je en me rappelant des paroles de mon ami.

— Tu l'as appelé ?

— C'est lui qui m'a appelé, juste après avoir eu ton mail où tu racontais que l'école demandait ma présence à l'entretien, expliquai-je avec un sourire contrit. Il m'a dégommé.

Elle haussa un sourcil circonspect.

— Dégommé ?

Je bus une nouvelle gorgée, m'exhortant au courage de continuer mes confidences :

— Après ton retour de Paris, je n'ai pas cherché à le joindre, admis-je avec embarras. J'étais déçu de sa part, même si, intérieurement, je savais qu'il avait eu raison de te dire pour Nora. Il fallait que tu le saches un jour ou l'autre et comme j'étais apparemment incapable de t'en parler...

Une balle sembla se loger dans ma gorge et je secouai la tête. Je ne m'attendais pas à être guéri tout de suite de Nora. Après tout, cela faisait déjà trois ans, mais je savais que j'irais mieux, désormais. Les doigts d'Eva noués aux miens étaient là pour le prouver.

Evangeline [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant