Chapitre 86

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Quand le réveil sonna, j'étais déjà réveillé. La douleur irradiait mon torse depuis plus d'une heure et je n'étais pas parvenu à me rendormir. Eva lovée contre moi, j'éteignis l'alarme de mon téléphone et embrassai doucement son front, la faisant légèrement grogner, avant de quitter les draps. Dans la salle de bain, j'avalai tout de suite l'antidouleur et me jetai sous la douche. J'avais toujours cette impression qu'un rouleau compresseur m'était passé dessus. J'allai devoir me ménager, aujourd'hui.

Je n'avais pas voulu me mettre en arrêt, je devais assumer mon choix, même ça impliquait de m'organiser différent, à présent que j'étais piéton. Heureusement que je pouvais compter sur Philippe pour m'emmener au CFA le temps de me trouver une voiture. Après ma douche, je vis qu'il m'avait envoyé un message, me reconfirmant de l'attendre devant chez moi, sans être en retard, et j'eus un sourire.

En quittant la salle de bain, j'entendis les filles discuter à la cuisine et je les rejoignis après m'être habillé. Depuis le couloir, je perçus leur conversation d'une oreille distraite, puis les paroles d'Eva fixèrent mon attention :

— Rassure-toi, personne ne peut être une plus mauvaise mère que la mienne.

Je pénétrai dans la cuisine et saluai Sophie d'un signe de tête. Je m'installai près d'Eva, passant une main dans son dos d'un geste tendre.

— Un problème avec elle, récemment ? demandai-je tandis que ma sœur glissait un mug vers moi. Merci pour le café, So'.

Eva se crispa sensiblement avant de hausser les épaules. Peut-être que la présence de ma sœur allait la gêner, et j'allai lui proposer de reporter notre discussion, quand elle se lança, hésitante :

— Après notre... dispute, en rentrant, j'ai appris qu'elle avait essayé de nous tuer, ma sœur et moi.

Un frisson glacé dévala ma colonne vertébrale tandis que je me figeai, choqué.

— Quoi ? lâchai-je, brisant le silence.

La jeune femme leva discrètement les yeux vers Sophie avant de tourner son visage crispé vers le mien.

— Mon père m'a raconté qu'il l'avait trouvée en train de tenter d'étouffer Victoria dans son sommeil, avec un oreiller, narra-t-elle, frémissant légèrement. S'il était rentré plus tard, elle serait très certainement passée à moi. Mon beau-père est en train de divorcer à son tour, elle aurait fait du mal à mon plus petit demi-frère.

C'était succinct, mais tellement violent, j'eus un nouveau frisson. De peur et de rage pure. Je posai ma main dans le dos d'Eva, son teint devenu blême et je ne sus pas quoi dire pour la consoler. Je savais que sa mère était particulière, mais je n'aurais jamais imaginé une telle chose. Je ne concevais pas qu'on puisse faire du mal à son propre enfant. C'était irréel. Qu'Eva ait vécu une telle chose me faisait frémir. Ce fut Sophie qui brisa le silence en lâchant une expression hallucinée.

— Ça fait relativiser, hein ? ironisa mon amoureuse.

Nous sursautâmes en entendant la sonnette retentir et je me levai précipitamment, comme monté sur ressorts. Je n'avais pas eu le temps d'assimiler ce qu'avait fait la mère d'Eva, mais j'avais saisi que je ne pourrais pas en parler plus longuement avec elle. Il restait l'option d'interroger son père. J'ouvris la porte sur Philippe, me composant un visage serein et je lui offris un large sourire, pour le rassurer.

— Salut Philippe, fis-je avec chaleur. Tu es en avance ! Entre, je te prépare un café.

— Merci beaucoup, répliqua-t-il, bourru. Comment tu vas ?

Son regard me détailla, de ma joue abîmée au reste de mon corps, l'air inquiet. Je savais que Sophie lui avait parlé de mes blessures, mais ça ne l'empêcha pas de vouloir m'inspecter. J'ouvris les bras, sans me départir de mon sourire.

Evangeline [En cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant