GraceBlacke

Chapitre 134

Je fis une pause le temps d'intégrer l'information mais cela ne faisait aucun sens pour moi.

- Son oncle vous dîtes ? L'oncle de Logan... d'Alexander ?

- Oui, Allain est un nom d'emprunt, un pseudonyme que j'utilise pour publier. Je savais que ce que j'avais à dire ne plairait pas à tout le monde et je ne voulais pas accabler ma famille avec ce qui suivrait.

- Dans ce cas, pourquoi n'êtes-vous pas devenu roi après l'accident ? demandais-je abruptement.

- Parce que je ne suis pas un GraceBlacke, mais un Harianchede Bellecourt.

- Je vois... vous êtes donc le frère de la Reine Abigail, et de la Comtesse de Talmont ?

- Exactement. Sofia est ma petite sœur. Ne parle-t-elle jamais de moi ? Léon Joseph ?

- C'est tout juste si elle me parle, grimaçais-je.

- Bienvenue au club, chuchota Nate entre deux bouchées.

Joseph pouffa de rire, suivit de près par Nate.

- Je vois qu'elle n'a pas changé !

- Pour être honnête je crois qu'elle ne parle jamais de votre famille. J'ai eu le malheur d'aborder le sujet une fois et j'ai bien cru que s'en était fini de moi !

- Cela ne me surprend pas, sourit-il. Il y a toujours eu des tensions dans la famille, comme dans toute famille je suppose, et j'ai moi-même apporter ma pierre à l'édifice en m'opposant ouvertement à certains aspects de la monarchie, mais le décès d'Abi et ses filles nous a vraiment détruit. Et après cela personne n'a compris pourquoi Sofia et son époux sont devenus Régents. Aujourd'hui encore je ne saurais expliquer pourquoi le choix s'est porté sur eux.

Pourquoi ? Voilà une question que je ne m'étais jamais posée. J'étais trop jeune lorsque les souverains étaient décédés pour connaître autre chose que la Régence, alors pour moi les Talmont étaient les Régents, voilà tout. Pour autant ce mot - pourquoi- resta en suspend un instant. Il avait raison, pourquoi eux plutôt que d'autres ? Ils étaient certainement proches de la famille royale mais pas plus que d'autres, n'est-ce pas ? Ils n'avaient pas de titre particulier, et aucune place dans la succession. Et que je sache ils n'occupaient pas un poste stratégique non plus. Alors oui, pourquoi eux ?

- Pour être honnête je ne m'étais jamais interrogée sur le sujet, mais je comprends pourquoi cela a pu poser problème.

- Et je n'ai rien arrangé en écrivant des tribunes sur la question.

- Vraiment ? Pourquoi ? m'étonnais-je.

- Pour l'égalité je suppose. L'abolition des privilèges. Tout ça.

- C'est un peu vague comme réponse, n'êtes-vous pas vous-même bénéficiaire de ces privilèges ? marmonnais-je.

Nate interrompit sa prochaine bougée et Joseph Allain leva un sourcil perplexe.

- Je comprends mieux la réaction de Sofia. Elle aime que les choses se passent comme elle le souhaite et vous avez certainement secoué son équilibre, rit-il.

- Je suis désolée, je ne voulais pas ...

- Ne vous excusez pas d'être honnête, sourit-il. J'admets avoir cherché à éviter votre question, mais je vais y répondre. Je suis effectivement issu de la haute société et je profite par conséquent de certains privilèges, je ne le dément pas.

Il prit le temps de savourer son café, l'air songeur, avant de poursuivre.

- J'ai toujours apprécié ses privilèges, mais j'avais également conscience des inégalités sociales, et de ma chance. C'est quelque chose que je dois en grande partie à ma sœur, Abigail. Elle avait une âme de socialiste, elle se battait pour une société plus juste et c'est ce qui faisait d'elle une grande Reine. Son époux, William, partageait ses convictions et se joignait souvent à nous pour des discussions enflammées. Lorsqu'il hérita de la couronne il incita Abi, devenue Reine, à s'investir pour les causes qui lui tenait à cœur et c'est sous son impulsion que la réforme de l'Institut a vu le jour et a été menée à bien. Grâce à elle l'Institut est bien plus juste qu'il ne l'était auparavant et l'égalité des chances est devenue une réalité.