Chapitre 110

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Le ciel est magnifique. D'un bleu uniforme, sans nuages. Il fait une chaleur écrasante malgré la légère brise qui souffle dans mes cheveux. Je vois les ombres succéder aux flashs de lumière dans ce qui semble être ma course folle sur un sentier à l'abris des arbres. Les feuilles s'agitent et se balancent au gré du vent. J'entends quelqu'un au loin, est ce que l'on m'appelle ? Je n'en ai aucune idée, mais je ne reconnais ni la voix ni mon prénom. Alors je continue en riant et je débouche dans un endroit baigné de lumière. Je suis éblouie mais je ne m'arrête pas ! Je sais parfaitement où je vais et j'avance droit devant moi.

J'enjambe quelque chose et il fait tout de suite plus frais. Je suis trempé mais l'eau qui coule le long de mes cheveux et de mon dos me rafraichit. Quelqu'un rit, ou bien est-ce moi ? Oui, c'est bien moi. Je ris mais je ne reconnais pas ma voix. Comment cela est-il possible ? J'entends du monde autour de moi mais tout est flou et je n'entends que leurs voix, des voix d'inconnus. Je suis encerclée par les eaux et je ne sens plus la brûlure du soleil sur ma peau. Il pleut, le chuchotis de l'eau s'intensifie. J'ai maintenant de l'eau jusqu'aux genoux, est ce que le niveau augmente ? Ma respiration se fait saccadée – inspire, expire – je tente de me calmer - inspire, expire – c'est plus fort que moi, malgré tous mes efforts je panique. Je m'agite en tous sens et j'ai de plus en plus de mal à respirer. Quelqu'un m'agrippe le bras, une trombe d'eau s'abat sur moi puis le soleil m'éblouie de nouveau. Mes chaussures sont gorgées d'eau et je souris de toutes mes dents, satisfaite.

- Mademoiselle vous êtes trempée ! soupire une jeune femme en tentant d'essorer le bas de ma robe à fleurs.

J'éclate d'un rire cristallin en me précipitant vers les hautes grilles du palais.

***

J'ouvris les paupières, confuse. Qu'est-ce que ...

Je fixais les riches draperies du lit à baldaquin sur lequel j'étais allongée, inerte.

Bientôt un mal de tête assourdissant se fit sentir.

La soirée de la veille avait été pour le moins surprenante. Logan m'avait fait une déclaration totalement inattendue. Ou deux. Il m'avait dit qu'il m'aimait, moi, et qu'il savait pour Nathanaël. Plus exactement qu'il avait compris que j'étais la fille du bal, celle à la robe émeraude dont son ami lui avait parlé. Et puis il avait pleuré et s'était excusé pour son comportement. Si je l'avais pardonné sans mal je ne pouvais pas oublier cette autre facette de lui que je venais de découvrir...

Je me redressais et regardais rapidement autour de moi. J'étais dans une grande chambre richement ornée, sans aucun doute une chambre du palais royal. Je portais encore mes vêtements de la veille et j'avais apparemment dormi sur les couvertures, sans défaire le lit. Je me laissais retomber sur le matelas et le regrettais aussitôt car mon mal de tête s'intensifia.

Ce n'est qu'alors que je remarquais un mot sur la table de chevet. Sonnez quand vous êtes réveillée. J'hésitais un instant avant d'appuyer sur le petit bouton. Une femme de chambre ne tarda pas à apparaître. Elle se présenta et m'accompagna dans la salle de bain attenante tout en me parlant. Je la suivis mais ne retins rien de ce qu'elle me dit, la tête trop lourde pour me concentrer sur quoi que ce soit. Elle me fit m'appuyer sur la magnifique baignoire au pieds doré qui trônait au milieu de la pièce et je m'épongeais le visage avec la petite serviette humide qu'elle me tendit. Je soupirais en pressant le tissu frais et moelleux sur mes tempes battantes. J'avais enfin l'impression d'émerger.

- Je m'appelle Annie.

- Oui mademoiselle, sourit-elle.

- Désolée, souriais-je à mon tour. Je ne suis pas très vive ce matin.

- C'est-à-dire... rit-elle doucement, il est 14h mademoiselle.

- 14h vous dîtes ? fis-je en me relevant brusquement.

- Oui, mais ne vous en faites pas. Les autres ne sont pas encore sortis de leurs appartements, m'assura-t-elle avec un sourire entendu.

- Merci, dis-je en fixant la serviette que je tenais encore, restée immaculée.

- A défaut de vous avoir changé j'ai pris la liberté de vous démaquiller, précisa-t-elle. J'ai également récupéré et rafraichis les vêtements que vous aviez laissé dans la chambre de Mademoiselle Hayden.

- Oh merci, c'est très gentil de votre part !

- A votre service Mademoiselle.

Elle s'affaira autour de moi pour m'aider à me préparer puis m'accompagna jusqu'à une terrasse couverte donnant sur les jardins. Une table avait été dressé pour nous servir ce qui ferait office à la fois de petit-déjeuner et de déjeuner.

Je m'apprêtais à m'y installer quand j'aperçu Nathanaël dans le coin opposé de la pièce. Il était confortablement installé dans un canapé, les yeux rivés sur son journal. Je le rejoignis rapidement mais il me prit de court :

- Je t'ai perdu pendant la soirée.

- Mmm, oui je ...

- Je pensais pourtant que nous passions un moment agréable, ajouta-t-il, imperturbable.

Je l'avais laissé en plan alors qu'il était parti nous chercher des verres et ne l'avais plus revu jusqu'à ce que nous retournions à la voiture. Il était surement énervé et je pouvais le comprendre. J'hésitais une demi seconde :

- C'était le cas...

Il leva enfin les yeux vers moi, j'en profitais pour continuer et tenter de m'expliquer.

- C'était le cas oui, puis nous avons croisé ton ami anglais... Brad ?

- Bradley n'est pas mon ami, pas ces jours-ci en tout cas.

- J'ai bien senti que c'était un peu tendu entre vous.

- Tu crois ? lâcha-t-il la voix débordante de sarcasme.

- Nate. Je sais que tu m'en veux de m'être éclipsée comme je l'ai fait mais...

- Je t'écoute.

- Eh bien, pour être honnête je n'ai pas très bien pris que tu lui dises que je n'étais pas ta petite amie.

- Je vois, et qu'aurais-tu voulu que je lui dise ?

- Je n'en sais rien, c'est stupide, riais-je malgré moi. C'est juste qu'un instant plus tôt tu m'embrassais puis tu étais si froid et distant. J'étais vexée et j'avais l'esprit embrumé.

- J'aurais dû y penser. Saches que cela n'avait rien à voir avec toi.

- Je le sais, je t'assure. Mais hier soir j'étais dans un tout autre état et je l'ai pris personnellement.

- Je suis désolé.

- Ce n'est rien. Mais la soirée a pris un tournant différent après ça. J'ai fini par rejoindre Logan, il sait que nous nous connaissons de sa soirée d'anniversaire.

- Ce n'est pas étonnant, il est intelligent. Nous aurions dû lui en parler plus tôt.

« Je suis on ne peut plus d'accord ! »

Nous nous tournâmes de chef pour apercevoir Logan s'installer à table.

GraceBlackeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant