GraceBlacke

Chapitre 52 | Prince Logan Alexander

Mary m'adressa un sourire désolé. Bien évidemment, elle était au courant. Si elle connaissait Alex depuis son enfance elle était forcément au courant. Lors de notre première rencontre elle n'avait prononcé aucun mot pouvant laisser penser qu'Alex était le Prince, pas un seul. Je sortis en trombe du restaurant, énervée de constater que plus d'une personne avait pris part à cette mascarade. 

Je suivis le chemin caillouteux qui longeait la rivière, comme Mary me l'avait indiqué, et je l'aperçu rapidement, assis sur la rive, dos à moi. Je m'approchais, en colère, prête à en découdre mais il me devança. 

- Je n'étais pas sûr que tu viendrais, lança-t-il d'une petite voix.
Je fus surprise de son ton et je me calmais un peu. 

- Et pourquoi ça? J'estime que j'ai au moins le droit à une explication, votre Majesté...
À ses mots il se retourna brusquement, venant à ma rencontre. 

- Je t'en prie, ne m'appelle pas comme ça...

- Alors comment devrais-je vous appeler? Je me rendis compte que je ne savais pas comment m'adresser à lui maintenant que je connaissais son titre, alors je mettais le protocole en application, vouvoiement et formulation correcte, et il s'en rendit compte. 

- Logan, Alex si tu préfères. Mais surtout, ne me vouvoie pas. S'il te plaît. Pas ça. 
J'acquiesçais et il m'invita à m'asseoir.

- Je ne voulais pas te blesser, je te le promets. Mais quand j'ai compris que tu ne m'avais pas reconnu, je me suis dit que c'était l'occasion parfaite d'avoir une discussion normale avec quelqu'un, sans protocole, sans vouvoiement, sans politesse ostentatoire... Le genre de chose auquel je n'ai pas le droit au quotidien!

- Je vois... Mais tu n'as pas ça avec tes amis? tentais-je.

- Mes amis? Oh je t'en prie Annie, dit-il amèrement. Ça ne grouille pas vraiment, ajouta-t-il en désignant le vide autour de nous.

- Oui, mais tu dois forcément être entouré de tes proches, non? 

- Bien sûr, par tout un tas d'arrivistes. Les choses ont bien changé depuis... aujourd'hui la personne en qui j'ai le plus confiance vit dans une autre Seigneurie.

Ma curiosité me démangeait les lèvres mais je résistais. Il sourit face à mon silence. 

- Tu peux le demander, rit-il. Je parlais de mon meilleur ami, Nate. 

- D'accord, souriais-je à mon tour. Mais ce n'est pas tout à fait ce que je voulais savoir...

- Je t'écoute. 

- Que s'est-il passé? Pourquoi les choses ont-elles changés? demandais-je. 

Il soupira longuement, cherchant par où commencer. 

- Je suppose que tu sais que je suis le seul héritier de la famille royale... fit-il d'un ton bien plus grave, en arrachant des brindilles d'herbe. Je hochais silencieusement la tête, regrettant déjà ma question, je savais qu'il avait une histoire compliquée... 

- J'ai perdu toute ma famille le même jour, toute. C'était il y a 10 ans mais je m'en rappelle comme si c'était hier. Comment pourrais-je l'oublier? Mes parents étaient partis à une soirée, un gala de bienfaisance ou quelque chose de ce genre. Ma sœur aînée, Daphnée, les avait accompagné mais mon autre sœur, Cornélia, et moi étions trop jeunes. J'avais 9 ans et elle 6, qu'aurions-nous pu faire à un tel événement? Nous sommes donc restés au château... Et ce soir là, justement, il y a eu... une intrusion, dans le château. Alors le protocole d'extraction a été suivi à la lettre et j'ai été mis à l'abri dans un bunker. Le lendemain j'ai appris que le reste de ma famille avait eu un accident de voiture, et qu'ils avaient tous péri... Il avait les larmes aux yeux. Je m'en voulais tellement de lui faire revivre tous cela. Je posais ma main sur son épaule et me rapprochais un peu de lui. Après la collision leur voiture a pris feu. Les corps de mes parents ont pu être sorti de la voiture, mais pas celui de Daph... 

Il se leva brusquement et s'éloigna de quelques pas. Je restais silencieuse en le voyant faire face à une sorte de crise de nerf. Il shoota dans plusieurs cailloux et quelques branches en criant des mots sans aucun sens. Je n'ai pas pu l'enterrer! hurla-t-il finalement en abattant son point sur le tronc d'un arbre. Et alors que je croyais qu'il s'était enfin calmer, il recommença, encore et encore. 

- Arrêtes Logan! fis-je en me précipitant vers lui. Je t'en prie, arrêtes! Tu vas te faire mal! Je le saisi pas le bras pour le forcer à me faire face. Il pleurait, vraiment.

- Je n'ai pas pu enterrer ma sœur, Annie... chuchota-t-il avant de s'effondrer à mes pieds. 

Je me laissais tomber à côté de lui avant de le prendre dans mes bras, silencieusement. Il n'avait besoin de rien, sauf d'une épaule pour pleurer.