LOCKED || AEMOND TARGARYEN•

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Shearazad marcha avec une lenteur mélancolique le long de la baie de la Néra, ses pieds s'enfonçant légèrement dans le sable humide. Les vagues, tumultueuses sous l'assaut de l'orage imminent, déferlaient en un va-et-vient incessant, comme si la mer elle-même était en proie à une tempête intérieure. La lumière des éclairs, découpant le ciel sombre, illuminait brièvement la scène, révélant l'intensité du moment.

Elle avança vers l'eau, son regard rivé sur la mer, qui, à ses yeux, était aussi profonde et mystérieuse que le bleu de son dragon. La mer représentait son essence véritable, un reflet de son identité qu'elle avait longtemps cherchée à comprendre. Les vagues, capricieuses et indomptées, semblaient en parfaite harmonie avec son état d'esprit tumultueux. Contrairement à la chaleur des dragons, la mer incarnait une force différente, plus douce mais tout aussi puissante.

Pour Shearazad, la nuit et l'orage évoquaient une connexion profonde avec ses ancêtres Velaryon. Elle se rappelait les paroles de son grand-père Corlys, qui lui avait souvent rappelé que l'essence d'un Velaryon ne résidait pas seulement dans les dragons, mais dans la force mentale et l'honneur. Son identité ne se mesurait pas simplement par le feu et le sang, mais aussi par la résilience et la dignité.

En ce moment, elle se sentait perdue entre ces deux mondes, celui du feu de la maison Targaryen et celui de l'eau des Velaryon. Elle avait toujours su qu'elle n'était pas totalement ancrée dans l'un ou l'autre, mais plutôt quelque part entre les deux, tiraillée entre les attentes et sa propre vérité. L'orage semblait symboliser cette lutte intérieure, une tempête qui faisait rage à l'extérieur comme à l'intérieur.

Elle réfléchit à la période où elle avait cru avoir perdu ses valeurs fondamentales, ses principes, et même sa propre force. Son cœur était alourdi par le poids des erreurs passées, les choix qu'elle regrettait, et les sacrifices qu'elle avait faits. Mais face à la mer, à l'immensité et à la puissance des vagues, elle trouva une forme de réconfort. La mer, éternelle et majestueuse, lui rappelait que malgré les épreuves, il restait toujours une partie d'elle-même intacte, une essence qui pouvait encore se redécouvrir et se régénérer.

En se tenant là, sous l'éclat des éclairs et le rugissement des vagues, Shearazad trouva un moment de clarté. Elle était toujours une Velaryon, façonnée par la mer et le sel, avec une force intérieure qu'elle devait rééveiller. Elle se redressa, le regard déterminé, prête à affronter les tempêtes intérieures comme celles qui faisaient rage au-dessus d'elle.

Ser Nate, posté à une distance respectueuse, observait la scène avec une attention discrète. La nuit était sombre, seulement éclairée par les éclairs qui déchiraient le ciel. Il savait que le comportement de Shearazad était le signe d'une lutte intérieure profonde, mais il se tenait en retrait, conscient que ses propres interventions pourraient sembler intrusives.

Shearazad s'enfonça de plus en plus dans l'eau, les vagues venant lécher ses chevilles puis ses genoux. La robe, trempée par l'eau salée, collait à ses jambes, alourdissant ses mouvements. Chaque pas dans l'eau semblait la libérer un peu plus des chaînes invisibles qui la liaient à ses tourments.

À mesure qu'elle avançait, ses pas devenaient plus assurés, sa course le long de la plage plus rapide. L'éclat des éclairs illuminait son visage et ses cheveux, transformant son rire en une mélodie fragile mais pleine de vie. Il y avait une euphorie, une libération dans ce geste, comme si chaque éclat de lumière révélait une partie d'elle-même longtemps cachée.

Finalement, elle se laissa tomber dans les vagues agitées, l'eau salée envahissant ses sens. Les vagues se brisaient autour d'elle, emportant avec elles une partie de sa douleur et de sa confusion. Son rire, mélangé au bruit de la mer et au grondement des éclairs, résonnait comme un hymne à sa propre résilience.

Ser Nate, voyant la scène, demeura silencieux, respectant le moment de catharsis que vivait Shearazad. Il savait que parfois, la guérison venait de laisser libre cours à ses émotions et de se reconnecter avec la nature. Dans cette danse avec les vagues et sous les éclairs, Shearazad retrouvait peut-être une part d'elle-même qu'elle avait cru perdue.

Elle se laissa doucement emporter par le mouvement des vagues, le sable sous elle se faisant de plus en plus indistinct tandis qu'elle flottait, guidée par l'ondulation de l'eau. Le bruit des vagues et le grondement du tonnerre formaient une mélodie étrangement apaisante. La nuit orageuse, bien que chaotique, offrait un cocon de tranquillité rare.

Shearazad regarda le ciel obscur, les éclairs illuminant fugacement les nuages épais, dévoilant par moments la lune, Selene, qui brillait timidement derrière la couverture nuageuse. Dans cette obscurité parsemée d'éclats lumineux, elle trouva une réflexion sur son propre chemin : une lumière persistante même lorsque le ciel semblait dénué de clarté.

Le désir de donner vie, d'offrir un avenir, devint une force puissante pour elle. Elle était déterminée à avancer, à surmonter les épreuves qui l'avaient marquée. Elle s'imaginait déjà, dans un avenir proche, partageant des moments de bonheur avec Aemond et leurs futurs enfants. La douleur du passé, bien que toujours présente, ne définissait plus entièrement son être. Elle commençait à accepter que pour aller de l'avant, elle devait aussi se réconcilier avec le passé, faire le deuil des pertes subies, et se préparer à embrasser de nouvelles possibilités.

Les paroles de Ser Nate résonnaient en elle, rappelant que même les moments les plus sombres finissaient par céder la place à l'aube. Elle sentait la chaleur de cette promesse à mesure que la nuit avançait, confiante que chaque nouveau jour apporterait son lot de lumière et d'espoir.

Elle s'extirpa lentement des vagues, ses pieds retrouvant le sable ferme, et se dirigea vers la plage, son esprit apaisé par cette communion avec la mer. Elle savait que les prochains jours seraient marqués par des défis, mais elle était prête à les affronter avec une nouvelle détermination. La guérison était en cours, et elle avait décidé d'en être l'architecte, prête à reconstruire et à embrasser un avenir plus lumineux.

Elle étais la preuve vivante que même la nuit la plus sombre prendra fin et que soleil se lèvera.