Chapitre 4-6

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Abigaëlle parut étonnée de me revoir quand je me présentais à la résidence de Camilia. Son air strict restait incrusté sur son visage. Je la suivais dans la vaste demeure jusqu'au bureau de la femme d'affaires déjà installée dans son fauteuil.

— Veuillez nous laisser, Abigaëlle, merci. Et dites à Peter de préparer mes affaires pour mon diner de ce soir.

— Oui, madame.

Je rentrai d'un pas hésitant à l'intérieur de la pièce et me figeai en voyant Yeraz adossé au mur, près de la fenêtre. Il me fixait de son regard glacial sans m'adresser la moindre parole. Je regrettais qu'il ne porte pas ses grosses lunettes noires à ce moment-là.

— Bonjour, Ronney.

Camilia commença ses questions sur ma semaine passée auprès de son fils. Le visage en feu, j'arrivais à peine à répondre. Je sentais le regard pesant de Yeraz dans mon dos.

— Timothy vous convient-il comme assistant ?

— Oui, bredouillai-je, Ashley et lui sont très compétents.

En entendant le prénom de mon assistante, Camilia hocha la tête, l'air excédé.

— Si ça tenait qu'à moi, cette Ashley serait en train de distribuer des flyers sur Jades Boulevard.

Elle avait le même mépris pour elle que ses filles. Je ne comprenais pas d'où pouvait provenir toute cette animosité envers cette jeune femme qui m'était d'une aide précieuse.

— Elle est bien plus compétente que moi pour ce poste. Pourquoi n'est-elle pas à ma place ?

Yeraz eut cette sorte de rire plein de mépris. J'essayais de ne pas prêter attention à cet odieux personnage.

Camilia fit claquer sa langue et dit :

— Elle a outrepassé la règle numéro deux inscrite au contrat. Depuis, c'est moi qui choisis les premiers ou premières assistantes de mon fils.

— Malheureusement, grommela Yeraz qui vint s'asseoir sur le fauteuil d'à côté.

Je ne lui prêtais aucune attention. La femme d'affaires enleva ses lunettes de vue et passa ses mains sur son visage. Elle avait l'air fatiguée, elle aussi.

— Bon, miss Jimenez, qu'avez-vous comme informations à me donner concernant les affaires de mon fils ?

Soudain mal à l'aise, je clignai des yeux. L'atmosphère devint irrespirable. Si tu ne lui donnes rien, tu retrouves la liberté. C'est ce que tu veux, non ? L'image de mon frère s'imposa à cet instant à moi. Le stylo de Camilia tapotait nerveusement sur les feuilles éparpillées devant elle.

— Ronney ?

À côté, j'imaginais le sourire triomphant sur les lèvres de Yeraz. Il devait se délecter de la situation.

— Ronney ?

La voix insistante de Camilia me ramena à l'instant présent.

— Oui, voici le rapport de la réunion avec Hamza Saleh et les collaborateurs présents ce jour-là, chez lui.

Intriguée, Camilia remit ses lunettes en place et prit mes notes. Elle était visiblement pressée de les lire. Le menton haut, les traits calmes, elle commença la lecture de mon rapport. La tête collée au dos du fauteuil, Yeraz gardait la mâchoire serrée durant tout le résumé de celui-ci. Il y faisait référence de blanchiment d'argent et d'appels d'offres trafiqués pour permettre à la Mitaras Almawt de monter plusieurs sociétés bidon. Le rapport faisait détail d'une expédition punitive menée par plusieurs organisateurs dont Yeraz contre l'un de ses collaborateurs pour avoir transmis des informations sensibles sur plusieurs de leurs missions à un juge corrompu du camp adverse de la mafia albanaise.

À la fin de la lecture, Camilia garda le silence durant de longues secondes. Elle ne luttait plus. Son corps se tassa. Son teint était blême. Elle leva les yeux vers son fils qui évitait soigneusement de la regarder. Jamais un regard ne m'avait si vivement frappé.

— Tu as sous-estimé ton assistante. Pour la première fois depuis des années, je comprends ce qui se trame derrière mon dos.

Yeraz se leva si brutalement que j'eus un mouvement de recul. Il passa ses mains sur son front avant de se reprendre et de recouvrer tout son calme.

— Je dois continuer là où mon père s'est arrêté. C'est notre famille. Nous ne pouvons pas leur tourner le dos. C'est mon héritage.

— Ton père est mort, et tout ça, c'est parti avec lui. La mafia n'a plus de place dans nos vies. Tes sœurs et moi nous nous acharnons à redorer notre image pendant que toi tu la ternis. Je ne te laisserais pas faire, Yeraz. J'ai moi aussi des actions sur les affaires de ton père et mon mot à dire !

— Pour quelques mois seulement, car à mes trente et un ans tout me reviendra.

La conversation devenait de plus en plus orageuse. Je décidais de me retirer dans un coin, près de l'entrée de la pièce, pour les laisser régler leur différend.

La scène était horrible, Camilia essayait de faire entendre raison à son fils, lui disant à quel point elle souffrait de cette situation, qu'elle ne voulait pas de cette vie pour lui. Yeraz, lui, ne voulait rien entendre. Il accusait sa mère de ne pas respecter les souhaits de leur défunt père, qu'il ne faisait rien de mal et que c'était la vie qu'il avait toujours connu et qu'il avait choisi.

Ugly Ronney T1 : mafia romance [Français]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant