Ugly Ronney T1 : mafia romance [Français]

Chapitre 4-7

— Je ne te laisserais pas faire, conclut Camilia en menaçant son fils du doigt. À partir d'aujourd'hui, Ronney ne te quittera plus. Chaque minute, chaque seconde de la semaine, elle les passera avec toi. Elle me fera un rapport complet à chaque fois.

— C'est une blague ?

— Non ! Je saurais tout de tes faits et gestes. Cette chevalière signe de ton appartenance à la Mitaras Almawt, je l'aurais le jour de ton trente et unième anniversaire quitte à te dénoncer aux autorités de la ville.

Yeraz se redressa et domina sa mère de toute sa hauteur. Un sourire faux comme le Diable apparut sur ses lèvres. Il déclara d'une voix à peine audible :

— Je tiens dans mes mains chaque juge de cet État. La politique a besoin de la mafia. Je suis l'éminence grise, le relais entre Sheryl Valley et le reste de ce pays.

— Plus pour longtemps, répondit Camilia sur le même ton.

Ils se défièrent du regard quelques instants, puis Yeraz, furieux, tourna les talons pour rejoindre la sortie. Arrivé à ma hauteur, il se pencha vers moi et déclara d'une voix mauvaise et inquiétante :

— Pourquoi n'êtes-vous pas restée en retrait de tout ça comme tout le monde avant vous ?

Je remontai, tremblante, mes lunettes. Un frisson de peur me parcourut l'échine. J'avais rarement eu l'occasion de regarder un visage d'aussi près, surtout celui d'un homme, hormis Caleb bien sûr, mais il n'était pas aussi parfait. Yeraz était si près que je pouvais sentir l'odeur de sa peau. Son implacable autorité rehaussée par un regard aussi noir que la nuit cherchait à m'intimider et ça fonctionnait. Il inclina son visage et ajouta avant de partir :

— Bienvenue dans mon monde, miss Jimenez. Croyez-moi, j'aurais préféré vous épargner tout ça !

La porte se ferma sur lui avec fracas. Camilia, toujours livide, m'invita à m'asseoir en face d'elle. Je repris ma respiration.

— Je sais que vous avez les épaules pour ça, déclara la femme d'affaires après un long silence. Yeraz est compliqué, il l'a toujours été. À ses trente et un ans, toutes les actions de son père lui reviendront. Il deviendra un des hommes les plus puissants de la Mitaras Almawt et influents dans le milieu de la pègre.

Je commençais à comprendre.

— Qu'attendez-vous de moi exactement ?

— Si je suis au courant de ce que fait Yeraz ou ce qu'il prévoit de faire, je pourrais alors mettre mon grain de sel dans les affaires de mon fils. Mon vote compte encore un peu. Je veux détruire cette organisation et sauver mon fils.

— Mais, madame Khan...

— Appelez-moi Camilia.

Je hochai la tête et continuai :

— Camilia, n'avez-vous pas peur qu'il s'en prenne à vous ? Sheryl Valley est une véritable pépinière de mafiosi. Cette mafia est invisible donc d'autant plus dangereuse. Ils ont ce sentiment inégalé de toute-puissance.

— Je sais, mais je ne peux pas laisser Yeraz avec cet héritage empoisonné. J'aurais dû m'éloigner de tout ça avant, quand mes enfants étaient encore petits, mais Yanis, leur père, ne m'aurait jamais laissé partir avec eux. Je ne peux pas non plus compter sur l'entourage de mon fils qui trempe aussi dans ce milieu. C'est le jeu du chat et de la souris que je vous demande de faire.

— Les chats ressemblent plus à des loups dans votre jeu. Si j'avais le choix, je vous donnerais immédiatement ma démission, mais malheureusement je ne l'ai pas.

— À cause de votre frère ?

Je fis oui de la tête. Camilia me tendit un dossier.

— Votre contrat. Si vous êtes d'accord, signez-le. Tant que vous respectez la règle numéro un, vous resterez à ce poste. Je doute qu'elle puisse vous concerner un jour, mais j'ai préféré la noter par souci de transparence.

Je feuilletai le contrat à la recherche de ce paragraphe qui se trouvait à la fin :

Règle 1 : Monsieur Yeraz Khan et son assistante personnelle ne devront pas tomber amoureux l'un de l'autre afin d'éviter de futurs conflits au sein de leur travail. L'assistante n'est pas en droit de s'immiscer dans la vie sentimentale de ce dernier.

Règle 2 : L'assistante personnelle ne doit en aucun cas avoir des relations sexuelles avec monsieur Yeraz Khan. La nature des relations entre l'assistante et monsieur Khan doit rester uniquement professionnelle et...

Ashley !

Je m'arrêtai net de lire à voix haute les clauses du contrat et écarquillai les yeux. En temps normal j'aurais sûrement ri, mais les mots étalés sur le papier eurent à cet instant l'effet inverse. Même en ingurgitant une bouteille cul sec de vodka et ramassée comme une pistache, il était hors de question que je finisse comme Ashley. J'avais l'impression d'avoir atteint le sommet de l'absurdité. Face à cette situation embarrassante, je pris un air atterré et lâchai d'une voix étranglée, dissonante :

— Euh, franchir ces règles est inconcevable pour moi. Enfin, excusez-moi, rien au monde ne pourrait m'attirer dans les bras de votre fils.

Silence. Un léger sourire erra sur les lèvres pulpeuses de Camilia. Elle se leva lentement et commença à rassembler ses affaires.

— Je suis heureuse de l'apprendre, Ronney. À partir d'aujourd'hui, votre seule priorité s'appelle Yeraz. N'oubliez pas, vous travaillez pour moi et non pour lui ! Vous avez carte blanche et gérez comme bon vous semble vos journées avec mon fils. La seule chose que je vous demande c'est de le chaperonner pour me dire tout ce qu'il fait, les personnes qu'il voit, ses rendez-vous et ses projets.

La femme d'affaires me tendit un stylo puis posa ses mains sur sa taille. J'eus l'impression de vivre la scène d'Ursula et d'Ariel dans "La petite sirène" au moment de la signature de leur marché. Elle comptait sur moi pour désamorcer une bombe à retardement, cette bombe c'était Yeraz.

Sitôt la porte franchie du bureau de Camilia, je m'appuyai contre le mur pour tenter de calmer les battements ardents de mon cœur. Je restais plantée là, silencieuse en songeant au désespoir que j'avais vu quelques instants plus tôt sur le visage de cette femme. En l'espace d'une semaine, j'avais basculé dans l'autre camp. Mes pauvres parents ne devraient jamais l'apprendre. De toute façon, personne ne me croirait. Bon sang ! Quelle semaine de dingue ! Je remontai mes lunettes et sortis avec hâte de la résidence, le contrat signé dans mon sac.