Ugly Ronney T1 : mafia romance [Français]

Chapitre 15-3

Il était bientôt 19 heures, le restaurant allait bientôt ouvrir ses portes. Ma mère faisait un dernier tour de salle pour vérifier que rien ne manquait sur les tables.

De mon côté, je rajoutai des frites dans le plat du buffet pour être sûr qu'il n'en manquerait pas trop vite. L'établissement était encore silencieux. C'était un des moments que j'appréciai particulièrement. Petite fille, j'aimais jouer à cache à cache sous les tables avec Elio ce qui agaçait ma mère et la mettait dans des états de grande nervosité. Pour un enfant, cette salle pouvait devenir un véritable terrain de jeu. Peut-être qu'un jour, ce serait les miens qui joueraient ici. Je chassai immédiatement cette pensée. Qu'est-ce que je racontais ? Je ne voulais pas mettre au monde des petits êtres qui subiraient ce que j'avais subi au cours de ma vie. Je ne serais jamais en mesure de leur donner cette confiance qui me manquait cruellement, de les protéger du monde extérieur. Je voyais d'ici les remarques déplaisantes auxquelles j'aurais droit quand j'aurais atteint la trentaine. "Ronney et l'horloge biologique" ça sera sans aucun doute le sujet principal lors des fêtes de famille.

La sonnerie du téléphone me ramena à l'instant présent. Mon père, derrière le comptoir, décrocha. Ses traits se durcirent brusquement ce qui n'indiquait rien de bon. Je passai devant lui pour ranger le plat de frite dans la cuisine, mais ralentis en entendant quelques bribes de sa conversation.

— Oui, Sergio...quoi ? Dans combien de temps ?

Il me lança un regard en coin pour me faire comprendre de m'éloigner. Je partis dans la cuisine et restais près de l'entrée, derrière les portes battantes. Mes sens en surcharge, j'avais une mauvaise intuition.

— Merde ! Ce n'était pas prévu. Les clients vont arriver.

Le ton grave de mon père ne faisait que conforter mes doutes.

— Nous allons fermer ce soir, nous n'avons pas le choix. C'est hors de question que nous recevions nos clients avec cette visite inopinée de la Rosa Negra.

Mon cœur dans ma poitrine ne fit qu'un bond. Le gros John allait venir réclamer son argent aujourd'hui. D'habitude, il faisait irruption aux heures où le restaurant était vide pour ne pas troubler le service. Le différend avec mes parents devait être énorme pour qu'il se pointe à l'improviste.

Quand mon père raccrocha avec mon oncle, je laissai échapper un long soupir avant de me précipiter vers les bacs pour faire mine d'être occupée avec la vaisselle. Mon père entra quelques secondes plus tard en tâchant d'adopter l'air le plus serein possible sur son visage.

— Merci d'être venue nous aider, hija, mais tu peux rentrer. Il y a un souci au niveau de la chambre froide. Nous allons fermer, ce soir.

Mon père, mal à l'aise, remonta son jean. Il restait planté là et attendait que j'enlève mon tablier. Je déclarai à voix basse tout en frottant un plat :

— Ça fait un moment que nous ne sommes pas restés ensemble. Il y a sûrement autre chose à faire.

Mon père jeta un regard nerveux en direction des portes avant de revenir sur moi.

— Pas ce soir. Rentre chez toi, c'est mieux.

Ma mère fit irruption à cet instant dans la cuisine, la mine déconfite. D'une voix blanche, elle appela mon père :

— Miguel, deux hommes sont là et te demandent.

C'était la première fois que je voyais ma mère aussi pâle.

— Le gros John ? m'empressai-je de demander.

Ma mère secoua la tête. Elle avait du mal à parler.

— Non. Je n'ai jamais vu ces hommes auparavant, mais ils n'ont rien à voir avec le gros John et son équipe.

Les épaules de mon père s'affaissèrent. Il se frotta le front pour essayer de réfléchir puis avec un signe de tête, m'ordonna de me cacher au fond de la cuisine. Trop inquiète, je refusai de lui obéir et suivis mes parents dans la salle du restaurant. Ma mère n'était pas du genre à se laisser impressionner par qui que ce soit. Qui étaient ces gens qui avaient réussi à lui faire perdre l'usage de la parole ?