Ugly Ronney T1 : mafia romance [Français]

Chapitre 7-4

Postée au milieu de la chambre, je me concentrai sur les détails de la pièce. Les rideaux, les draps du lit en soi qui n'avait pas été changé depuis la semaine dernière. Pas étonnant, vu que je ne l'utilisais pas. Assis sur une chaise, les jambes croisées, Peter me scrutait de la tête aux pieds avec de temps à autre de petits grognements comme s'il prenait des notes à mon sujet. Je refusai de me laisser impressionner, mais c'était plus fort que moi. Je m'appuyai nerveusement sur un pied puis sur l'autre.

Soudain, ses grognements s'interrompirent. D'un air pensif, il prit son menton dans sa main et se leva en s'avançant lentement vers moi. Peter commença à me tourner autour comme il l'avait fait lors de notre première rencontre. Son visage, couleur cendre, était crispé par la concentration.

— Bon, alors, pourquoi sommes-nous là, ensemble, dans cette chambre ?

J'aurais voulu prendre une voix plus assurée. Peter m'observait avec la même attention qu'un maton surveillant un prisonnier puis d'un bref mouvement de tête, il désigna la paire de chaussures posée au pied du fauteuil.

— Aaliyah, Ghita et Hadriel m'ont mis au défi de vous apprendre à marcher avec ça !

Peter poussa un gémissement et cacha son visage dans ses mains quelques secondes avant de relever la tête. Il me fixait d'un air consterné puis continua :

— Aaliyah et Ghita pensent que vous en êtes capable. Hadriel et moi ne sommes pas du tout de cet avis.

— Ne vous donnez pas cette peine. Je suis du même avis que vous. Si être ou devenir une femme signifie marcher avec ses chaussures aux pieds, je préfère rester comme je suis jusqu'à la fin de ma vie.

Je surpris alors sur ses traits un léger étonnement. Peter s'avança vers moi et prit dans ses doigts une mèche sèche qui s'était échappée de mon horrible chignon-boudin, planté au-dessus de ma tête.

— Quand avez-vous décidé de ne jamais prendre soin de vous ? Ça vous ferait perdre trop de temps de vous préparer pour séduire le monde extérieur ?

Je plantai mon regard dans le sien et répondis en détachant chaque mot :

— Je passe la plupart de mon temps à m'occuper à devenir invisible et je vous assure que ce n'est pas facile.

Une légère moue affaissa le coin de sa bouche. J'étais marqué au fer rouge par toutes les remarques négatives que j'avais reçues sur mon physique tout au long de ma vie. Ronney la moche, Ronney trop maigre, Ronney la bigleuse. Je savais que je ne vendrais jamais du rêve à un homme. J'avais jeté ma féminité dans les orties à l'aube de mon adolescence. Je ne savais pas si mes sentiments se trahissaient sur mes traits, mais Peter me lança un regard chargé de reproche. Il se recula puis se mit à arpenter la pièce.

— Je n'étais pas convaincu à l'idée de devenir votre guide, miss Jimenez.

— Mon Guide ?

— Aux yeux des autres, je suis un faiseur de miracles. Je connais les envies de chacun avant même qu'ils en aient conscience. Je trouve une solution à chaque problème. Tout ce que je touche se transforme en or. C'est pourquoi je suis au service de cette famille depuis si longtemps.

Muette, je regardai Peter se laisser choir dans le fauteuil et continuer à raconter la vision de sa vie et de son monde.

— Je suis les yeux et les oreilles de chaque membre de cette famille. Pour Camilia, mon avis à plus de poids que les grands maîtres de la mode. Elle pense que je vous ai recommandé personnellement, c'est pourquoi elle vous a engagé à ce poste d'assistante. Bien sûr, votre physique disgracieux a aidé à cela. Alors, soyez honnête avec moi, miss Jimenez. Pourquoi êtes-vous ici ?

Je pris une grande inspiration avant d'avouer, honteuse :

— Un pari.

— Oh seigneur.

Peter ferma ses paupières de toutes ses forces puis les rouvrit, plus en colère que jamais.

— Un pari ? Je vais être viré comme un chien à cause d'un foutu pari !

— Non, je ne laisserai personne payer pour ce...malentendu.

Peter se leva brusquement et posa une main sur sa calvitie apparente. Dépité, il déclara en détachant chaque mot :

— Toute ma vie résumée à un pari ! Je suis piégé dans ce jeu mesquin avec vous.

Il continuait de s'apitoyer sur son sort tandis que je regardai ma montre en pensant à Yeraz qui serait fou de rage en ne me voyant pas terminer les nombreuses tâches qu'il me restait à faire d'ici la fin de la journée. Je n'avais aucune envie de l'accompagner au club cette nuit, pourtant c'est ce qu'il risquait d'arriver si je restais là, à écouter Peter se lamenter sur lui-même.

— Je vais réussir, le coupai-je brutalement.

Ce dernier arrêta sa supplique et me regarda avec des yeux ronds.

— Je vais enfiler ses Louboutin hors de prix et je vais m'entraîner sérieusement. Vous allez montrer à tout le monde que votre réputation n'est plus à faire. Vous allez faire de moi une nymphe sortie de la forêt. Je vais être votre plus belle réussite.

Les mots étaient sortis de ma bouche sans même en prendre la mesure. J'étais tellement pressée d'en finir avec tout ça.

Peter, surpris, me regarda avec un regard en biais. Une lueur étrange venait de traverser son visage. Visiblement, je venais de lui donner le challenge le plus excitant de toute sa vie et il était prêt à le relever.