Chapitre 17-4

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Avant de pénétrer dans la salle, mon téléphone sonna. J'invoquai le ciel en silence : Seigneur, faites que ce ne sont pas mes parents qui m'appellent au sujet de cette histoire. Le prénom de Camilia s'affichait à l'écran. Je fronçai les sourcils avant de prendre l'air le plus normal possible.

— Entrez, je vous rejoins, lançai-je à mes deux acolytes.

Ils m'interrogèrent du regard.

— Je dois juste réserver un Uber pour Timothy, mentis-je.

Rassurés, ils m'adressèrent un petit signe de la main puis disparurent à l'intérieur de la salle de spectacle en me laissant dans la nuit tiède.

— Ronney, je suis désolée de vous déranger. Êtes-vous avec Yeraz ?

Camilia parlait fort pour couvrir le bruit qui régnait autour d'elle. La plupart des invités étaient déjà arrivés au château.

— Non, il était prévu qu'il soit à la soirée avec vous. Il me l'a répété tout à l'heure.

Je revis à cet instant l'image de Yeraz en train de ranger le carton d'invitation dans la poche de sa veste. Peut-être avait-il changé d'avis ?

— Il n'est pas là et impossible de le joindre.

— Avez-vous essayé d'appeler ses gardes du corps ou Hamza ?

— Oui, ils me disent qu'ils ne l'ont pas vu non plus, mais leur parole ne vaut pas grand-chose. Dans ce milieu c'est l'omerta qui l'emporte.

J'entendis Camilia soupirer à l'autre bout du fil.

— Je ne vous embête pas plus longtemps. Juste, tenez-moi au courant s'il vous contacte de n'importe quelle manière que ce soit. Ce gala est un des plus importants de l'année.

La colère prenait place dans sa voix. Je répondis :

— N'hésitez pas à me rappeler aussi s'il y a du nouveau de votre côté. Je reste joignable.

Lorsque Camilia raccrocha, je composai le numéro de Yeraz cinq fois, mais sa ligne était éteinte. Je restai un moment devant les portes de la salle dans l'espoir de le voir arriver. Dehors, un vent frais se mit à souffler.

Mon sourire revint sur mon visage, tel un masque, quand je pris place à côté de Bergamote. Le spectacle n'avait pas encore commencé. Je m'appliquai à parler d'un ton indifférent pour que mes deux amis ne se doutent pas que j'étais rongée par l'angoisse.

Je tournai sans cesse ma tête à droite, à gauche puis derrière. Je réfléchissais, je me posais des questions. Heureusement, la représentation allait bientôt commencer et elle m'occuperait l'esprit pendant un bon moment. Mais que me resterait-il après ? Sinon l'inquiétude.

Les lumières baissèrent dans la salle et les voix devinrent des murmures. Un orchestre, situé en bas de la scène, se mit à jouer une mélodie qui me transperça et me fit vibrer dès les premières notes. Le rideau se leva et le ballet apparut. Le décor et les costumes en mettaient plein les yeux, offrant un spectacle à mi-chemin entre la magie et le rêve.

Daphné excellait à chaque pas. Sa peau couleur ébène brillait de millier de petits cristaux sous les lumières des projecteurs, la rendant encore plus éblouissante, plus inaccessible qu'elle l'était déjà.

Tout au long de ce ballet, la musique nous enveloppait, nous caressait ou bien nous bousculait. L'orchestre jouait avec notre ascenseur émotionnel. Les danses qui s'enchaînaient étaient toutes imprégnées d'un caractère féérique. Elles demandaient un effort incroyable que les danseuses arrivaient à faire disparaître sous la plus subtile des grâces. À certains moments, les pieds de Daphné ne touchaient même plus le sol, donnant ainsi l'impression qu'elle se laissait porter par l'air.

Après presque une heurede représentation, le rideau retomba sur le sol. La standing ovation quisuivit était plus que méritée. Les yeux rougis par les larmes, j'acclamai cesdanseuses aux talents exceptionnels. Je n'avais jamais vu un spectacle aussibeau de toute ma vie. Malheureusement, la réalité me rattrapa trop brutalementquand mes yeux se posèrent sur le fauteuil vide à côté de moi. Il n'était pasvenu. Des sentiments contradictoires s'emparèrent de moi : déception, agacement,jalousie, inquiétude. J'imaginais tout et n'importe quoi dans ma tête, mais ceque j'ignorais, c'était qu'en ce moment même, Yeraz venait de déclarer laguerre au chef de la Rosa Negra. Une fusillade sanglante était en train de se dérouler à l'autre bout de Sheryl Valley.

Ugly Ronney T1 : mafia romance [Français]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant