Satisfaite, je retirai mon casque. Alistair avait fait un super travail sur ma mobylette. Le bruit émis par le pot d'échappement restait assez bruyant, mais elle roulait de nouveau et j'étais arrivée à destination sans aucun souci. Décoiffée, je plaquai mes cheveux rebelles en arrière, mais ils avaient décidé d'en faire qu'à leur tête. Je n'insistais pas.
J'étais ivre de joie de pousser les portes de cette bâtisse. L'odeur de ce lieu assez ancien m'avait manqué. L'atmosphère ici était apaisante, je connaissais le moindre recoin de cet immeuble où j'avais l'habitude de venir depuis l'âge de cinq ans. Malheureusement, l'établissement menaçait de s'effondrer et nous, les comédiens de doublages, les équipes de son et les chefs de projets devrions certainement déménager dans un avenir proche.
— Ronney, où étais-tu passé ? Tu aurais déjà dû être là depuis une bonne demi-heure !
Logan, mon binôme sur ce projet me tenait la porte de la salle du studio. Ses doux yeux gris reflétaient une certaine inquiétude. Je l'appréciais beaucoup. À peine plus âgé que moi, il était aimable et son visage pâle était empreint d'une réelle empathie pour les gens.
— Oui, je sais. Je suis désolée, la semaine a été particulièrement difficile et je n'ai pas entendu mon réveil, ce matin. Je travaille pour une peau de vache depuis plusieurs jours.
Logan paraissait compatir à ma situation. Je retirai mon poncho à la hâte et le posai avec mes affaires sur le canapé, bien affaissé. J'attachai mes cheveux en une sorte de patate-chignon, puis m'installai à ma place devant un écran blanc. Logan me rejoignit.
— Nous n'avons toujours pas fait la chanson du générique, on va commencer par ça. Tonio va nous passer la boucle plusieurs fois puis après, nous poserons dessus.
Je remontai mes lunettes avant de régler mon micro.
— Ça ne devrait pas être long, je dois juste bien ajuster ma voix pour coller au personnage de Minnie la petite souris.
À cet instant, Tonio, le chef opérateur entra dans la pièce avec un sandwich à la main. Il n'était même pas onze heures qu'il mangeait déjà. Proche de la soixantaine avec une bonne calvitie, il faisait bien son âge. Tout était rond chez lui, ses yeux, son visage, son corps. Son pantalon usé s'accordait avec le ton de la pièce.
Tonio se plaça sur un petit tabouret derrière nous, puis déclara avec un fort accent texan :
— Ronney, ne t'en fais pas pour la chanson. Elle dure moins d'une minute. N'oublie pas, on veut une voix bien ronde. Tiens, ton verre d'eau.
Il posa le verre sur la table à côté de moi et s'adressa ensuite à Logan :
— Pour Popo l'Hippo, c'est pareil. Je lance la première ébauche que Logan vient d'enregistrer. Et toi, Ronney, tu poses dessus.
Je hochai la tête. Mon collègue partit baisser l'éclairage du studio tandis que Tonio lançait le générique à l'écran. Le texte écrit sur la bande mère me permettait d'analyser le débit verbal et m'indiquait par des signes, les mouvements des lèvres, mais aussi le rythme de ma respiration à adopter. Minnie la petite souris avait une voix assez aigüe contrairement à Popo l'Hippo et elle parlait vite ce qui avait tendance à appuyer sur mes cordes vocales. En plus de ça, je devais faire attention à bien articuler afin que les enfants la comprennent.
VOUS LISEZ
Ugly Ronney T1 : mafia romance [Français]
Roman d'amourRonney est une jeune femme introvertie au physique disgracieux. Elle vit très modestement dans un des quartiers les plus pauvres de Sheryl Valley, une ville gangrénée par la mafia au sud de la Californie. Sans diplôme, elle travaille dur dans le res...